Sur le vif - Mercredi 20.05.15 - 16.02h
Il y a deux ou trois choses qui ne vont pas dans l’affaire du Musée d’Art et d’Histoire.
Point 1, la nature mixte du montage financier entre fonds privés et fonds publics.
Point 2, les conditions difficilement acceptables imposées par le mécène, et c’est pour cela qu’un amendement de dernière minute a été introduit par le Conseil administratif.
Point 3, la précipitation, justement, avec laquelle cet amendement a été sorti d’un chapeau, la veille de l’ouverture des débats: on avait plusieurs années, en amont, pour tenter de renégocier, pourquoi ne l’a-t-on pas fait à l’époque ? Pourquoi a-t-on attendu le lendemain des élections pour, enfin, oser défier Monsieur le Mécène ? Il ne fallait surtout pas toucher au pacte, bien fragile, élaboré entre les diverses composantes de la gauche pour feindre l'Union sacrée, en période électorale ?
Point 4, l’arrogance du mécène. Il est très généreux, certes, le Monsieur, mais l'opulence de ses fonds ne le place pas au-dessus du débat républicain. Et la manière, particulièrement irritante, dont il s’exprime ce matin, dans les colonnes de la Tribune de Genève, montre bien que les choses ne seront pas possibles entre les exigences, la culture de langage, d’un grand collectionneur privé (aussi respectable soit-il) et la démarche, nécessairement plus complexe parce que précisément démocratique, des élus du peuple. Ce sont deux mondes, deux univers.
Quel Musée voulons-nous ? Pour ma part, citoyen de la Ville, contribuable en Ville, je veux évidemment le plus beau bâtiment possible, mais je veux qu’il soit celui voulu par la majorité des citoyens. Je veux qu’il leur « appartienne », en quelque sorte. A cet égard, mais je l’ai déjà dit et écrit, le mélange des genres entre argent public et argent privé ne m’apparaît pas opportun. Cela, quelles que soient les qualités du mécène, elles ne sont pas en cause ici. Il est tout de même étonnant que même chez des magistrats de gauche, la confiance accordée à de providentielles forces de l'Argent ait pu s'avérer aussi inconditionnelle... jusqu'à la veillée d'armes des débats du Municipal.
Donc, quoi que vote le Municipal, il conviendra de considérer cette décision comme intermédiaire. En attendant celle, ultime, des citoyens de la Ville de Genève. Le référendum n’étant (hélas) pas obligatoire sur cet objet, nous saluerons pour notre part les différents milieux qui jugeront opportun de saisir le référendum facultatif. Que le peuple tranche. Les conventions avec tel ou tel mécène doivent être, in fine, la convention du peuple, et non la résultante des arrangements plus ou moins intempestifs de quelques-uns.
Pascal Décaillet