Sur le vif - Mardi 22.05.12 - 11.02h
Le dernier communiqué de la direction de l'UDC genevoise fleure, hélas, les senteurs des pires années. Et dénote, de la part de ses auteurs, une inculture historique condamnable quand on s'exprime dans l'espace public. J'ai toujours considéré qu'il ne fallait pas diaboliser les électeurs de l'UDC, ni ceux du MCG, ni ceux, dans l'autre sens, de la gauche de la gauche. Toutes les personnes qui accomplissent la démarche, en âme et en conscience, d'aller glisser un bulletin dans une urne, je les respecte, parce que la démocratie, c'est précisément cela. Cette position demeure mienne : on discute, on s'engueule, on argumente, mais on ne diabolise pas.
Mais là, c'est trop. Un communiqué, tombé ce matin 09.04h, pour demander la dissolution de l'association « Mesemrom ». Sous le prétexte qu'il existe une loi 10106 punissant d'une amende l'acte de mendicité. Soit, elle existe, j'en prends acte, et bien que je ne l'eusse pas voté, je respecte la démocratie. Mais enfin, mettre dans le même bain l'acte délictueux de mendicité et une association humanitaire défendant un peuple revenu du pire, là je dis non.
Bien sûr, beaucoup de Roms, à Genève, pratiquent la mendicité. Bien sûr, ils sont instrumentalisés par des réseaux qu'il s'agit de combattre. Mais ce qui est doit être condamné, en République, c'est l'illégalité d'un acte. En aucun cas, l'amalgame avec une population, une ethnie, ne peut être accepté. Alors soit, amendons la mendicité, si vraiment on n'a rien de plus urgent à combattre. Mais jamais, n'acceptons de jeter l'anathème sur un peuple, en tant que tel. Le faire, c'est le début de la fin.
Je respecte les leaders de l'UDC genevoise, comme d'ailleurs tous les leaders des partis composant notre espace démocratique. Mais, s'ils ont un peu de temps à la Pentecôte, je leur conseille de se renseigner un peu sur l'Histoire, la culture, la langue, les souffrances du peuple Rom. A tout hasard, je leur recommande la période sise entre 1941 et 1945. Et si, dans la foulée, ils veulent bien prolonger un peu leurs lectures, je les invite, très fraternellement, à lire mon poète préféré du vingtième siècle : un Allemand d'origine roumaine, Paul Celan (1920-1970). Il n'était certes pas Rom, mais Allemand de Roumanie, juif. Il a vécu l'extermination, n'en est, au fond, jamais revenu. Un jour d'avril 1970, il a choisi, pour se jeter dans la Seine, le Pont Mirabeau. Délicate attention, non ?
Pascal Décaillet