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Liberté - Page 858

  • Investigation, ou délation ?

     

    Sur le vif - Dimanche 19.02.17 - 18.46h

     

    Si j'étais Français, François Fillon ne serait pas mon candidat. A cause de ses positions économiques et sociales, beaucoup trop libérales pour moi, ce que je notais déjà, ici même, lors de sa victoire à la primaire, le 30 novembre 2016, dans un commentaire intitulé "Ça n'était qu'une primaire de la droite". Alors que tout le monde le voyait déjà à l’Élysée. Le libéralisme, carrément ultra en l'espèce, est ce qui me sépare de Fillon. Pour le reste, je l'apprécie beaucoup. Notamment lorsqu'il assassine jouissivement le "prédicat", ce jargon de ridicule préciosité des pédagos.

     

    Mais soyons clairs : si je partageais les thèses de François Fillon au point de le vouloir comme Président, je l'encouragerais à aller jusqu'au bout, malgré la meute. Et ne le jugerais en aucune manière en fonction des "affaires" sorties par Mediapart. On sait trop - je sais trop - dans ces cas-là, tout ce que ces casseroles jaillissant comme par hasard en pleine campagne peuvent avoir de programmé, d'instrumentalisé. A cet égard, on commence un peu trop, chez le moraliste-en-chef Edwy Plenel, à confondre "journalisme d'investigation" avec pure et simple délation.

     

    Je vais plus loin : la parfaite rectitude morale d'un candidat ne m'intéresse pas trop. Seule compte, pour moi, son aptitude à gérer le pays. Dans la tempête, on envoie au gouvernail le meilleur pilote, on ne lui demande pas son certificat de bonnes vies et moeurs. Ni même un document attestant qu'il ne s'est jamais contredit.

     

    Cette position, qui est mienne depuis toujours, me vaut de régulières engueulades avec mes amis américains, beaucoup plus rigoristes. Je ne le suis pas. La morale ne m'intéresse guère en politique. La capacité, la compétence, si, en absolues priorités.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Corps et vie, dans un destin commun

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    Sur le vif - Dimanche 19.02.17 - 15.38h

     

    Il est temps qu’émerge, en Suisse romande, le courant à la fois conservateur et social dans lequel un nombre non-négligeable de nos compatriotes pourraient, je crois, être appelés à se reconnaître. Chacun dans sa sensibilité, ses nuances, ses différences. Le temps des antiques bannières est passé, où l’on entrait en parti comme en religion, dans un esprit de paroisse et de famille, appliquant sans sourciller les mots d’ordre de l’appareil, demeurant jusqu’à son dernier souffle dans la chapelle. Nous sommes des hommes et des femmes libres, des citoyens, nous votons pour qui nous voulons, nous répondons souverainement « oui » ou « non » aux objets de votations, sans avoir à nous en justifier, sauf si nous le souhaitons.

     

    Je dois m’expliquer sur le mot « conservateur ». Il ne s’agit pas, dans mon esprit, de se figurer le monde à travers le tableau « L’Angélus », de Jean-François Millet, au demeurant sublime, ni de vouloir la résurrection d’un Âge d’Or n’ayant au fond jamais existé. Alors que Millet peignait ce superbe et vertical moment d’immobilité paysanne, en plein Second Empire, entre 1857 et 1859, les premiers ravages de la Révolution industrielle faisaient mourir à trente ou quarante ans les travailleurs des mines, dans lesquelles œuvraient des enfants.

     

    Non. Être conservateur, ça n’est pas rêver le retour du passé. Ce qu’il faut « conserver », c’est le corps social. La cohésion, au sein du pays. Celle pour laquelle nos ancêtres se sont tant battus, nous léguant dès la fin du 19ème siècle les premières Caisses mutuelles (sur le modèle social bismarckien, totalement en avance sur le reste de l’Europe), puis en 1948 l’AVS, puis les différents modèles d’assurances accident, ou maladie, mais aussi la protection des travailleurs, sur les chantiers ou dans les usines, l’aide à la paysannerie, la démocratisation des études, etc.

     

    C’est cette Suisse en mouvement dans laquelle je crois, née de 1848, mais tout autant de la réconciliation de 1891, la proportionnelle de 1919, la Paix du Travail de 1937, le vote des femmes de 1971, bref ce qui a fait bouger le pays. Ce que je veux « conserver » n’est donc certainement pas l’immobilité, même celle, merveilleusement figée, des deux paysans de Millet, mais au contraire la saine et fructueuse dialectique du mouvement. C’est là qu’intervient la démocratie, surtout directe, celle qui permet au plus grand nombre de débattre, s’engueuler dans de saintes et magnifiques colères, et finalement, un beau dimanche, trancher. Ce que je veux « conserver », c’est la puissance créatrice de ce mouvement : on est quand même, me semble-t-il, avec cette définition, assez loin de celui qui contemple nos belles montagnes, en attendant que quelque chose se passe.

     

    Je dis « conservateur », mais je dis aussi « social ». Mes racines idéologiques personnelles ne sont pas celles de la gauche marxiste, ni des démonstrations glacées du matérialisme dialectique. Elles viennent d’ailleurs, notamment de la Doctrine sociale de 1891, à laquelle je fais souvent référence. Parce qu’au fond, je crois qu’entre humains, c’est l’essentiel qu’il faut préserver : la vie sur terre, le partage, la communication, la culture, la reconnaissance commune d’un passé, de traditions, avec ce qu’il implique d’incessant travail de mémoire. C’est là qu’intervient l’Histoire, qui sans cesse remet en question nos certitudes, corrige et équilibre les témoignages, réinvente la vie. Le passé n’est pas derrière nous, comme une matière inerte. Non, il est devant nous, il nous attend, il exige de nous le travail d’introspection, de lecture des archives, pour tenter de lui restituer corps et vie.

     

    Ce qui m’intéresse, c’est qu’ensemble, malgré nos désaccords, nous soyons corps et vie, justement. Engueulons-nous, c’est vital, la démocratie n’a jamais été la torpeur. Assumons nos opinions, nos positions. Fuyons la fausse neutralité des eunuques. Existons, que diable, tant que le souffle de vie nous est prêté.

     

    J’écris sur le conservatisme social, parce qu’il existe, de M. Fillon à certains Américains, de tel potentat zurichois à tel éditorialiste, un autre courant, qu’on peut qualifier de conservatisme libéral. Ce dernier n’est absolument pas le mien. Pour la bonne et simple raison que, s’il existe au fond de mon tempérament un solide tempérament conservateur, peut-être d’essence littéraire autant que politique, il n’existe en revanche rien de libéral. Enfin rien, dans le sens « ultra » de ce mot, celui qui nie l’Etat, se désintéresse du corps social, méprise la frontière au nom du Capital mondialisé.

     

    Voilà. J’ai tenté ici de donner quelques précisions. Je ne pense pas, en Suisse romande, parmi deux millions d’âmes, être le seul à percevoir les choses ainsi. Peut-être, entre ceux qui, peu ou prou, partageraient cette vision, ne serait-il pas inutile de se mettre à échanger, dialoguer. Non pas se fédérer sous une même bannière, je n’ai pas l’âme partisane, mais créer un lieu où nos énergies puissent parfois vibrer ensemble.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La "Conférence de Munich", ça vous dit quelque chose ?

     

    Sur le vif - Samedi 18.02.17 - 18.14h

     

    En matière de stratégie, il ne faut pas trop écouter ce que racontent les gens, mais considérer les faits. Qui maîtrise le terrain ? Avec quel armement ? Pour appliquer quelle stratégie ? Le reste, ce sont des bavardages.

     

    Dans cet esprit, ce qui se passe à la "Conférence de Munich" (le nom ne s'invente pas !) se révèle une Journée des Dupes dont le grand gagnant n'est ni "l'Union européenne" (entité inexistante sur le plan stratégique), ni les Etats-Unis, mais, une fois de plus, l'Allemagne.

     

    Que vient dire Mike Pence, vice-président américain, de la part de Donald Trump, au vieux continent ? Que les Etats-Unis "n'abandonneront pas" l'Europe, à condition que chaque membre de l'OTAN veuille bien s'acquitter des fameux 2% du PIB destinés à la défense nationale.

     

    La première qui a dit oui, histoire de se montrer bonne élève, est Mme Merkel. Elle recueille, pour cela, applaudissements et bénédiction générale.

     

    Le problème, c'est que les 2% du PIB allemand (monumental, en comparaison des autres membres) destinés à la Bundeswehr, ne s'intégreront dans les forces de l'OTAN que... si l'OTAN continue d'exister. Or, rien n'est moins sûr : le règne de M. Trump pourrait être celui d'un retrait progressif des forces américaines sur un continent européen où elles sont posé le pied le 6 juin 1944. Et, le 10 juillet 1943, sur sol sicilien.

     

    La vraie nouvelle de la "Conférence de Munich" d'aujourd'hui, c'est que l'Allemagne, dans l'indifférence générale, confirme au monde l'augmentation de son budget militaire. Juste avant Noël, elle votait l'acquisition de trois bâtiments de guerre qui, d'ici dix ou quinze ans, permettront à la Kriegsmarine de remplacer la Royal Navy dans la maîtrise des mers Baltique et du Nord.

     

    Juste avant Noël, toujours, l'Allemagne de Mme Merkel, toujours dans l'indifférence générale, modifiait le Grundgesetz (Loi fondamentale) de 1949, se permettant désormais la possibilité d'intervenir de façon offensive sur les théâtres d'opérations choisis par elle. Faut-il rappeler que, dans ce domaine, l'action offensive, la tradition militaire allemande bénéficie d'un "savoir-faire" (pour user d'un euphémisme) que nul ne peut lui envier, sur le continent européen ? Notamment sur les Marches de l'Est.

     

    Voilà. J'ai donné ici quelques faits, tous vérifiables. Je n'annonce rien, ne prévois rien, ne conclus rien. Je constate des faits. Au lieu de réagir aux discours.

     

    Pascal Décaillet