Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Liberté - Page 517

  • La structure, la vertu

     

    Sur le vif - Mardi 31.03.20 - 05.31h

     

    Démocratie directe, fédéralisme : ces deux fleurons de notre système suisse ne devraient-ils être arborés que par beau temps ?

    À la première tempête - tiens, en voilà une - on précipite le premier dans un congélateur. Et le second s'évapore. Au profit du Conseil fédéral ? Même pas ! En faveur d'un Office, le même que nous vitupérons à longueur d'année pour sa gestion calamiteuse des primes maladie.

    Un Office fédéral ! Où le fonctionnaire est roi. Et la routine, souveraine. On y révère soudain un Monsieur Koch, on lui confère les pouvoirs consulaires.

    Notre démocratie avait de la structure. Elle manquait juste de vertu. Non au sens victorien, mais latin.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Plus que jamais, la nation

     

    Sur le vif - Samedi 28.03.20 - 11.33h

     

    L'Union européenne, c'est fini. L'édifice multilatéral, c'est fini. Ne demeurent que les nations. L'Italie, endurante et courageuse. La France. La Suisse. Etc.

    Chacune d'entre elles, avec coeur et détermination, se bat. Chacune prend les décisions qui lui semblent justes. Chacune, en profondeur et sans la moindre ambiguïté, est perçue par son peuple comme l'unité de référence, la seule voie vers le salut.

    Mieux : chaque nation, tout en roulant pour elle-même, respecte et admire le combat de ses nations voisines. L'information circule. On sait que les autres souffrent, on sait à quel point c'est dur, on est en pensées avec eux. Nous ne sommes pas dans une guerre entre nations, mais dans un combat total, qui passe par l'unité singulière de chaque nation.

    Chaque nation, séparément, organise le combat, mérite le respect. Chacune, dans son périmètre délimité, reconnaissable, représente l'horizon d'attente des citoyennes et citoyens. Chacune est l'espace où s'exercent la solidarité, la mutualité, la communauté de mémoire, les projections pour l'avenir.

    Les bavardages mondialistes et multilatéraux, c'est fini. On veut du reel, du concret. On saigne pour ce pays qu'on aime, et dont on voit l'économie s'effondrer, alors qu'elle rayonnait, sur ordre venu d'en haut.

    Partout, on veut reconstruire des économies nationales, au service de l'humain, de son épanouissement. Ce grand dessein, c'est dans chaque nation séparément qu'il s'accomplira. Chacune, selon son génie propre.

    Plus que jamais, les peuples vont réclamer la souveraineté. Alimentaire, bien sûr, donc agricole. Sanitaire, n'en parlons pas. Industrielle, et il faudra se soucier un peu plus du marché interne ! Et puis, désolé si ça sonne démodé, mais aussi la sécurité, tout court. Cela passe par une défense nationale intransigeante, moderne, motivée, performante.

    Ce que le vent de l'Histoire est en train de balayer, c'est le rêve cosmopolite de la frontière abolie. Politiquement, le monde n'existe pas. Les grands ensembles multilatéraux, non plus. Ce qui existe, ce sont les nations, chacune avec son Histoire, ses douleurs, ses cicatrices, ses passages de lumière, ses mythes fondateurs, la mise en cause de ces mythes. Cela constitue une mémoire, un espace dialectique et onirique, un trésor commun.

    Cela constitue l'unité de référence au sein de laquelle se reconstruiront les peuples.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La Ligne Maginot n'est pas un thème

     

    Sur le vif - Vendredi 27.03.20 - 18.23h

     

    Pendant les huit mois de Drôle de Guerre (du 2 septembre 1939 au 10 mai 1940), en France, tout le monde ne parlait que de la Ligne Maginot. Les actualités françaises de l'époque passent leur temps à évoquer la vie quotidienne des soldats confinés dans cet immense réseau souterrain de forteresses, sur la frontière. Tout le monde est persuadé qu'en cas d'attaque allemande, elle se fera sur la Ligne Maginot, et que cette dernière, héritière de l'esprit de Vauban, tiendra.

    L'Histoire ne s'est pas exactement déroulée comme cela. Pendant huit mois, autour de la Ligne Maginot, rien ne s'est passé. Ou presque. Juste quelques escarmouches, entre patrouilles nocturnes françaises et allemandes. Le moral, au fil des semaines, s'est mis à baisser. Celui des confinés. Celui de l'arrière. La mobilisation, début septembre, s'était pourtant bien déroulée, digne de celle du 2 août 1914. Mais là, des mois à ne rien faire, à attendre, rien de pire pour la psychologie nationale.

    Et puis, un beau jour, à l'aube du 10 mai 1940, la Blitzkrieg. Le mouvement, enfin ! Petit détail : il ne se produit absolument pas sur la Ligne Maginot, mais dans les Ardennes. Les Français tenaient pour impossible une percée dans le défilé de Sedan : ils ont eu tort. La Wehrmacht déboule, avec l'effet de surprise, une stratégie, un plan d'attaque (désavoué par le Grand État-major allemand lui-même), des troupes de choc, un moral d'enfer, une volonté d'avancer, des divisions Panzers autonomes (et non intégrées à l'infanterie), des liaisons radio mobiles. Bref, ils ont mille ans d'avance.

    La suite, on la connaît : en six semaines, la France, qui avait résisté quatre ans et trois mois en 14-18, s'écroule. Défaite militaire, la plus grande de son Histoire. Défaite morale. Lisez Marc Bloch, "L’Étrange Défaite", l'un de mes livres de chevet, depuis 40 ans.

    L'Histoire, que retient-elle ? Réponse : le 10 mai 40, le mouvement ! Le passage de la Meuse par Rommel. La prodigieuse stratégie des Allemands.

    La Ligne Maginot ? L'Histoire ne la retient que pour en sourire. Regardez les actualités françaises, les Pathé, les Gaumont : leurs innombrables reportages sur la vie quotidienne des confinés dans les fortins apparaissent aujourd'hui comme dérisoires, périphériques, quand on sait ce qui s'est passé : six semaines de Blitzkrieg, quatre ans d'Occupation, un pays déchiré, des années pour se reconstruire une mémoire.

    La Ligne Maginot, en vérité, n'était pas un thème. Le thème, c'eût été d'avoir connaissance du Plan Manstein sur les Ardennes. De constituer des divisions autonomes de chars. D'introduire partout les liaisons radio mobiles. Et surtout, d'être habité par la même férocité combative que les Allemands.

    La Ligne Maginot n'était pas un thème. Le confinement est, au mieux, un état de fait. Il n'est pas un thème. L'Histoire se déroule ailleurs. Chez ceux qui veulent le mouvement.

     

    Pascal Décaillet