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  • Les caprices de Manuel – Comptine d’automne

     

    Sur le vif - Lundi 08.11.10 - 17.21h

     

    Bien qu’il y existe, selon Claudel, des maisons pour cela, Manuel Tornare se veut un homme de tolérance. Bon prince, ouvert, humeur enjouée, gai comme un pinson. Le premier, parlant de tout et de rien, de ses chers camarades comme de ses quatre collègues, il se révèle grinçant, tonitruant, sulfureux, moqueur, vinaigré dans le choix de la pique et de la dague. Et c’est très bien ainsi.

     

    Très bien, sauf s’il se trouve, à son tour, en situation d’être attaqué. Alors, aussi vite qu’il en faut à la palombe pour se transformer en milan, les griffes de l’homme se mettent à jaillir. Et il saisit son téléphone, Manuel, et il trame, et il ourdit, et il jacasse de venimeux propos. Et là, d’un coup, finie la tolérance. Envolée. Adieu Gide, Claudel, adieu salons mondains, place à l’ire vengeresse. Princière. Acidulée.

     

    Et il croit qu’avec la presse, il peut faire valser têtes et bustes ainsi qu’en son empire municipal, ici un courtisan, là un laquais, partout le grand miroir de la servilité. Et si, par mégarde, il n’a pas eu accès à tous les libelles que d’odieux plumitifs ont cru bon de rédiger à son endroit, alors il a droit à de hautes âmes, directement de la Tour Baudet, pour les lui signaler. Entre malmenés, on s’entraide.

     

    Le problème, c’est que la presse est libre. Et ne le demeurera que tant qu’elle se battra. Pour sa dimension critique. Contre l’esprit de cour. Contre le sirupeux empire des cocktails. Elle ne s’use, cette liberté-là, que lorsqu’on ne s’en sert pas. Que cela plaise au prince. Ou que cela lui déplaise.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

  • La Soupe à l’hallali

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Lundi 08.11.10



    Jamais ils n’avaient été aussi heureux. Aux lèvres, l’écume. Devant toute la Suisse romande, descendre Stauffer. Comme on terrasse l’immonde. Comme l’extase devant ce premier chamois qui s’en vient gésir vous vos pieds de jeune chasseur. A la Soupe, hier, le climat était à l’exécution. L’hallali.

    Etriller Stauffer, c’est bien. A condition qu’on équarrisse aussi tous les autres, à la même enseigne. Ce que fait, par exemple, un Thierry Meury, également vachard avec tous. Mais pour certains autres, la mise à mort est sélective et orientée. Le bourgeois qui a le vrai pouvoir, celui du pognon et des prébendes, on l’épargne. Le gueulard genevois, on l’éviscère. On se croit contre-pouvoir, on est juste marchepied.

    Et hop, quelques références aux années brunes, et on se prend déjà pour Brecht ou Thomas Mann. Comme Manuel Tornare, incroyablement décevant, jeudi matin, à Radio Cité, dans un débat face au député Bertschy sur les thèses de l’UDC en matière scolaire. Dès qu’on est à court d’arguments, on brandit Hitler et les années 30. Tellement facile !

    Il fut un temps où les humoristes transgressaient. Aujourd’hui, ils engraissent. Ils bouffent, collier au cou, la potée du pouvoir en place, avec lequel ils n’ont plus ni procès, ni engueulades. Ils ne sont plus ni sonores, ni trébuchants. Ils sont en place. Impavides. Comme le bourgeois.

    Pascal Décaillet