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Liberté - Page 519

  • Plus rien ne sera comme avant !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 25.03.20

     

    Travail à distance, en réseau, grâce aux prodigieux progrès de la technique, travail à domicile, ne plus venir faire ses heures dans un bureau, avec de petits chefs qui vous épient. Mais accomplir une mission précise, sur la base d’objectifs à atteindre. Tout cela, et tant d’autres choses encore, s’invite dans nos vies d’une façon fracassante, à l’occasion de la crise que nous traversons. Une chose est sûre : lorsque la tempête sera passée, notre rapport à tous avec le monde du travail se trouvera profondément modifié par les expériences que nous aurons vécues. Beaucoup d’employés, beaucoup d’entreprises auront appris que le travail peut parfaitement s’opérer, dans de nombreux secteurs (les services, notamment), en totale décentralisation de ceux qui l’accomplissent.

     

    Un modèle va prendre un terrible coup de vieux : celui qui consiste à se lever le matin, encombrer les transports publics ou privés, pour aller tirer ses huit heures dans un lieu appelé « bureau », puis grossir une seconde fois les routes le soir, pour rentrer à la maison. Cette double transhumance quotidienne, inutile et polluante, aura bientôt vécu. Qui s’en plaindra ? Qui, à part l’armada de petits chefs et sous-chefs, de cadres subalternes ou intermédiaires, de bavards de cafétérias, de discutailleurs dans les queues de machines à café ? Chaque entreprise doit savoir exactement pourquoi elle est là, ce qu’elle a à accomplir. Elle ne doit pas s’autonourrir de ses phénomènes internes. Ce qui compte, c’est l’objectif.

     

    Bien sûr, tout dépend des métiers. Je parle ici de ceux, assez nombreux, où une présence physique n’est pas nécessaire, en tout cas pas sur le laborieux continuum d’une journée. L’idée même, née de la Révolution industrielle, et des machines à pointer le matin et le soir dans les usines, de « compter ses heures », est, dans bien des cas, une absurdité, tout juste bonne à servir d’argument, en cas de litige, à des syndicats ou des études d’avocats. Le petit entrepreneur, l’indépendant (dont on parle tant, ces jours), ne « compte pas ses heures » : il accomplit une mission ! Si elle est satisfaisante, on lui renouvellera peut-être sa confiance. Dans le cas contraire, non. C’est plus risqué, mais autrement motivant que de venir traîner ses guêtres au milieu de ses collègues. Beaucoup de tâches peuvent être accomplies à distance, par des personnes seules, compétentes, responsables, fiables.

     

    La terrible crise sanitaire que nous traversons débouchera, si nous savons en tirer les leçons économiques, sur une révolution dans la manière de penser le travail. Puisse-t-elle aussi, certes dans la douleur, nous ouvrir des horizons vers une économie plus juste, plus proche, plus humaine. Au service, non du profit de casino, mais du bien-être des gens. Car enfin, à quoi sert le travail, si c’est pour asservir l’humain, alors qu’il peut l’affranchir, l’épanouir, le rapprocher de l’Autre ? En ces temps difficiles, je vous souhaite à tous une excellente semaine.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

  • Artistes genevois, je ne vous oublie pas !

     

    Sur le vif - Mardi 24.03.20 - 15.30h

     

    Une idée me trotte dans la tête, depuis le début de la crise sanitaire que nous traversons : continuer de faire vivre la culture, à Genève. Continuer à la rendre visible, même si toute offre en public est désormais impossible, pour les raisons que nous connaissons.

    Alors, voici : dès ce soir, à l'enseigne des Yeux dans les Yeux (ou parfois de GAC), je vais donner la parole, le plus possible, à nos artistes genevois. Même s'ils n'ont aucune prestation d'actualité à promouvoir, et pour cause ! Rendre visible, non un spectacle, un concert, etc., du moment, mais... l'artiste lui-même ! Cinq ou six minutes pour faire sa connaissance, évoquer son parcours, sa démarche artistique, ses passions.

    J'étendrai cette séquence à des amateurs d'art : je pense déjà à tel avocat cinglé de Wagner, tel passionné de Proust ou Céline, Paul Celan ou Heiner Müller. Les exemples fourmillent.

    Je veux sentir ce que les gens ont dans leur ventre.

    Je pense que ces petites séquences, entre deux débats politiques ou deux données d'informations sur le coronavirus, pourront aider les personnes confinées, ou les malades, ou leurs proches, à garder le moral.

    La culture doit vivre ! Les artistes ne doivent pas disparaître des écrans radar !

    Première séquence, ce soir, les Yeux dans les Yeux, direct 19h : Aimez-vous Mahler ? Invité : Olivier Gurtner. 

    PaD

  • La politique, plus que jamais !

     

    Sur le vif - Mardi 24.03.20 - 10.50h

     

    En aucun cas, l'urgence sanitaire ne doit abolir le débat politique. Au sens le plus fort de ce terme, les grands choix pour la Cité. Le sens, déjà, où l'entendait Aristote, il y a 25 siècles.

    Contre vents et marées, tout en respectant parfaitement les consignes de sécurité, je veux, là où je suis, dans les fonctions qui sont les miennes, continuer de faire vivre le débat politique. Celui sur les grands choix pour la gestion de crise. Et surtout celui sur les grands choix, économiques et sociaux, de l'après-crise.

    Des débats avec moins de monde qu'avant : respect des directives. Mais des débats, où puissent se déployer les forces vives de notre univers politique. Où puissent se concevoir, en totale liberté des âmes et des consciences, les projections pour l'avenir, les conceptions diverses de l'intérêt supérieur de l'Etat.

    Je ne suis pas virologue, ni médecin. Ni spécialiste humanitaire. Je suis, depuis l'enfance, un esprit profondément politique. J'ai toujours mis, dans mes préoccupations, les affaires publiques au plus haut niveau, je ne m'intéresse pas à la vie privée, ni aux modes. Pourquoi diable devrais-je renier la vocation de toute une vie, au moment où, plus que jamais, nous avons besoin de politique, au sens le plus noble de ce mot ?

    Le sens noble, c'est celui d'Aristote. Celui de Thucydide, lorsqu'il nous décrypte les vrais ressorts de la Guerre du Péloponnèse. Celui de Tocqueville. Celui de Jules Michelet, quand il nous raconte la Révolution française. Celui de Marc Bloch, avec son ouvrage prodigieux "L'Etrange Défaite", l'un de mes livres de chevet : les six semaines, entre le 10 mai et le 22 juin 1940, où la France s'effondre. Défaite morale, bien avant que d'être militaire, nous dit en substance l'auteur.

    Cette crise nous offre une occasion : celle de réinventer la politique, en la dégageant des meutes consanguines, pour la hisser vers ce qu'elle a de supérieur : le combat de tous, pour l'intérêt de tous.

     

    Pascal Décaillet