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  • Véronique Pürro: un chemin, un style


    Tout le monde le sait : je ne partage pas exactement la vision du monde de Véronique Pürro. Mais voilà, il se trouve que sa campagne m’a touché. Maladroite certes parfois, peu tactique, presque perdue d’avance, mais riche de sourires, d’humanité, de rencontres. Une vraie chaleur. Au milieu des gens.

    Fichue d’avance ? Oui et non. Parce que le destin est une fleur fragile, à l’immédiate merci de l’extase ou du piétinement, c’est selon. Alors oui, disons que ce chemin-là avait le goût salé des illusions perdues, quelques zestes d’Apocalypse sur fond de socialisme qui, un peu partout en Europe, s’effondre.

    Mais ce chemin, elle l’a fait quand même. Contre l’Histoire. Contre le temps. Et ce satané manège, ces chaises musicales, huit danseurs, sept sièges. C’est ainsi, c’est la vie. C’était le jeu.

    Dans la défaite, hier soir, Véronique Pürro a montré de la dignité. Du style. Alors, ce petit billet, je le dédie à la suite de sa carrière politique. Car il y aura une suite, c’est sûr.

     

    Pascal Décaillet

     

  • L’ordre règne à Genève

     

    Ou: la Cléricature de la Barbichette - Lundi 16.11.09 - 10.25h


    Cinq sortants réélus, avec ou sans bilan, juste deux nouvelles magistrates, juste la majorité qui change. Les cinq partis qui se partagent le pouvoir exécutif, donc les postes et les pré-carrés, continueront de régner ensemble. Bref, la pérennité du pouvoir en place. L’ordre règne à Genève.

    « Juste la majorité qui change » ? Eh oui ! Aussi surréaliste que cela puisse, de l’extérieur, paraître, ce basculement n’est ni historique, ni capital. Le gouvernement sortant n’était à gauche que sur le papier, il penchait souvent au centre, voire (en matière fiscale) carrément à droite. Comme le note Pierre Weiss, la reconquête de la majorité par l’Entente relève davantage du déplacement de curseur que d’une véritable alternance. Là n’est pas l’événement, là n’est pas la leçon.

    La leçon, la vraie, pourrait bien, dans la législature qui s’annonce, surgir et rugir davantage de la marge que du texte officiel, de l’hémorragie des extrêmes que de la sainte coagulation autour du Centre, et parfois sans doute aussi de la rue que des palais officiels. A voir. Tout dépend de la tonalité du futur gouvernement : continuera-t-on à jouer la pénible partition de l’entre-soi, avec cette sanctification des amitiés transversales, où la barbichette (celle par laquelle on s’agrippe) règne en souveraine ?

    Surtout, ce petit monde reconduit, sans doute ce matin au septième ciel de sa divine surprise, continuera-t-il de contempler la marge en haussant les épaules ? Le PDC ou les radicaux, 11 députés chacun, continueront-ils, sous prétexte que le jeu des alliances leur a permis d’avoir un conseiller d’Etat, de parler du MCG (17 députés), ou de la galaxie MCG-UDC (26 députés), comme d’un marais poitevin, tout juste bon pour les gueux, les ignares ? Tous ces pauvres timorés de la frontière, que la grâce bilatérale, dans l’essence de son injustice, aurait omis d’illuminer ? Idem pour la gauche de la gauche, riche de tant de personnalités, hélas pour elle nœud de vipères, où la guerre, comme dans la tragédie, est intestine, familiale, incestueuse, avant même que d’être.

    Bref, l’émergence d’un Tiers-Etat. Qui viendra se heurter, non à la noblesse, ni même à la bourgeoisie, mais bien à la cléricature de la barbichette : ceux qui, trop heureux d’avoir sauvé leur peau, demeureraient sourds à toute résonance du pavé. Je n’ai pas dit le caniveau. Non : juste le pavé.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • La Bugatti et le Pélican

     

    L'autre jour, en sa Bugatti, quelque part au Texas, roulait un joyeux Yankee. Belle pièce, rarissime, machine à deux millions de dollars. 16 cylindres, mille et un chevaux. On the road again.

     

    Soudain, patatrac : la Bugatti Veyron dévie, chancelle, s’entortille, finit dans 60 centimètres d’eau boueuse, juste le long de la lagune. Et le gros Américain, de l’eau plus haut que les genoux, reste là, tout coi, à la contempler. Devisant sans doute, par dedans son for, sur l’insignifiance des choses.

     

    Cette glissaaade, digne de Brel, pourquoi ? Le chauffeur s’en explique : « J’ai juste été distrait par le vol d’un pélican ».

     

    A la bonne heure. J’étais sur le point de juger ce bas monde comme définitivement pourri. Ici, les copains. Là, les coquins. Partout, l’argent, l’insolence. Et pourtant, quelque part au-dessus d’une lagune texane, la grâce ailée. Pour l’homme aux mille chevaux, une petite seconde d’envol. Qui certes se paye cher. Mais l’aura délivré, juste un instant, de l’insoutenable boulet de la vie qui va trop droit.

     

    Pascal Décaillet