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Illisibles, les Verts ne font plus recette

 

Sur le vif - Dimanche 12.04.15 - 18.34h

 

Tous les quatre ans, ce qui se passe en avril à Zurich est sondé comme préfiguration de ce qui pourrait se produire six mois plus tard, aux élections fédérales. Ainsi, la déroute des Verts. Dans ce canton, le plus peuplé de Suisse, ce parti vient de perdre, cet après-midi, son conseiller d’Etat, Martin Graf, et, dans la foulée, six députés au Grand Conseil. A Genève aussi, en novembre 2013, les Verts perdaient un membre du gouvernement et sept membres du Parlement cantonal. Que feront-ils, dans une semaine, dans les Conseils municipaux de nos 45 communes ? Nous le verrons dimanche prochain, à Uni Mail.

 

Je ne cesse, ici même, depuis des années, de thématiser l’illisibilité croissante des Verts. Je le faisais déjà du temps de leur splendeur, lorsqu’ils étaient au firmament de la mode, prétendaient éclipser leurs cousins de gauche, dépasser la lutte des classes, et jusqu’au concept même d’Histoire, qui devrait céder la place à une postmodernité dégagée du poids du tragique, de celui des frontières et des appartenances. Cette invitation à un aggiornamento fut souvent prise de très haut, par des gens qui avaient le vent en poupe, et se figuraient leur posture du succès comme éternelle.

 

La vérité, c’est que les Verts, ce parti très jeune, très récent dans notre paysage politique (quelque 35 ans), semblent aujourd’hui dans l’incapacité psychologique et intellectuelle du minimum d’autocritique nécessaire pour relancer le mouvement. « L’effet Fukushima est derrière nous », vient de reconnaître à la RSR la co-présidente du parti, Adèle Thorens, et cet aveu est ma foi énorme : par ces mots, la Vaudoise reconnaît qu’une importante tragédie japonaise (dont personne ne nie la gravité) avait, il y a quelques années, été bien utile à son parti pour le propulser dans des compétitions électorales en Suisse.

 

Seulement voilà, la mode, c’est ce qui se démode, et lorsqu’il faut compter sur une catastrophe au pays du Soleil Levant pour nourrir le débat politique en Suisse, l’argument ne peut tenir très longtemps. Idem, l’obsession climatique du prédécesseur de Mme Thorens, le conseiller national genevois Ueli Leuenberger : dans cet exemple aussi, il fallait toujours « planétiser » les enjeux,  et cela précisément au moment où les frontières, les sentiments d’appartenance et de proximité reviennent.

 

Aujourd’hui, au niveau fédéral comme dans bien des cantons, les Verts sont devenus illisibles. Ils ne manquent pourtant pas d’atouts : un personnel politique de qualité, avec un très bon niveau de formation, des ministres exécutifs efficaces et pragmatiques, dans les cantons comme dans les municipalités, bref des gens très agréables à fréquenter : le problème, ce ne sont pas « les Verts », en aucun cas les personnes, mais bien le flou croissant dans l’idéologie.

 

Aucune section Verte dans une grande ville, aucun parti Vert cantonal, pas plus que le parti national, ne pourra faire l’économie d’une autocritique, ou s’ils préfèrent un aggiornamento, dans ce domaine-là. Refuser de le faire, mais en profondeur croyez-moi, ce qui n’ira ni sans douleur, ni sans déchirements, c’est conduire cette formation politique vers d’autres défaites, d’autre pertes d’influence, d’autres rétrécissements dans notre vie citoyenne. A eux de choisir, entre la politique de l’autruche et le chemin de l’introspection. Les élections fédérales, c’est dans six mois et six jours.

 

 

Pascal Décaillet

 

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