Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Sur le vif - Page 1043

  • Pas de juges étrangers

     

    Sur le vif - Dimanche 19.12.10 - 18.40h

     

    Maire de Strasbourg et sénateur français du Bas-Rhin, Roland Ries, 65 ans, qu’on vient d’entendre sur les ondes de la RSR, semble ignorer l’un des principes fondateurs de notre petit pays : pas de juges étrangers. Des accords, des traités, tout cela oui, mais signés par nous, à égalité de dignité avec le partenaire, et non sous la coupe d’une instance supérieure. Nos plus grands diplomates, qu’ils fussent radicaux (Max Petitpierre) ou socialistes, ont toujours appliqué ce principe, constamment rappelé dans la lecture (passionnante) des « Documents diplomatiques suisses ».

     

    Que propose M. Ries ? Constatant que l’exercice des bilatérales est en bout de course (ce qui est loin d’être démontré, et ressemble plutôt à une rengaine en forme de pression sur la tempe de la part de nos chers partenaires de l’UE), l’Alsacien envisage une « instance supérieure et indépendante » chargée de mettre d’accord les deux partenaires (CH et UE) pour aboutir à une nouvelle forme de relations. Ce qu’on peine à saisir, c’est en quoi cette réflexion sur l’évolution des rapports aurait besoin d’une instance arbitrale, alors qu’elle repose, depuis toujours, sur l’une des forces de notre diplomatie : la négociation.

     

    Pire : le maire de Strasbourg reconnaît lui-même l’exercice comme périlleux, l’Union européenne ayant tendance à nommer des commissions qui, sous couvert d’être neutres, sont sous sa coupe. Surtout, l’opinion publique suisse ne comprendrait absolument pas, aujourd’hui et suite aux années de pressions que nos chers voisins et partenaires viennent d’exercer sur nous en matière de fiscalité, que le principe de rapports de force et de confrontations d’intelligences (la négociation) cède la place à une douteuse mise sous tutelle.

     

    La Suisse est un tout petit pays de sept millions d’habitants, l’Union européenne est un géant. Le seul moyen de discuter avec un géant, c’est de rester très sûr de ce qu’on veut, avec une conscience de nos valeurs, de ce que nous voulons maintenir (démocratie directe, fédéralisme). Et en se souvenant que la petite Suisse, tout en se voulant en paix et dans les meilleures relations avec le reste du monde, a survécu, dans sa souveraineté, grâce à la stricte observance d’un principe cardinal : pas de juges étrangers.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Rémy et son nègre

     

    Sur le vif - Mardi 14.12.10 - 16.43h

     

    Selon nos gorges aux abyssales profondeurs, le mystérieux « juriste masqué » qui aurait rédigé la tentative de putsch de Rémy Pagani en forme de « nouveau règlement de la police municipale » pourrait être – ou avoir été – un important Monsieur de la République.

     

    Allez, je vous donne quelques indices : bientôt 70 ans, sale caractère, excellente forme physique, avocat, amis des locataires, ami des vieux.

     

    Certains murmurent même qu’il aurait passé une douzaine d’années au Conseil d’Etat. Entre jadis et naguère.

     

    Mais allez croire ce que racontent les gens !

     

    Pascal Décaillet

     

  • Pierre-André Stauffer : mémoire et émotion

     

    Mardi 14.12.10 - 11.57h

     

    Intense émotion, ce matin, à la lecture de la page 29 du Temps : la mort de Pierre-André Stauffer. Emotion qui me ramène il y a presque trente ans, les débuts de l’Hebdo, et tout à coup une plume – d’exception – qui nous raconte la politique suisse. A travers les chroniques bernoises de Pierre-André Stauffer, nous découvrons que notre pays a une Histoire, conflictuelle, savoureuse, des tronches, des têtes de lard, mille rivalités de coulisses et de couloirs.

     

    Stauffer nous parle de Berne, et la grise molasse se transmue en Versailles de Saint-Simon, et nous, qui ne vibrions en ces temps-là que pour la politique française, les premiers pas de Mitterrand à l’Elysée, voilà qu’à la lecture passionnée du « Nouvel Observateur » le mercredi, nous ajoutons, tous les jeudis, celle d’un magazine qui nous parle de la Suisse et des Suisses. Et, dans ce magazine, l’incroyable plume de Pierre-André Stauffer.

     

    Je l’ai, beaucoup plus tard, connu et côtoyé, immensément apprécié, avec sa titanesque timidité, l’océan de ses angoisses face à l’article à naître, et puis, une fois dans l’œuvre, son génie des mots. Il y a tant de gens qui se croient écrivains sous le seul prétexte qu’ils publient des livres ou font les raisonneurs. Lui, était une plume, d’alluvions autant que d’étincelles, la terre, la boue, le feu, des éclats de lumière. Juste pour raconter la politique suisse. Celle de notre pays.

     

    Pierre-André Stauffer laisse orphelins les journalistes de Suisse romande. D’autres, dans les jours qui viennent, lui rendront des hommages beaucoup plus nourris que celui-ci, je sais la tristesse qui doit être celle des gens de l’Hebdo, notamment l’équipe fondatrice, dont il était. Celle de sa famille, ses proches, tous ceux qui ont eu le privilège de le côtoyer. Je n’oublierai jamais mes voyages avec lui, à Paris ou à Hambourg, où nous avions longuement interviewé l’ancien chancelier Helmut Schmidt. Je n’oublierai jamais mes premières lectures de ses chroniques bernoises, il y a trente ans. C’est lui qui, un jour, m’a donné le goût de la politique suisse.

     

    Pascal Décaillet