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  • Droite en Ville : les conditions d'une reconquête

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 15.05.24

     

    En ce printemps 2024, les candidatures à l’exécutif de la Ville de Genève, au printemps de l’an prochain, fleurissent. Les élections municipales 2025, dans nos 45 communes, occupent déjà les esprits, ce sera notre prochaine grande échéance. Comme d’habitude, la Ville focalise toutes les attentions. Avec, à la clef, une grande question : une Reconquista par la droite est-elle possible ? Un Conseil municipal de droite. Et, soyons encore plus fous dans l’utopie, un Conseil administratif de droite ? Un véritable renversement de majorité, après une éternité de pouvoir municipal à la gauche.

     

    Je vais être franc : en l’état actuel des forces, à moins d’un an du scrutin, en l’état surtout des faiblesses de la droite municipale, en l’état de la discipline de vote à gauche, en l’état de l’ancrage et des réseaux de la gauche en Ville depuis des décennies, je ne tiens pas cette reconquête, à l’heure où j’écris ces lignes (mai 2024), pour possible. La gauche, pour l’heure, tient la place forte. Et les assauts de la droite n’ont ni la puissance de feu, ni l’unité de doctrine, ni la cohésion dans les rangs, pour faire tomber la citadelle. Ça n’est pas une affaire d’hommes ou de femmes, pas une affaire de qualité des candidates ou candidats des deux bords. Non, c’est une question de stratégie. De nourriture intellectuelle suffisante à droite, d’armature, de force morale, pour prétendre incarner une alternative à la gauche, au printemps 2025.

     

    Et qu’on ne vienne pas me parler des « affaires ». Elles auront, tout au plus, pour effet de faire tomber le deuxième siège Vert (et encore, j’attends de voir !), mais ne seront pas décisives pour peser sur la force mécanique de la gauche, face une droite structurellement divisée, lâchée par la ductilité marécageuse du Centre, et surtout incapable d’élaborer une doctrine unifiée, portée par un candidat ou une candidate UNIQUE, incapable de convaincre qu’elle peut reprendre en mains cette Ville, avec une politique d’alternance pouvant séduire le grand nombre, et non les seules officines politiques, par nature consanguines, coupées du réel. Oh, il y a bien d’excellentes candidatures, au premier plan desquelles la PLR Natacha Buffet-Desfayes, qui a déjà beaucoup œuvré, au plan cantonal, à la reconquête du DIP par les héritiers de Fazy. Mais la seule qualité d’une candidature n’y changera rien : pour vaincre la gauche, il faut la puissance mentale et morale d’une coalition cohérente, avec appétit de reconquête, rage de vaincre.

     

    Comprendre les enjeux du printemps 2025, c’est percevoir la bataille dans ses aspects de force mécanique. C’est par sa machine de guerre, son rouleau compresseur, que la gauche n’en finit pas de gagner. C’est par ce type de puissance structurelle, plus encore que par le choix des hommes et des femmes, que la droite pourra mener la contre-attaque. En l’état, c’est tout, sauf gagné.

     

    Pascal Décaillet

  • Le verre, les étincelles, la puissance de la mémoire

     
    Sur le vif - Mardi 14.05.24 - 14.37h
     
     
    De la Grande Mosquée des Omeyyades, à Damas, au Cap Nord, en passant par la Grèce, les Balkans, l'Andalousie, les Allemagnes sous toutes leurs coutures, j'ai tant de souvenirs d'enfance. Alors que je me sens vieillir, ils peuplent mon imaginaire, plus que jamais.
     
    Ce matin, en entendant à la radio l'annonce terrible de la fermeture du site Vetropack, qui a jeté sur moi le voile d'une colère noire, un événement, l'un des plus anciens de ma vie, a immédiatement surgi dans ma mémoire : la visite, en famille, début ou milieu des années 60, de la "Verrerie de Saint-Prex".
     
    Mon père était ingénieur, très actif dans une association professionnelle (il l'avait présidée l'année de ma naissance) qui organisait continuellement des visites d'usines, un peu partout en Suisse romande. Alors, le week-end, seul avec lui ou en famille, nous nous rendions sur des sites industriels, comme d'autres vont à la plage. Et ces usines en activité me rendaient aussi heureux que les richesses culturelles les plus éclatantes. Jusqu'à l'âge de 12 ou 13 ans, je voulais devenir "ingénieur en mécanique dans une usine en Allemagne". C'était mon rêve.
     
    La "Verrerie de Saint-Prex". Avant de pénétrer ce temple de l'industrie de transformation, je n'avais aucune idée de la manière dont on fabriquait le verre. Je me souviens de feux et d'étincelles, d'une pluie d'étoiles, et à la toute fin, les bouteilles. Ce souvenir m'a marqué à vie, j'admirais ces travailleurs du sable, comme ceux qui percent les tunnels, dans la montagne.
     
    Dans GHI à paraître demain, je consacre une colonne commentaire à l'absolue nécessité, selon moi, de sauver l'industrie en Suisse. Papier rédigé vendredi dernier, j'ignorais encore le sort de Vetropack.
     
    Aujourd'hui, je veux dire ma colère. Il y a encore une place, en Suisse, pour l'industrie du verre. Nos amis vaudois perdent là un fleuron, irremplaçable. Nous devons tout faire pour sauver en Suisse le secteur secondaire. La grandeur de celui qui travaille le minerai ou le métal devrait être enseignée dans les écoles. Le fruit du travail doit être justement réparti à ceux qui produisent l'effort le plus pénible. Si nous oublions ces données essentielles, nous perdrons tout : notre savoir-faire, mais aussi notre âme.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Alberto, l'anti-bobo

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 08.05.24

     

    Ce jeudi 2 mai 2024, Alberto Velasco, 76 ans, a été élu Président du Grand Conseil genevois. Pour cet homme atypique, à nul autre pareil, infatigable combattant, républicain dans l’âme, c’est la consécration d’un long chemin de luttes, âpre, souvent difficile, mais marqué par la cohérence, la constance, la fidélité à ses idées.

     

    Velasco est le type même du socialiste social. A l’opposé des zigomars sociétaux, approximatifs, marécageux, libertaires, associatifs, à qui l’Etat, la République, l’Histoire, la rigueur et la précision des lois, n’évoquent rien. Alberto Velasco les déteste, ils n’ont rien à voir avec son univers.

     

    Il y a, dans ce chasseur de moulins à la triste figure, du Cervantès, c’est sûr. Mais aussi, du Garcia Lorca, et puis ce chant de l’Ebre, mémoire de la plus terrible bataille des Républicains. Il y a cette enfance à Tanger, ces premiers pas en Suisse dans des conditions difficile, Il y a la rencontre du socialisme. Il y a une vie entière de combat. C’est tout.

     

    Alberto Velasco : on ne comprend pas toujours exactement ce qu’il raconte, il n’a peut-être pas la précision de phrasé d’un Fabrice Luchini. Mais on saisit l’essentiel : sa culture politique, son aptitude au combat, son attachement à une République solidaire, mais exigeante, structurée, disciplinée. Bref, l’anti-bobo. Bravo, Alberto, et excellente année présidentielle !

     

    Pascal Décaillet