Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Sur le vif - Page 1026

  • Aellen et les mauvais garçons

     

    Sur le vif - Mardi 15.03.11 - 12.36h

     

    J’ai déjà relevé, en pleine affaire Mark Muller, le sang froid et la lucidité du président du parti libéral genevois, Cyril Aellen. Qualités que je ne discerne pas, en toute première lecture tout au moins,  chez nombre de ses homologues. Et qui se sont, une nouvelle fois, vérifiées ce matin, sur One FM.

     

    Dans ces heures cruciales qui suivent les dimanches électoraux (ça se calme en général dès le mercredi), d’aucuns croient briller en se contorsionnant. Nul enfant chinois, même de la plus boisée des provinces, même rompu dès l’aurore de son âge à l’acrobatie de cirque, ne les égale. Tel magistrat radical sortant, nous perdant dans l’interminable nuit d’un préambule. Tel (ex ?) candidat PDC, passé maître dans l’art du chaud et du froid, du ying et du yang, du dit et du tu, perdant le nord pour mieux tromper le sud, finalement nous aveuglant dans une immense nuée orangée, sans doute le bouquet final.

     

    Au milieu de tout cela, Cyril Aellen. Dès les premières secondes, ce matin, il lâche l’info : il veut partir au combat avec l’UDC. Le parti des mauvais garçons. Et des fières Amazone. C’est clair, simple, lisible, il sera vilipendé par les uns, applaudi par les autres, il aura au moins fait de la politique, au sens mendésien : il aura choi-si. Cyril Aellen communique bien, il prend des risques, il est courageux.

     

    Et, l’air de rien, au modeste niveau communal genevois, il entrouvre un horizon nouveau à la politique suisse. Celui d’une droite assumée, ne rougissant pas d’elle-même, ne craignant pas l’inévitable pluie de lazzis et de condamnations de ceux qui, à gauche et dans la tiédeur centriste de certaines sacristies, ne manqueront pas, sous couvert de morale, de lui faire la leçon sur Thomas, Heinrich et Klaus Mann, la fin des années 20, les années 31 et 32, le ralliement des Krupp et des grands industriels, bref le piteux discours de la main tendue au diable. Piteux, parce que l’UDC genevoise n’est pas le diable, l’UDC suisse non plus. Pitoyable, parce que ce paravent de morale tente juste de dissimuler la peur de la gauche d’avoir, une fois dans sa vie, face à soi, une droite à peu près intelligente.

     

    L’alliance se fera-t-elle ? Vu le génie de la droite genevoise, notamment municipale, à monter seule sur l’autel de l’immolation, on peut nourrir quelques doutes. Du côté de ses chers amis de l’Entente, Cyril Aellen ne trouvera qu’un très faible écho : la base PDC a toujours préféré le jaune au noir. Quant à Pierre Maudet, le corset imposé par une certaine Garde noire le contraindra à des postures qui ne sont pas nécessairement celles de son génie pragmatique intérieur. Mais c’est là le problème du parti radical genevois en général, on le retrouvera cet automne dans la course aux Etats.

     

    En ouvrant la voie, en prenant un risque, Cyril Aellen s’est montré beaucoup plus proche des fondamentaux de la droite suisse, quand on sait un peu lire au-delà de la Versoix, voire de le Sarine, que les moralistes de cabinet qui, dans l’entourage de certains ministres cantonaux, ne visent en fait que la permanence, le plus longtemps possible, de leurs prébendes.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

  • Pierre Maudet et la machine à perdre

     

    Sur le vif - Lundi 14.03.11 - 11.00h

     

    Il était déjà étrange qu’avec 42 élus sur 80 au législatif de la Ville de Genève, la gauche pût régner à l’exécutif, lors de la dernière législature,  avec quatre magistrats sur cinq. Il serait hallucinant qu’elle puisse placer le même nombre d’élus à l’exécutif alors qu’elle n’aligne plus, depuis hier soir, que 39 conseillers municipaux sur 80. Ce qui s’appelle, en arithmétique comme en politique, une MI-NO-RI-TE.

     

    Hallucinant, et c’est pourtant bien ce qui risque de se passer le 17 avril. La gauche n’a rien à se reprocher, elle a bien raison de jouer son jeu. Mais la vieille, l’éternelle machine à perdre est en train de se mettre en marche du côté de l’Entente. Sous des paravents moraux, elle dissimule mal l’ambition d’un homme de vaincre en solo : Pierre Maudet.

     

    L’Entente, hier, a réalisé un résultat catastrophique. Le PLR perd cinq sièges, par rapport à la somme libérale-radicale de la dernière législature. Le PDC, malgré une campagne Hollywood, en perd deux. Seule, l’Entente court dans les eaux glacées de la Bérézina. Au mieux, elle pourrait placer Maudet, Punkt Schluss, et c’est d’ailleurs le calcul du radical, qui doit rêver intérieurement de demeurer dans sa superbe solitude, au fond bien confortable, de ces quatre dernières années.

     

    Il existe, pour l’Entente, une chance de placer, disons, au moins deux personnes. C’est de jouer la droite élargie, seule et unique recette de succès. En clair, pratiquer, à droite, exactement les mêmes alliances que socialistes et Verts n’ont, eux, jamais hésité à sceller avec la gauche de la gauche. Michel Chevrolet et Florence Kraft-Babel sont ouverts à cette hypothèse. Pierre Maudet, en complicité avec les obédiences de quelque cabinet noir de son parti, s’y refuse obstinément. C’est la machine à perdre. Aujourd’hui, pour le gouvernement de la Ville de Genève. Le 23 octobre, pour le Conseil des Etats.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Révélation Carasso

     

    Samedi 12.03.11 - 11.13h

     

    Il fait tout juste. À peine le verbe est-il un peu long, mais c’est de famille. Calme, réfléchi, intériorisant ses ébullitions, contemplant l’ennemi avec douceur pour mieux l’ajuster, le président des socialistes en Ville de Genève, Grégoire Carasso, est une révélation politique. Il ira loin. Nullement pressé, ce Don Quichotte apaisé prend le temps de construire, livre un combat après l’autre. Par exemple, la campagne de son parti pour les Municipales de demain. Sur fond de rivalité, silencieuse à l’arme blanche, avec les Verts.

     

    Grégoire Carasso, 30 ans, adjoint au rectorat de l’Université de Genève, est un homme cultivé, avec qui on peut parler Histoire contemporaine, Europe, systèmes politiques des pays qui nous entourent. Il a étudié guerres et traités, connaît le tragique de l’Histoire, parle simple et clair. Juste un peu long. Mais c’est de famille.

     

    Grégoire Carasso ne pratique pas l’assistance au suicide. Lorsqu’un adversaire, en direct sur un plateau télé, décide de mettre fin à ses jours, il le laisse tendrement couler son destin. Il le regarde se noyer, jusqu’à l’ultime ondulation, sur le bleu moiré du lac. Alain de Kalbermatten, son homologue PDC dans la campagne, lui propose, en pleine bataille et à trois jours de l’échéance, une paix séparée (très appréciée de ses collègues de l’Entente…), « pour contrer le MCG ». Avec douceur, il la repousse. La Chapelle Sixtine s’écroule, il demeure de marbre. Vivre et laisser mourir, l’une des clefs de la survie politique.

     

    Dans le même débat, interrogé sur la différence de vitalité entre les socialistes de la Ville et ceux du Canton, non seulement il confirme, mais enfonce. Exécute. Le tout sans la moindre voyelle de violence, chaque syllabe sur le même ton que l’autre, la petite musique de la sentence, juste déclinée. « Il faudra qu’après ces élections, nous en tirions les conséquences ». Le meurtre, en silence, douillet comme un oreiller de plumes. La mort blanche. Le talent.

     

    Pascal Décaillet