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  • La Suisse au milieu du village

     

    Sur le vif - Mardi 16.07.13 - 09.40h

     

    Magnifique Pierre Ronget ! Le Maire de Vernier, deuxième ville du canton de Genève, fera de la Suisse – oui, la Suisse – l’invitée d’honneur de sa commune le 1er août ! La démarche est insolite, audacieuse, profondément rafraîchissante, et surtout lourde de sens.

     

    Je connais Pierre Ronget depuis plus de trois décennies. Nous avons en commun, parmi beaucoup d'autres choses, l'amour de la langue et de la culture grecques. C’est un homme d’une vaste culture, notamment historique, ayant fait une remarquable carrière au Département de l’Instruction publique, trempé dans des valeurs spirituelles et artistiques, celle du chant par exemple : il dirige, depuis si longtemps, un chœur orthodoxe, dont il est archonte.

     

    Pierre Ronget voue à sa Ville de Vernier, à son Canton (il est député), à la Confédération un attachement viscéral, de l’amour même, un sens hors du commun du service public. Il aime son pays. Ce qui, jusqu'à nouvel ordre, ne relève pas encore du Code pénal.

     

    Et il ne manque pas d’humour ! Placer la Suisse comme invitée d’honneur d’une manifestation dont elle est en quelque sorte l’hôtesse naturelle, la démarche est non seulement drôle, provocante pour les bonnes âmes, mais surtout elle remet la Suisse au milieu du village.

     

    Car enfin, s’il faut « inviter la Suisse » le 1er août, c’est peut-être qu’on l’aurait un peu oubliée. Tout occupés à notre exaltation de l’altérité, nous aurions juste laissé de côté l’intérêt et la réflexion sur ce qui fonde notre identité commune : culture politique, fédéralisme, démocratie directe, attachement à notre indépendance, notamment. Ces valeurs-là, nous pourrions donc, le temps d’un jour de fête, les convier à revenir au cœur de nos préoccupations : la Suisse comme invitée d’honneur !

     

    Reste à savoir quelle Suisse. Chacun a la sienne, et vous savez que la mythologie de 1291 n’est pas trop la mienne, ma passion pour le dix-neuvième et le vingtième siècle ayant fait son œuvre. Mais peu importe, invitons la Suisse ! Invitons-la le 1er août, à Vernier, mais peut-être aussi les 364 autres jours de l’année. Renseignons-nous sur nos Histoires cantonales, et aussi sur notre Histoire fédérale depuis 1848. Dévorons, par exemple, les livres d’Olivier Meuwly sur l’Histoire de nos partis politiques depuis 150 ans. Baignons-nous dans l’Histoire économique, celle de nos industries, de notre savoir-faire. Immergeons-nous dans l’Histoire de notre presse, de nos idées, de nos bagarres aussi, dans les quatre langues.

     

    Oui, invitons la Suisse en nous. Après l’immonde slogan de l’expo universelle de Séville, 1992, « La Suisse n’existe pas », laissons doucement venir à nous, et monter dans nos consciences, l’identité si subtile et pleine de charme de ce petit pays fragile. Possible, pour beaucoup d’entre nous, et je m’inclus, que cette adhésion n’aille pas de soi : nous ne sommes ni des Lorrains arrachés à la terre en 1870, ni des Grecs ou des Serbes en état de résistance, ni même des Français avec leurs monuments aux morts. Je dis, moi, que l’attachement au pays, en Suisse, peut procéder, tout simplement, de la connaissance. Cela implique de se renseigner, ouvrir des livres, beaucoup, consacrer pas mal d’années au chemin d’apprentissage de ce pays complexe, mais passionnant.

     

    Cela exige, aussi, de replacer la Suisse au cœur de nos préoccupations. En cela, la démarche de Pierre Ronget fait preuve d’audace, de courage, de clairvoyance. Merci à lui de ce clin d’œil. Puissions-nous un jour ne plus avoir besoin d’inviter la Suisse. Parce que, simplement, elle serait déjà là.

     

     

    Pascal Décaillet

     

  • Olivier Reverdin: les mille facettes d'un homme unique

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     Sur le vif - Lundi 15.07.13 - 16.12h

     

    Né le 15 juillet 1913, plus d’un an avant la Grande Guerre, Olivier Reverdin, décédé le 16 juin 2000, aurait  aujourd’hui, jour pour jour, cent ans. J’ai eu la chance, parmi des centaines d’autres, de l’avoir comme professeur. Dans le Temps, il y a quelques jours, l’actuel professeur de grec à l’Université, Paul Schubert, a rendu un remarquable hommage à cet homme aux multiples facettes, l’un des derniers grands humanistes de Genève. La lecture de ce beau texte a été de nature à remuer mes souvenirs.

     

     

    Journaliste, patron du Journal de Genève, helléniste, professeur à l’Université, conseiller national puis aux Etats, diplomate dans sa jeunesse dans une Italie encore en guerre, président de l’Académie suisse des sciences humaines, puis du Fonds national de la recherche scientifique, membre de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, j’en passe, j’en oublie, j’en laisse. Assurément, un homme comme on n’en fait plus. Tout cela étant au reste fort connu, on me permettra ici de m’en tenir à l’une ou l’autre touche subjective, ou souvenir personnel, dans le destin de ce promeneur élégant et souverain, solitaire, qui vivait dans la Grèce ancienne, à moins qu’elle ne vécût en lui.

     

     

    Souvenirs donc. Dans ma tête, je l’appelais « le botaniste », tant sa passion, son érudition pour le monde végétal étaient phénoménales. Il vous emmène tout un semestre dans les Thalysies de Théocrite, avec la fameuse Magicienne, ou Sorcière, la « Pharmakeutria », passe un temps infini, et littéralement captivant, à disserter sur chacune des plantes évoquées par le poète. Il vous entraîne hors du sujet (mais qu’est-ce que le sujet d’un poème ?), vous y ramène en plein, vous perd dans la digression, revient à la syllabe et à la métrique, le tout avec l’imperturbable tranquillité du flâneur, celui qui herborise. Vous êtes pris.

     

     

    Souvenirs. J’ai déjà parlé ici du voyage de Provence, mai 1977, en compagnie aussi de l’excellent André Hurst, où chaque étape était une page ouverte. Nous faisions nos exposés sur place, ici Apollonios de Rhodes, ailleurs Strabon, la Grèce revivait aux abords de la Camargue, Rome et la Gaule au sommet d’un oppidum, nous avions avec ces deux hommes des guides d’exception.

     

     

    Il était l’un des seuls professeurs à nous emmener dehors. Chez lui, rue des Granges, au milieu de son époustouflante bibliothèque, dont une partie était celle de son arrière-grand-père, le Général Dufour. À la Fondation Hardt, pour laquelle il s’est tant battu. Dans les vignes de la Côte. Avec lui, avec André Hurst, on s’installait sous un arbre, on ouvrait les livres, la Grèce était à nous.

     

     

    Souvenirs. Vingt ans plus tard. En 1997-1998, réalisant pour la RSR d’innombrables émissions historiques autour des 150 ans du Sonderbund et la naissance de la Suisse moderne, j’avais fait appel à Olivier Reverdin pour évoquer la figure de son illustre aïeul, le Général Dufour. Plusieurs fois, il était venu au micro, toujours avec des documents inédits, originaux, infiniment précieux. Toujours dans la vibration de la mémoire historique, l’impétueuse nécessité de l’édition, lui qui nous avait si bien parlé de la Genève de ces grands humanistes, qui, au seizième siècle, avaient relancé le goût pour la Grèce ancienne. Le travail de ces hommes-là, imprimeurs, éditeurs, érudits, je crois bien que Reverdin était l'un de ceux au monde à le connaître le mieux.

     

     

    Olivier Reverdin ne professait pas, il racontait. Chacun de ses cours était une succession d’histoires et d’anecdotes. Le fil du discours (mais y avait-il un discours ?) constamment interrompu pour la fraîcheur bienvenue de la digression. La Grèce et ses mœurs, la vie diplomatique, l’exode de 1940, l’Italie des années 43-45, l’Ecole française d’Athènes, son voyage à pied en Turquie dans l’adolescence, son dernier débat du Conseil des Etats, son souvenir d'enfant sur le jour de l'Armistice du 11 novembre 1918. Nous avions face à nous, à la fois, la diversité de mille vies, et la présence d’un homme unique. Difficile de ne pas en garder un souvenir ému et particulièrement reconnaissant.

     

     

    Pascal Décaillet

     

  • Trop facile, Madame Künzler !

     

    Sur le vif - Lundi 15.07.13 - 08.45h

     

    L'argument le plus irrecevable de Mme Künzler, hier, dans le journal d'Ariane Dayer: en substance, "On m'attaque, parce que je suis une femme".



    Non Madame, désolé, ceux qui vous attaquent mettent en cause votre politique, vos choix dans les domaines de la circulation, votre noire passion pour la congestion et l'immobilité, votre gestion des transports publics, votre rejet viscéral du transport privé, allant jusqu'à faire culpabiliser les automobilistes, alors que le libre choix du mode de transport a été voté par le souverain.



    Ceux qui vous attaquent le font sur ces bases-là. et nulle autre. En aucun cas la question du sexe n'a été abordée. Nous attaquons d'ailleurs tout autant des hommes lorsque leurs politiques nous semblent néfastes à l'intérêt commun, et disons le plus grand bien de femmes. Par exemple, Mmes Keller-Sutter, Emery-Torracinta ou Salerno.



    Désolé, Mme Künzler, mais le petit jeu de la victimisation féministe ne passera pas. Même s'il a dû, infiniment, ravir la rédactrice en chef du Matin dimanche.

     

    Pascal Décaillet