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Liberté - Page 419

  • L'amour, la haine

     

    Commentaire publié dans GHI - 03.02.21

     

     Pierre Maudet est un personnage clivant. Il suscite d’un côté l’adulation, et de l’autre le plus féroce des rejets. C’est le lot, dans la vie, de ceux qui osent, ceux qui entreprennent. Nous sommes en démocratie : chacun de nous a le droit d’éprouver face à ce magistrat les sentiments qu’il veut. Le droit, aussi, de les exprimer. Tant qu’il ne franchit pas les limites de toute parole publique : pas d’atteinte à l’honneur, pas de diffamation. C’est valable face à Pierre Maudet. Comme c’est valable face à tout humain, sur cette terre.

     La campagne du 7 mars est rude, les pro-Maudet et les antis se déchirent. Fort bien : la virulence fait partie de l’univers politique. Mais tout de même : d’un côté comme de l’autre, chez les aficionados comme chez les adversaires, on a l’impression d’être dans des chapelles. Des sectes. Une bande de Croisés, livrés à la dévotion de leur cause, se chauffant entre eux pour mieux fulminer. Avec une haine totale de l’adversaire. On s’imagine assez aisément dans les montagnes tenues par les Cathares, à l’époque où Rome les pourchassait.

     Entre ces lignes de front d’où fusent les feux croisés, comment réagiront les citoyens genevois ? Pour ma part, j’appelle à la raison. Que chacun vote selon son cœur, et nous verrons le résultat. Mais souvenons-nous d’une chose : le très grand parti d’où vient Pierre Maudet, le parti radical, est issu d’une philosophie appelée en allemand « Freisinn », ou libre arbitre. Et se revendique, derrière Kant, de la « Vernunft », la raison. Entre citoyens libres, laissons-la un peu exister.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Genève et le conformisme du semblable

     
    Sur le vif - Jeudi 04.02.21 - 10.17h
     
     
    Pour graviter dans les cercles du pouvoir, à Genève, il faut désormais accepter le corset d'une Trinité idéologique bien précise : être d'accord avec la dictature sanitaire, combattre le réchauffement climatique, épouser le féminisme, en reproduisant fidèlement son sabir. Hors de cette triple allégeance, point de salut.
     
    Pour avoir donné l'impression d'enfreindre, oh certes du bout des lèvres, l'une de ces trois injonctions, Fabienne Fischer a failli payer le prix fort.
     
    Au sein de l'actuel Sextuor, une magistrate de droite a même décidé d'en surajouter, érigeant les questions sociétâââles en absolue priorité de son discours, alors qu'elle a la charge écrasante de nos Finances, qui justement vont très mal. Elle creuse la dette, en en parlant le moins possible, et dans le même temps, elle nous déplie un immense paravent de belles paroles sur l'égalité, en prenant soin de n'oublier aucune minorité, surtout pas la plus infinitésimale.
     
    Il n'y a bientôt plus de liberté d'expression à Genève. Il faut accepter le moule. Se fondre dans la doxa. Il faut être coroniste, climatiste, féministe. Sinon, vous êtes hors du Cercle.
     
    Le Valais conservateur de la pire époque, seconde partie du 19ème siècle, quand les radicaux devaient s'exiler dans les communes de l'Est vaudois pour y tenir leur droit de réunion, était-il vraiment pire que cela ? Il y avait un dogme. Il y avait une obligation d'adhérer. Il y avait le poids étouffant d'un Clergé. Il y avait un conformisme du semblable. Genève, aujourd'hui, ne vaut guère mieux : la férule d'une triple idéologie dominante s'exerce. Et tout le monde fait allégeance. A commencer par nos magistrats - et magistrates - exécutifs. La liberté de pensée, la passion des idées, valent mieux que cette triste uniformité.
     
     
    Pascal Décaillet
     

  • Fabienne Fischer et l'orbite du convenable

     
    Sur le vif - Mercredi 03.02.21 - 14.50h
     
     
     
    Candidate des Verts au Conseil d'Etat genevois, Fabienne Fischer a frôlé l'hérésie, comme une comète en fusion qui aurait eu l'audace de venir chatouiller l'écorce terrestre. Elle a frôlé, elle a joué avec la mort politique, elle a nargué Newton et les lois les plus élémentaires de la gravitation. Elle a confessé sa faute de justesse, promis la repentance. Elle pourra demeurer, mais c'est le dernier avertissement, dans l'orbite du convenable.
     
    Il est vrai que son crime tutoyait l'imprescriptible. Elle avait eu le front, dans un débat, d'émettre des doutes, ou des réserves, sur le principe de vaccination. Dans le climat actuel, c'est comme ouvrir un traité du suicide politique, et le mettre en application. On l'a sermonnée de partout, y compris de son camp, elle a fini par rebrousser chemin. In extremis, on voudra bien la garder dans le camp du Bien. Mais c'est la dernière fois. A la prochaine incartade, c'est l'ostracisme.
     
    Cette affaire, que nous révèle-t-elle ? Sur Fabienne Fischer, rien, si ce n'est qu'elle n'aurait jamais dû faire machine arrière. Cette femme intelligente, libre d'esprit, a parfaitement le droit - et peut-être même le devoir - de proposer une vision critique de la doxa sanitaire qui incarcère nos consciences, c'est même bienvenu de la part d'une force nouvelle, dégagée des contingences de l'actuel pouvoir, aspirant à y apporter fraîcheur, audace et invention.
     
    Non. Ce que l'affaire Fischer met en lumière, c'est toute l'obscure épaisseur du consensus dans lequel toute parole publique, gravitant dans les sphères du pouvoir ou aspirant à cette jouissance satellitaire, doit accepter de se fondre, sous peine de mort politique. Tout coronascepticisme, tout climatoscepticisme (sur ce second point, Mme Fischer n'a aucun souci à se faire) excluent d'emblée l'impétrant. Que nul n'entre ici, s'il n'est géomètre, il doit parler notre algèbre, poser nos équations, dissoudre nos inconnues, parvenir à nos conclusions. Sinon, toi qui brigues une place dans notre cercle d'élus, tu resteras dehors. Dans les limbes.
     
    Madame Fischer avait parfaitement le droit d'avoir des doutes. Le droit de le dire. Face à une pression innommable, celle des chasseurs d'hérétiques, elle a malheureusement cédé. Ce dernier point, seul, peut lui être reproché. Sur tout le reste, sa parole citoyenne était de nature à nourrir un débat qui, hélas, fait si cruellement défaut.
     
     
    Pascal Décaillet