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Liberté - Page 1247

  • La roue qui tourne

     

    Sur le vif - Vendredi 21.10.11 - 12.07h

     

    Il y a de quoi s'estourbir: voir le président 2010 du Conseil d'Etat genevois traiter de "dictateur" et de "terroriste", en page 3 de la Tribune de Genève, un "chef d'Etat étranger" décédé hier. Il y a un an, ce même personnage faisait intenter des procès à ceux qui, par rapport à ce même "chef d'Etat", utilisaient ces mots-là. C'est fou, comme la roue peut tourner, non?

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Un Alceste nommé Cyril

     

    Sur le vif - Vendredi 21.10.11 - 10.28h

     

    Je n'ai jamais, ni dans ce blog ni ailleurs, caché mon admiration pour le travail et la personnalité politiques de Cyril Aellen. Une adhésion sur le fond : je pense que son projet de droite élargie, tout honni soit-il aujourd'hui, voit juste et loin. Mais aussi sur la forme : l'homme est franc et direct, fiable, loyal. Il dit ce qu'il a sur le coeur. N'a pas peur de déplaire. Une sorte d'Alceste, dans un univers de Philintes et d'Orontes. Le Misanthrope étant de loin le personnage de Molière que je préfère, on comprendra mon affinité pour ce genre de profil. Alceste, ou encore le Dr Stockmann, le héros de l'Ennemi du peuple, la pièce d'Ibsen. Un homme seul. Ecorché. Qui dit ce qu'il pense. Et qui se bat.

     

    D'où mon sourire en découvrant que Cyril Aellen, le dernier président du parti libéral genevois, en qualité l'un des premiers, est désormais interdit de parole par l'actuelle direction du parti : « Il m'a été demandé de ne plus m'exprimer dans les médias. En particulier le soir du 23 octobre ». Aveu de faiblesse, bien sûr, de la part de cette direction : on ne gagne jamais rien à faire taire les gens, on n'y affaiblit que son propre crédit, on n'y entame que sa propre autorité.

     

    Pour ma part, en ce moment difficile pour celui qui fut un grand président, et un vrai chef, je veux simplement lui dire mon respect et mon amitié. A lui de choisir s'il veut se taire ou non. Ce qui est sûr, c'est que son avenir politique est devant lui. Pour après-demain, si ce n'est pour demain. C'est l'opposition qui grandit les hommes. La triste horizontalité de l'alignement mondain les avilit.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Vade-mecum anti-molasse

     

    Chronique parue dans le Nouvelliste - Jeudi 20.11.11



    Au milieu d'une Europe qui ne nous veut guère de bien, et se porte elle-même fort mal, au milieu d'une crise financière, monétaire, et sans doute plus globale encore, à qui voulons-nous confier le destin de la Suisse pour les quatre ans qui viennent ? Chaque citoyen, en son âme et conscience, en jugera d'ici dimanche. Pourvu, simplement, qu'il le fasse dans l'urne : le mot « peuple », en démocratie, n'a de sens et d'issue que par la voie électorale, dans le cadre d'institutions. Bref, de gauche ou de droite, allons tous voter ! Plus la participation sera grande, plus sera légitime le Parlement fédéral 2011-2015.

    Une légitimité dont il a bien besoin. Il convient de s'interroger sérieusement sur certains aspects vieillots de cette institution, qui à certains égards fonctionne encore comme au temps des diligences. A l'heure d'internet, des réseaux sociaux, qui permettent d'incroyables simultanéités à distance, d'un bout à l'autre de la planète, à quoi rime encore cette convergence physique, quatre fois par an, selon un calendrier totalement figé plusieurs années à l'avance, de 246 élus dans un même lieu, la ville de Berne ? Bon an, mal an, qu'il pleuve ou qu'il vente, il est acquis que les parlementaires siègent en mars, en juin, en septembre, en décembre. Un décalage total, en termes d'efficacité, par rapport au monde de l'économie.

    Et puis, lâchons le mot : et si la Suisse était un régime parlementaire hypertrophié ? Savez-vous qui est, statutairement,  le premier citoyen du pays ? Réponse : le président du Parlement. Sans vouloir froisser mon ami Jean-René Germanier, qui accomplit d'ailleurs sa fonction à merveille, je ne trouve pas ce statut normal. Le premier, dans une démocratie, doit être le chef de l'exécutif. Qu'il ne le soit pas, en dit long sur la castration, dans la mentalité politique suisse, de tout ce qui peut incarner une fonction de décision, de prise de risque. Tout ce qui dépasse : on choisit Johann Schneider-Ammann à la place de Karin Keller-Sutter, décision catastrophique non seulement pour le PLR, mais pour le pays. On trouve ça très bien, on a mis un type qui nous dérangera moins que la redoutable Saint-Galloise, on a nivelé par le plancher. Et on s'en lave les mains. Et on s'en va boire un verre au Café fédéral.

    Oui, la politique fédérale déifie l'institution législative, jusqu'à cette carte de visite, ahurissante, de « correspondant parlementaire », alors que les équipes journalistiques à Berne traitent aussi du Conseil fédéral, de l'administration, de la vie syndicale, patronale, et des partis politiques. Glorifier le cénacle des faiseurs de lois (hélas aussi faiseurs de rois, mais peut-être plus pour longtemps), au détriment du gouvernement, c'est l'un des paradoxes de notre système où la molasse est reine, et la pierre précieuse, appelée à demeurer dans l'ombre.



    Pascal Décaillet