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  • Le retour du peuple, vite !

     

    Sur le vif - Mercredi 29.04.20 - 17.02h

     

    Jamais, depuis 1848, un conseiller fédéral n'a bénéficié du quart, peut-même pas du dixième, de la visibilité d'Alain Berset, depuis le début de la crise.

    Le principal intéressé, c'est vrai, communique bien. Il est clair. Il évite le paternalisme. Il s'adresse à des citoyennes et citoyens adultes, mûrs et vaccinés, il ne les infantilise pas.

    Mais tout de même. L'hyper-visibilité du Conseil fédéral, et en général des exécutifs en Suisse, à la faveur de cette crise, doit toucher à sa fin. Depuis des semaines, pour ma part, je la souligne et la condamne. Depuis des semaines, je déplore la disparition des Parlements, et celle de la démocratie directe.

    Dans notre tradition démocratique suisse, le personnage principal, c'est la citoyenne, le citoyen. Pas l'élu. Et surtout pas l'élu exécutif. Que ce dernier multiplie les actes de présence en période de crise, on peut l'admettre. Mais cela, en aucun cas, ne doit devenir la règle. Ni s'étendre, dans la durée.

    L'après-crise, politiquement, ça doit être le retour des Parlements. Et surtout, beaucoup plus important, le retour du peuple. Au premier plan.

     

    Pascal Décaillet

  • La jouissance du contremaître

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 29.04.20

     

    Le télétravail ? Voilà des années qu’il était déjà possible ! Des années perdues, pour les entreprises, pour la société surtout, par conformisme, par ronron, par paresse du changement. Et plus que tout, pour maintenir, dans les boîtes et dans la fonction publique, le bon vieux contrôle physique du petit chef, version bureautique du contremaître industriel, celui qui vient vérifier, derrière votre dos, si vous faites bien votre boulot. Il aura fallu une toute petite bête, maligne et virale, pour souligner la vanité de ces rapports hiérarchiques, où la sournoiserie de la domination le dispute au génie de la tracasserie.

     

    Il y a des métiers où il faut être là physiquement. Mais il existe de nombreuses fonctions, dans une activité professionnelle, qui peuvent s’exercer derrière n’importe quel écran d’ordinateur, là où on est. Dans ce second cas, le télétravail, qui valorise la confiance et la compétence (au final, il faut bien que le boulot soit accompli), vaut mille fois mieux que venir compter ses heures dans les locaux de son employeur.

     

    La notion même de « bureau », création de la seconde moitié du dix-neuvième siècle, et surtout du vingtième, est de plus en plus caduque. Pourquoi continue-t-on à construire des surfaces commerciales à Genève, alors qu’une quantité d’entre elles, aujourd’hui, sont vides ? Moins de déplacements, moins de jouissance dominatrice chez les petits chefs, moins de pollution, et le boulot qui sera quand même fait ! C’est le moment d’être révolutionnaire. Ou alors, c’est à désespérer.

     

    Pascal Décaillet

  • Nul ne colonisera nos consciences !

     

    Sur le vif - Mardi 28.04.20 - 16.36h

     

    Passionnant reportage, hier soir, sur l'Histoire du café, du thé, du chocolat. Principalement depuis le 18ème siècle, même s'il faut remonter bien antérieurement.

    Le libre-échange britannique, dans toute sa splendeur. Le rôle de la Compagnie des Indes. La guerre commerciale avec la Chine, la guerre de l'opium. La construction de l'empire commercial britannique, via Ceylan (le thé Lipton), les Indes, les colonies d'Asie et d'Amérique. La consolidation, dans le même temps, d'une marine commerciale et militaire (la Royal Navy), incomparable.

    Ce qui frappe, c'est à quel point toute la puissance commerciale britannique est tournée vers la mer, le vaste monde, ces fameux "océans" que Churchill vient convoquer en alliés du salut, dans son discours aux Communes, le 13 mai 40, celui du sang et des larmes.

    Ce libre-échange, vital pour le destin britannique, est à l'exact opposé de nos nécessités, de nos traditions continentales. Tant dans l'Allemagne de Bismarck, avec son protectionnisme et ses lois sociales, que dans la France jacobine et colbertiste, sans oublier la Suisse de 1848, la puissance de l'Etat est centrale. Non pour se substituer à l'économie, mais pour l'encadrer, lui donner des règles, au service d'un impératif supérieur : la cohésion sociale.

    L'Angleterre n'a pas cette tradition-là. Malgré la grande exception que fut la période travailliste d'après-guerre, celle de Clement Attlee, avec ses nationalisations.

    Notre Europe continentale, notre France, notre Allemagne, notre Italie, notre Suisse, ont d'autres valeurs historiques et référentielles que la simple exaltation du libre-échange, du marché, de la valse invisible des exportations, de la plus-value financière sur le travail humain.

    A cet égard, le Brexit demeure, pour qui sait lire l'Histoire, un événement d'importance mineure. Le plus étonnant n'a pas été que le Royaume-Uni quittât la construction européenne. Mais qu'il y fût, un jour de 1972, entré.

    Avec une Europe sociale, solidaire, fondée sur la culture et sur les valeurs, toutes choses dont l'UE est hélas aujourd'hui très éloignée, la Suisse saura, un jour, trouver un chemin. Non d'obédience, mais de partage.

    En attendant, indépendance, souveraineté, travail, confiance et respect mutuels. Nous ne sommes pas une puissance coloniale. Mais nous ne laisserons personne coloniser nos consciences.

     

    Pascal Décaillet