Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

- Page 12

  • Sur les murs, l’Enfer

     

    « Post Tenebras Egalité ». C’est le slogan – puissamment pensé – de la Ville de Genève. A découvrir, dans les jours qui viennent, sur 200 affiches.

     

    Il y a des gens qui sont payés, à la Ville, pour trouver ça ? Et tiens, puisqu’on parle monnaie, ça va chercher dans les combien, cette honorable plaisanterie, pour les contribuables ?

     

    Jean-Pierre Jobin, le Méphisto du slogan qui gifle et qui percute, est-il dans le coup ? Rouget de l’Isle, les Soldats de l’An II ont-ils été consultés ?

     

    On a comparé avec le triptyque du Maréchal ? On a offert une francisque au lauréat du concours d’idées ?

     

    On a pensé aux âmes sensibles ? Elles s’imaginaient qu’après les ténèbres, faute de lumière, il pût au moins y avoir le néant. Une forme de repos éternel, limbé, dans la ouate de l’éternité.

     

    L’Enfer, ce sont trois mots qui ne se supportent pas.

     

    L’Enfer, ce sont les mots des autres, lorsqu’ils veulent imposer un langage, le mouler sur une idéologie.

     

    Au-delà des derniers fleuves, plus loin que l’Enfer, il y a le militantisme féministe drapé dans l’officialité.

     

    Amitiés épicènes.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Âmes soeurs

    androgyne.jpg

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Jeudi 10.06.10

     

    Je me suis retrouvé hier matin, sur le coup de 07.30h, face à un fou transgénique qui m’a lancé : « Je suis une maîtresse enfantine ». Je me suis d’abord dit qu’il se gaussait, me cherchait, j’ai guetté un pré où l’affaire aurait pu se régler. Je l’ai contemplé : c’était bien un homme, pourtant, nous n’étions ni chez Michou ni à Hambourg, quartier du port. J’ai pris peur.

     

    Et l’homme a confirmé : « Je suis maîtresse enfantine ». J’ai rougi, j’ai pâli, j’ai frémi à ses yeux, genres, grammaires, kabbales se sont mélangés dans mon esprit embué, d’étranges pensées salerniennes m’ont envahi, maires, mairesses, j’ai cherché le masculin de l’amertume, j’ai pensé aux points cardinaux, aux boussoles du côté du Pôle Nord.

     

    Il faut dire que j’avais là, face à moi, le meilleur des hommes. Il y avait, à côté de lui, toute l’animalité taurine d’Olivier Baud, comme une mise à terre, pour me rassurer. Je me suis dit que, si cet homme-là était une maîtresse, que serais-je, moi-même ? Une ombre ? Une lueur ? Une inconnue dans l’équation ? Une disparition ?

     

    J’ai pensé aux genres et à leurs mélanges, aux confluences, aux eaux du Rhône et celles de l’Arve, aux semi-créatures de Platon, dans le Banquet. J’ai pensé, aussi, à la géométrie. La définition de la droite. Le plus court chemin d’un point vers l’autre ? Et si c’était, simplement, la course d’une âme, quelque part, vers sa sœur ?

     

    Pascal Décaillet

     

  • Neuf membres : un faux problème

     

    Commentaire publié dans le Giornale del Popolo - Jeudi 10.06.10

     

    Un Conseil fédéral à neuf membres : le Conseil des Etats, aujourd’hui, va se pencher sur la question, via une motion du Vert vaudois Luc Recordon. Si le thème n’a rien de tabou (il est bel et bien urgent de réformer le gouvernement), la proposition, hélas, apparaît comme un peu courte : c’est d’une refonte beaucoup plus drastique que l’exécutif suisse a besoin.

     

    Sur un point, les Verts ont raison : certains Départements actuels, celui de Moritz Leuenberger (ministre en exercice depuis le Neandertal) et celui de Didier Burkhalter sont de taille disportionnée. Alors que celui d’Ueli Maurer doit sans doute laisser pas mal de temps libre à son titulaire pour des lectures (bandes dessinées ?), des parties de golf, ou simplement siroter un drink (bio, of course).

     

    Le nombre de sept, si biblique soit-il, n’a rien, non plus, de tabou. On peut l’élever à neuf, l’abaisser à cinq, cela n’a, en soi, aucune importance. Ce qui compte, c’est dans quel contexte de réforme beaucoup plus globale ce changement de nombre interviendrait. Si la Suisse se dotait d’un vrai gouvernement, en dégageant du temps pour les ministres, en laissant des secrétaires d’Etat assister aux commissions parlementaires, le nombre de cinq ferait parfaitement l’affaire.

     

    Et puis, ne soyons pas naïfs ! De qui émane ce projet de réforme ? D’un Vert ! Cosigné par un autre conseiller aux Etats Vert, le Genevois Robert Cramer. Donc, d’un parti qui aurait, immédiatement, tout à gagner à un collège plus large : il pourrait, sans tarder, y placer l’un des siens. Par exemple qui ? Par exemple, Luc Recordon ou Robert Cramer ! Ah, les braves gens, ah que le monde est bien fait lorsqu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même !

     

    Passer à neuf membres, why not ? Mais il n’y aurait là qu’un emplâtre sur une jambe de bois. Les vraies questions sont ailleurs : rompre avec ce système de passants, où on ne fait que boucher les trous, parce que certains, en pleine législature, alors qu’ils ne sont ni malades ni touchés par un scandale, décident de déposer les plaques. En finir, aussi, avec ces candidats à l’éternité, ces Moritz Leuenberger qui n’en peuvent plus de s’accrocher. Elire des gens en fonction d’un programme, pourquoi pas des listes. Ensuite seulement, il serait temps de voir s’il faut trois, cinq, sept, neuf ou onze ministres.

     

    Le projet Recordon est donc de pure convenance pour le bien des Verts. Il ne repose sur aucune réflexion globale, ne propose aucune anticipation imaginative de réforme, ne tire pas les leçons terribles du dernier rapport des commissions de gestion sur la gouvernance en temps de crise (affaire UBS). Il ressemble à une refonte administrative de l’équipage du Titanic, alors que personne ne songerait à pointer son nez dans le hublot. Histoire d’entrevoir cette sublime masse bleutée, qui s’appelle l’iceberg.

     

    Pascal Décaillet