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  • Jean Ziegler et la sirupeuse eucharistie des cocktails

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    Sur le vif - Mercredi 21.08.13 - 12.40h

     

    Je suis ami à la fois avec Pierre Weiss et Jean Ziegler. Deux compatriotes imaginatifs, courageux, ne craignant pas la solitude. J'aime les hommes de coeur, au sens cornélien, celui du courage, de l'engagement. Et n'apprécie pas, mais alors pas du tout le procès en "non-Suissitude" intenté à Ziegler. C'est bien le dernier argument qu'on puisse porter contre lui.



    Il n'y a pas de bons Suisses ni de mauvais Suisses, nous sommes tous concitoyens. Et nul n'a le droit de contester à Ziegler l'ambition de représenter son pays. Il en fait partie intégrante, il en est une grande voix, agréable aux uns, insupportable aux autres, mais une voix, une clameur, un tempérament de feu. Au passage, Ziegler est, avec Blocher, le Suisse le plus connu à l'étranger. Régulièrement invité sur les chaînes allemandes, où il excelle.



    Et moi, qui le connais depuis tant de décennies, et ne partage évidemment pas beaucoup de ses idées, je dis ici: "Attaquez-le sur le fond, étrillez-le si vous voulez, mais en aucun cas vous ne pouvez lui contester la qualité de son attachement au pays". Natif de cet Oberland dont il parle aujourd'hui de façon bouleversante, Ziegler est Suisse, profondément Suisse, il critique certains aspects de notre pays, on le rejoint ou non, mais cette dialectique, souvent rude, fait partie de notre débat national. Elle nous provoque, nous irrite, nous exaspère peut-être, mais je préfère mille fois la sainte vérité de cette engueulade interne à la tiédeur de ceux qui ne prennent jamais de risques, histoire de demeurer copains avec tout le monde. Surtout pas d'éclats. Surtout pas de vagues. Surtout pas d'histoires. Juste frayer, sourire aux lèvres, dans la sirupeuse eucharistie des cocktails.

     

    Pascal Décaillet

  • Novembre 1918: la clef pour tout comprendre

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    Samedi 17.08.13 - 16.46h

     

    Hier soir, assez tard, sur la chaîne Toute l'Histoire, passionnante émission sur les tout derniers jours (fin octobre, début novembre 1918) de la Grande Guerre, sur le front franco-allemand, ou plus exactement le front des Alliés (avec Foch comme généralissime) contre les redoutables armées du Kronprinz.



    Peu de gens le savent, même si les plus grands historiens, comme Pierre Miquel, le rappellent régulièrement: tout s'est joué au dernier moment. Des deux côtés, on s'attendait à un nouvel hiver de guerre, on n'entrevoyait pas d'issue avant le printemps 1919. L'armistice du 11 novembre 1918 fut une surprise pour presque tout le monde.



    Même l'ultime offensive alliée, qui renouait enfin avec la guerre de mouvement, fut beaucoup mieux contenue par les Allemands qu'on ne le dit souvent. Assurément, la défaite ne fut pas militaire, mais politique. Dissensions entre le Reichstag et Ludendorff, mise à l'écart du Kaiser, rôle des sociaux-démocrates, Révolution allemande le 9 novembre, avant-veille de l'armistice.



    Tout cela, l'émission d'hier le rappelle admirablement. On sait à quel point Hitler, dès 1919 et infatigablement jusqu'au 30 janvier 1933, date de sa prise de pouvoir, accusera les "hommes de novembre 1918", les accablant de tous les torts. La fameuse thèse du "coup de poignard dans le dos". C'est un thème majeur des nationalistes allemands, pas seulement nazis, pendant toute la République de Weimar.



    L'émission d'hier m'a donné envie de relire deux ouvrages qui m'avaient fasciné naguère: d'abord "Die Geächteten", les Réprouvés, d'Ernst von Salomon, qui commence dans la pagaille des démobilisés de novembre, décembre 1918, et la naissance des premiers corps-francs. Et puis, surtout, un chef d'oeuvre littéraire, "November 1918", d'Alfred Döblin, l'un des plus grands romans allemands de la première partie du vingtième siècle. Période n'en fut pourtant pas avare, c'est le moins que l'on puisse dire.

     

    Comprendre novembre 1918, côté allemand, dans un pays en totale effervescence, entre Spartakistes, nationalistes et sociaux-démocrates, c'est saisir un grand nombre de clefs pour comprendre la tragédie qui se produira vingt ans plus tard.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La Drôle de Guerre

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    Sur le vif - Vendredi 16.08.13 - 18.47h.

     

    Au moins dix personnes, depuis le début de la semaine, me demandent mes pronostics pour les élections du 6 octobre, voire celles du 10 novembre. A tous, j'adresse la même réponse: JE N'EN SAIS STRICTEMENT RIEN ! La vraie campagne n'a même pas encore commencé, nous n'en sommes qu'à la Drôle de Guerre, vous savez celle où l'on s'épie, se toise, teste des rumeurs, joue avec les nerfs. Parfois, de nuit, deux patrouilles adverses s'égratignent, mais en réalité rien de décisif ne se produit. Lisez Sartre, les Carnets de la Drôle de Guerre, c'est magnifiquement écrit. Ou Julien Gracq, dans un style de génie.



    Normal. C'est trop tôt. Parodiant l'Ecclésiaste, nous dirons qu'il y a un temps pour la Drôle de Guerre, et un temps pour la Guerre tout court. Il y a un 2 septembre 1939, et un 10 mai 1940. Un temps pour la guerre de position, tranchées ou Maginot, un temps pour l'offensive. Ce temps-là, qui ne manquera pas d'arriver, n'est pas encore venu. Et l'attaque décisive, nul ne sait d'où elle viendra.



    Et puis, de toute manière, tout pronostic est Dieu merci impossible. La campagne appartient à ceux qui la mènent, tous partis confondus. A leurs puissances de vision et de stratégie, leurs capacités d'alliances, leurs analyses de terrain. Et tout se jouera dans les dernières lignes droites.


    Tout le reste n'est que supputations. Allez, je poste ce blog à 1847h. L'heure exacte du Sonderbund.

     

    Pascal Décaillet