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  • Brumaire-sur-Aar

     
    Sur le vif - Mercredi 12.06.24 - 13.45h
     
     
    Il est proprement hallucinant que des élus du peuple suisse, qui sont chez eux au Parlement en période de session, cette enceinte sacrée étant la leur, se fassent mettre au sol par des Rambos de la police fédérale, sous prétexte de visite du "Président du Parlement ukrainien".
     
    Au reste, c'est quoi, cette visite ? On déroule déjà le tapis rouge au "Président ukrainien" au Bürgenstock, et voilà encore le "Président du Parlement" ! La Suisse s'est jumelée avec l'Ukraine ? M. Cassis nous prépare une fusion ? On en est à ce point de désintégration de notre neutralité ?
     
    Mais dans tous les cas, nulle police au monde n'a à venir molester des élus du premier pouvoir suisse, dans le lieu même où ils exercent, au nom du peuple, l'essentielle mission qui est la leur.
     
    Ces pulsions brumairiennes de quelques policiers fédéraux appellent des sanctions contre leurs chefs, au plus haut niveau. Et une mise au point sans appel de la Présidence du Parlement. Elle est là pour ça. Défendre l'indépendance, la souveraineté et la dignité du pouvoir législatif. En aura-t-elle l'élémentaire courage ?
     
     
    Pascal Décaillet

  • Méfie-toi du pouvoir. De tout pouvoir !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 12.06.24

     

    Les Genevois sont des gens sympathiques, mais je me demande parfois s’ils ne sont pas un peu naïfs. Je parle ici de leur rapport d’amour-haine avec les gens qu’ils élisent au gouvernement cantonal, ou dans les mairies des grandes communes, bref les exécutifs. A Genève, nous les désignons au suffrage universel. C’est sans doute très bien, ça leur donne une onction infiniment plus ancrée que d’être élus par un seul Parlement. Chacun d’entre eux peut dire : « Je suis l’élu du peuple, il m’a accordé sa confiance pour cinq ans, j’irai jusqu’au bout de mon mandat ». Traduction : « Foutez-moi un peu la paix, laissez-moi gouverner, je n’ai de comptes à rendre qu’au peuple, au terme de l’élection, si je me représente ».

     

    C’est bien, oui, mais cette légitimité venue d’un large corps électoral a son revers de la médaille : chaque citoyenne, chaque citoyen, qui a élu un magistrat, peut se dire « C’est mon ministre, je lui ai accordé ma confiance, peut-être même mon cœur, j’attends beaucoup de lui, il doit en être digne, il ne doit pas me trahir ». Chaque électeur peut se montrer sourcilleux, possessif, comme un amant jaloux, avec son cher ministre. On a vu ça dans l’affaire Maudet : des gens qui avaient tellement investi affectivement dans ce candidat, soudains déçus, déroutés par la violence de la déconvenue, sont devenus ses pires ennemis, comme parfois dans un couple déchiré par la séparation. Détruire ce qu’on a aimé, le poursuivre de sa vindicte. Lisez Racine, vous saisirez.

     

    Affaire Maudet, affaire Fischer. Dans le second cas, on a vu les partisans du premier se réjouir comme des petits fous des malheurs de l’ex-ministre Verte. Leur joie vengeresse, disons-le, avait quelque chose de pathétique, comme si les ennuis de Mme Fischer avaient pour vertu d’atténuer la première affaire. A ce niveau d’adhésion sectaire à un homme providentiel, la valeur grognarde d’une garde prétorienne, style dernier carré à Waterloo, noble chose en soi, cède hélas la place à l’aveuglement vindicatif. On espère autre chose de l’action politique : admirer un homme c’est bien, lui être fidèle, mais nourrir sa vie de ruminations revanchardes précipite dans l’impasse. Quant au groupe parlementaire qui soutient ce magistrat, on attend de lui, comme de tout élu législatif, indépendance, contrôle implacable de l’exécutif, y compris de son propre magistrat.

     

    Affaire Maudet, affaire Fischer, tant d’autres encore. La leçon de tout ça, c’est la noirceur immanente du pouvoir. De tout pouvoir, d’où qu’il vienne ! Politique, certes, mais aussi économique, social, patriarcal, et jusqu’à la tyrannie entre deux amants. Dès qu’une personne, homme ou femme, gauche ou droite, gentil ou méchant, occupe une position de pouvoir, elle aura naturellement tendance à un abuser. J’ai vu six fois Léo Ferré sur scène, entre 1978 et 1990 : les six fois, à la fin du spectacle, il nous disait : « N’oublie pas que le pouvoir, tout pouvoir d’où qu’il vienne, c’est de la merde ». Excellente semaine.

     

    Pascal Décaillet

  • J'ai aimé la France. Mais là, c'est fini.

     
    Sur le vif - Mardi 11.06.24 - 14.55h
     
     
    En aucun cas, Macron n'a à "lancer la campagne des législatives". Aucun Président de la Cinquième n'a jamais "lancé une campagne de législatives" ! Ca n'est tout simplement pas son rôle.
     
    Les élections législatives ne regardent pas le Président de la République. Elle sont l'affaire des 577 circonscriptions de la République française. Elles envoient au Palais-Bourbon 577 représentants légitimes du peuple français. Ils constituent, en lien avec le Sénat, le pouvoir législatif. Séparé de l'exécutif. Séparé du judiciaire.
     
    Tout cette procédure, venue de la France d'en-bas, n'a strictement rien à voir avec le Président de la République. Il procède, pour sa part, d'un autre élection, que personne ne lui conteste : il a été réélu pour cinq ans, en 2022, personne ne lui demande de démissionner.
     
    Seulement voilà. Dans le camp de Macron, il n'y a plus personne. Nulle tête n'émerge, pour peu qu'aucune n'eût jamais eu l'audace de songer à poindre. Le monarque est seul. Il n'a plus de parti, n'en a d'ailleurs jamais eu d'autre qu'une meute de courtisans, attirés par les appâts du pouvoir.
     
    Le roi est seul. Il veut être partout, tel Richard III dans ses dernières heures. Partout, il s'annonce. Partout, il se montre. Pour sa convenance, il dissout une Assemblée n'ayant rien à voir avec les européennes. Pour sa convenance, il s'invite dans la soirée électorale de dimanche. Pour sa convenance, il annonce une conférence de presse pour aujourd'hui. Pour sa convenance, il la reporte à demain. Et les chaînes françaises, plus serviles encore qu'au temps de M. Peyrefitte, plus serviles que jamais, sont aux ordres. Et il demeure encore des Français pour tolérer tout ce cirque du chef de l'exécutif, toutes ces intrusions, toutes ces entraves.
     
    Je suis fier d'être citoyen suisse. Citoyen actif d'une démocratie vivante, polymorphe, décentralisée. J'ai aimé la France. J'ai aimé de Gaulle, Mitterrand. Mais là, c'est fini. Je ne supporte plus ce spectacle du déclin et du renoncement.
     
     
    Pascal Décaillet