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  • Macron : les algorithmes de l'utopie

     

    Sur le vif - Mardi 26.03.19 - 18.35h

     

    A l'occasion de la visite du Président chinois, Emmanuel Macron multiplie les signaux visant à donner l'illusion d'une existence de l'Union européenne, et d'une vitalité du multilatéralisme. C'est un double mensonge.

     

    L'Union européenne n'existe pas. Tout au plus, tente de survivre une structure flasque, blessée grièvement par son déficit démocratique et son expansion démesurée.

     

    C'est très bien de se dire que, face au géant chinois, on oppose la belle unité d'un continent, pour mettre en balance des plaques tectoniques à peu près comparables. C'est très bien, mais c'est un mensonge. On se ment à soi-même. On ment aux Européens.

     

    Le Président chinois est un homme intelligent et renseigné. Il sait parfaitement que l'Union européenne n'est qu'une fiction. Il est totalement au parfum de la renaissance, partout en Europe, de l'idée nationale, portée par des peuples qui veulent, chacun, recouvrer leur souveraineté, leur indépendance, leur fierté de partager une communauté d'appartenance.

     

    Il sait que la France est la France, l'Allemagne est l'Allemagne, il sait que les vrais paramètres historiques et géostratégiques sont là, et non dans l'illusion abstraite, géométrique, philosophique, d'un continent uni. L'Europe, en 2019, n'en est pas un !

     

    Macron se ment à lui-même. Il ment à la France. Il ment à l'Europe. Il tient pour réels des concepts volatiles, évanescents. A la résurgence de l'idée nationale, il ne veut rien comprendre. Ignorant de l'Histoire, il ne raisonne que dans la fragile algèbre de ses rêves. Il a tort, immensément : une politique doit partir des réalités. Elle doit s'ancrer dans une immense connaissance de l'Histoire. Elle doit puiser ses racines dans ce qui fait vibrer les peuples, et non imposer, d'en haut, des structures aléatoires, une sorte d'algorithme de l'utopie.

     

    La France, hélas, a un Président à rebours de son époque. Il n'est jeune que par l'âge. Dans les concepts, il suinte la défense désespérée de l'Ancien Monde.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Le temps des ruptures, le temps du combat

     

    Sur le vif - Lundi 25.03.19 - 10.18h

     

    Je n'ai jamais compris pourquoi on disait "fake news", au lieu de dire simplement "fausses nouvelles".

     

    En revanche, j'ai toujours parfaitement compris de quel camp politique américain - celui d'Obama et de Mme Clinton - venait, dès le début, toute la construction médiatique sur les Russes et la campagne de Trump.

     

    J'ai plutôt bien compris, aussi, tout le parti que pouvaient tirer de cette invention les magnifiques esprits qui, en Suisse romande, n'ont jamais digéré l'élection de Trump, ont juré de ne jamais lui faire le moindre cadeau.

     

    Ce matin encore, dans les titres du Journal de 7h RSR, on pouvait entendre "Le Procureur Bob Mueller passe l'éponge". Un libellé absolument scandaleux : "passer l'éponge" présuppose qu'il y a faute, et qu'on veut bien l'oublier. Lourd de sens.

     

    Ces beaux esprits feront-ils amende honorable ? Évidemment non ! Laissons-les vivre leur vie. Et construisons, en Suisse romande, un espace d'échange des idées où puissent aussi s'exprimer ceux qui soutiennent Trump. Ceux qui comprennent sa volonté de régulation des flux migratoires. Ceux qui, avec lui, rejettent les machineries multilatérales inutiles et vaines. Ceux qui ne cèdent pas à la première mode. Ceux qui tiennent la nation pour l'unité de référence et de décision des sociétés humaines.

     

    Je vais vous dire une chose un peu rude. Je ne pense pas, dans l'univers éditorial de Suisse romande, dans le très grand clivage des fronts où nous sommes, que le temps soit encore celui du débat. Nous sommes entrés dans le temps du combat. Le temps des ruptures. Le temps des choix. C'est dur, douloureux. Mais il faut passer par là.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Il y a vingt ans, les bombes sur Belgrade - Colère et mémoire

     

    Sur le vif - Dimanche 24.03.19 - 14.11h

     

    Pas de guerre en Europe, depuis 1945 ? Je suppose que vous plaisantez : il y a, jour pour jour, vingt ans, les avions de l'OTAN - entendez les affidés des Américains - bombardaient la ville de Belgrade, capitale de la Yougoslavie pendant toute l'existence de ce pays, capitale historique d'une Serbie qui avait héroïquement résisté aux nazis entre 1941 et 1945, ce qu'on ne peut pas exactement dire de toutes les Républiques de l'ex-Yougoslavie.

     

    Il y a vingt ans, les Américains, avec l'appui d'une Allemagne visant dans le conflit yougoslave ses propres objectifs de résurrection nationale et d'emprise renouvelée dans les Balkans, tout cela au milieu d'une absolue inexistence de "l'Union européenne", bombardaient, à la bombe lourde, comme aux grandes heures des années 1943-1945 dans le ciel allemand, la capitale d'un État souverain d'Europe, le mettant ainsi au ban des nations.

     

    Ils bombardaient, et l'écrasante majorité des commentateurs, des éditorialistes, en Europe, en Suisse romande, applaudissaient. Une fois de plus, nos belles âmes et nos blanches consciences, sous couvert de défendre les "droits de l'homme" dans les Balkans, au nom d'une conception bien unilatérale de ces droits, se plaçaient du côté du plus fort. Face aux bombes américaines, les premières en Europe depuis 1945, que pouvait faire la Serbie ?

     

    La vérité, dès la chute du Mur (1989), et dès le début du démembrement de l'ex-Yougoslavie (Noël 1990), c'est que les Américains, les Britanniques (reprenant ainsi un vieux rêve, jamais réalisé, de Churchill), et avec eux l'Allemagne de Kohl, rêvant de réinventer sa puissance dans la Mitteleuropa, avaient leur plan d'action pour les Balkans. Affaiblir au maximum l'influence slave, donc serbe, favoriser les nationalismes hostiles aux Serbes, pulvériser l'unité nationale yougoslave, la remplacer par l'influence économique occidentale en Slovénie et Croatie, la présence stratégique dans les parties albanophones, bref accomplir le vieux dessein d'implantation dans les Balkans.

     

    Pour cela, il fallait diaboliser un camp. Ce fut celui des Serbes. Avec l'appui d'une "justice internationale" complice des puissances occidentales, on focalisa les attentions sur les seuls crimes de guerre des Serbes (il n'est pas question ici de les nier), on ferma les yeux sur ceux des autres. Au Kosovo, on laissa se développer le rêve d'une Grande Albanie, unissant les forces de l'Albanie historique, celles des Albanais du Kosovo, celles des Albanais de Macédoine. Avec l'appui de l'Occident et de nos belles consciences, on décréta que le nationalisme albanais avait droit à l'existence, et que le nationalisme serbe, lui, ne l'avait pas. Clairement, on favorisa un camp, contre un autre.

     

    Il y a juste vingt ans, j'étais allé réaliser, en allemand, une grande interview de l'ancien Chancelier Helmut Schmidt, au sommet de la tour de "Die Zeit", qui domine le port de Hambourg. Un port totalement rasé par le terrible bombardement britannique de l'été 1943. J'avais interrogé le successeur de Willy Brandt sur les bombardements qui venaient de se produire à Belgrade. Il les avait vivement condamnés, rejetant ainsi toute la politique atlantiste de son successeur à lui, Helmut Kohl, et celle de Schröder.

     

    Il y a juste vingt ans, des bombes s'abattaient sur une capitale d'Europe. Non pour servir des intérêts européens, mais ceux d'une grande puissance d'Outre-Atlantique, avec la complicité d'une Allemagne en pleine renaissance politique, elle qui n'avait pas exactement laissé, dans les Balkans, entre 1941 et 1945, le plus reluisant des souvenirs. Et c'est sans doute là l'euphémisme le plus édulcorant dont on puisse user. Les plus anciennes générations serbes saisiront, sans qu'il soit nécessaire de leur faire le moindre dessin.

     

    Pascal Décaillet