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Liberté - Page 1321

  • Revoici Frère Lumière

     

    Sur le vif - Dimanche 06.03.11 - 10.15h

     

    Il était un peu silencieux ces derniers temps, Dieu merci le revoici. Roger de Weck, alias l’allumé des Lumières, fils naturel d’Osram et Leclanché, réapparaît dans les colonnes du Matin dimanche. Une fois de plus, il nous illumine de sa connaissance. Un véritable interrupteur. En courant continu.

     

    Les Lumières, il réussit à les caser avec Gutenberg, la Réforme, les Révolutions américaine et française, le tout lié, par un jet de neutrons dont seul notre Phare a le secret, aux événements qui secouent aujourd’hui le monde arabe. Tous ces feux, pourquoi ? Juste pour ne pas répondre à une question, pourtant assez légitime, des journalistes concernant le projet de hold-up de la SSR sur les recettes publicitaires internet, alors qu’elle est déjà dûment engraissée par un impôt déguisé qui s’appelle « redevance », au reste beaucoup trop lourd. Décidément, Frère Lumière ne manque pas de culot.

     

    Ni d’aplomb, d’ailleurs. Sans étouffer son propos d’un monumental éclat de rire, il ose déclarer : « La SSR est l’un des radio-TV les plus efficaces d’Europe » ! Là, désolé, mais nous passons au-delà du fusible. Il n’y a plus ni puissance, ni résistance, ni loi d’Ohm. Il n’y a plus que l’obscure ténacité de la lumière. Quand, d’un coup, tombe la nuit.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Marine Le Pen : réflexions sur un sondage

     

    Samedi 05.03.11 - 18.12h

     

    Marine Le Pen en tête du premier tour, à la présidentielle de 2012 ? Ca n’est évidemment qu’un sondage, autant dire pas grand-chose, quand on sait que tout se joue dans les dernières semaines, parfois les derniers jours, et qu’il reste quatorze mois.

     

    Mais tout de même. Pour les gens de ma génération (je suis né au printemps 1958, exactement au moment où de Gaulle, après douze ans d’absence, revient aux affaires), ce sondage est un choc. Pour les plus jeunes, il l’est sans doute beaucoup moins. Voici pourquoi.

     

    Je suis la politique française depuis l’âge de 7 ans et demi (présidentielle de décembre 1965). Voici pour qui j’aurais voté :

     

    * Décembre 1965 : Charles de Gaulle.

    * Juin 1969 : Georges Pompidou.

    * Mai 1974 : abstention (j’étais pour Chaban, seulement 3ème).

    * Mai 1981 : François Mitterrand.

    * Mai 1988 : François Mitterrand.

    * Mai 1995 : Jacques Chirac.

    * Mai 2002 : Jacques Chirac.

    * Mai 2007 : abstention (j’étais pour Bayrou, seulement 3ème).

     

    Rien de très original, j’en conviens, mes variations épousant celles, majoritaires, de l’électorat français du moment. Mes deux impossibilités de voter au deuxième tour concernent la droite orléaniste, que j’ai toujours détestée, et qu’incarnaient, selon moi, Valéry Giscard d’Estaing en 1974 et 1981, et surtout Nicolas Sarkozy en 2007. Pour faire court (je pourrais disserter des heures sur ce sujet), la droite de l’argent, celle de Guizot et de Poincaré, au demeurant parfaitement respectable, mais qui n’est pas la mienne. Je précise enfin qu’en mai 1974, François Mitterrand n’était pas encore devenu, à mes yeux, présidentiable. Je me suis expliqué sur cette évolution (qui fut celle de toute une génération) ici même, il y a quelques mois.

     

    Dans tous ces choix, il y a des hommes de droite. Une certaine droite française, républicaine, qui m’est chère. Et il y a aussi un homme de gauche dont tout le monde sait, aujourd’hui, que sa culture, l’univers de ses lectures, son rapport à la Province le rattachaient infiniment plus à Stendhal, Chateaubriand ou même Barrès, qu’à la lutte des classes. Cet homme, François Mitterrand, a joué un rôle considérable sur la formation et l’évolution de mon rapport à la politique. Je le tiens, l’ai toujours tenu, pour une sorte de seigneur, certes dénué du moindre scrupule, mais incomparablement doué pour la ductilité de l’art politique.

     

    Dans tous ces choix, il n’y jamais eu le Front national. A cause de Vichy. A cause de l’Algérie. A cause de l’antigaullisme primaire de ses chefs. (Trois thèmes, certes, qui traversent aussi, et avec une tenace permanence, l'historiographie mitterrandienne...). A cause, aussi, des dérapages verbaux de son chef historique. « Le combat de toute ma vie », disait Chirac en 2002. 80% des Français lui ont donné raison.

     

    Mais l’eau a coulé sous les ponts. D’autres générations sont arrivées. Le charge de noirceur liée au seul nom de « Le Pen » s’est amenuisée, et jusqu’à s’évaporer en partie. A cela s’ajoute que Marine n’est pas Jean-Marie : plus modérée, plus convenable, tout en étant excellente dans les débats. Percutante. Claire. Précise.

     

    Et puis, cette très vieille loi, depuis la Révolution : l’extrême droite n’est jamais aussi forte que lorsque la droite traditionnelle est faible. Avec le quinquennat catastrophique de Nicolas Sarkozy, la leçon se vérifie. Tout cela bien pesé, une présence de Marine Le Pen au second tour fait en effet partie des scénarios possibles. Face à elle, qui ? A quatorze mois de l’échéance, je suis totalement incapable d’articuler le moindre nom.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Rançon, buvette, vérité

     

    Sur le vif - Samedi 05.03.11 - 09.41h


     

    Dans l’affaire libyenne, le Grand Conseil genevois doit jouer son rôle. Quelle est la force d’un parlement ? Sa puissance, sa dignité, sa raison d’être ? C’est de contrôler l’action du gouvernement. Outils principaux: les commissions des finances et de gestion. Le contrôler, oui, même (et surtout) s’il provient de la même majorité, si les hommes à mettre en cause se trouvent être copains de buvette ou de commission, de cocktail, de revue, de football ou de Grand Théâtre. Les affinités personnelles, à Genève, ont pris une telle ampleur qu’il devient de plus en plus difficile de se souvenir que l’électorat a envoyé siéger des représentants de partis antagonistes, pas nécessairement là pour se taper sur l’épaule.

     

    Dans le volet genevois de l’affaire libyenne, rien n’est clair. Il faut voir le ton sur lequel « on » nous a parlé, en 2010. Les grands airs qu’on a pris, au plus haut niveau de ce Conseil d’Etat-là. La servilité avec laquelle on a immédiatement dirigé la foudre juridique sur ce qui gênait. L’infantilisation de l’opinion publique, avec des postures du style : « Il y a des choses que vous ne devez pas savoir, ou ne pouvez comprendre ».

     

    Aujourd’hui, on sait ce qui s’est passé à Berne. Reste à établir l’aspect genevois des événements. Comme le Conseil d’Etat ne s’empressera pas de le révéler spontanément, une bonne partie de la population apprécierait que certains élus les y poussent un peu. Par exemple, par une commission d’enquête. Laquelle, évidemment, sera refusée par la majorité si horizontalement alignée du parlement. Mais au moins, l’opposition gouvernementale aura joué son rôle.

     

    Car le drame de la buvette parlementaire n’est pas tant qu’on en vient parfois aux mains. Mais qu’on y est si copains.

     

    Pascal Décaillet