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  • Ecône : non merci

     

    (Je republie ici une chronique parue le 8 février 2009 dans le Matin dimanche. Je la dédie à l'abbé Yannick-Marie Escher, passé brutalement de Saint-Maurice à Ecône (un autre Matin dimanche, celui d'aujourd'hui, nous l'apprend). Je regrette infiniment sa décision, car le chanoine Escher, que j'ai l'honneur de connaître et avec qui il m'arrive de correspondre, est un homme d'une valeur spirituelle et intellectuelle, mais aussi d'une richesse de contact, au-dessus de la mêlée. Ce sont précisément le monde des vivants, celui des élèves, de l'éducation qui ont besoin de gens comme lui. Plutôt que quelque forteresse figée dans la nostalgie.)

     

    Ecône: non merci

     

    Le Matin dimanche, 8 février 2009.

     

    Je suis catholique, j’ai aimé Jean-Paul II, le chemin de déraison de cet homme contre l’implacable mathématique du néant. Catholique, mais aussi républicain, ce qui est parfaitement compatible, seuls quelques théocrates prétendent le contraire. D’où mon problème, depuis toujours, avec certains milieux – je ne parle pas des fidèles de base – liés à la mouvance d’Ecône.

     

    Le problème des intégristes n’est en aucun cas le latin. Psalmodiée, cette langue est magnifique. De sa braise, elle illumine les âmes. Et, pour ma part, que l’officiant regarde l’assemblée ou lui tourne le dos, il me semble qu’il est, sur cette terre, d’autres urgences à trancher. Donc, liturgiquement, j’ai toujours été pour qu’on laisse en paix les gens d’Ecône.

     

    Non, le vrai problème n’est pas là. Il est à défricher dans l’humus et le terroir où s’enracinent les références politiques de ce mouvement. Et là, je veux bien que le père de Mgr Lefèbvre ait été résistant, ce que me signale mon ami Vincent Pellegrini, je dois tout de même citer ici la « messe de Lille », du 29 août 1976, où l’éminent prélat affirme « qu’on ne peut dialoguer ni avec les francs-maçons, ni avec les communistes, car on ne dialogue pas avec le diable ». Bon. Voilà. C’est clair. On sait à quelle France on a affaire.

     

    Il ne s’agit pas ici de la fleur de lys. Ni même de la contestation du legs révolutionnaire : d’éminents penseurs s’en firent les chantres. Non. Il s’agit juste de rappeler aux jeunes générations à quoi cette idéologie-là, lorsque la pire défaite de l’Histoire de France, pour quatre ans, la porta au pouvoir, conduisit. Et là, je persiste et signe : in fine de cette mouvance-là, il y eut Drancy, et la déportation. Dire cela, je le sais, choque les fidèles d’Ecône d’aujourd’hui. Eh bien tant pis, choquons-les. S’ils pouvaient parfois, entre deux missels, ouvrir un livre d’Histoire, nous pourrions un jour, peut-être, recommencer à discuter.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Les voyous de la voyelle

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    Sur le vif - Vendredi 02.07.10 - 17.08h

     

    On savait Jean-Pierre Jobin, président de Genève Tourisme, gaga des logos. La dernière nouvelle, fracassante, tombée (mâtin, quelle chute !) sur les téléscripteurs, confirme. Tenez-vous bien, ça déménage, fasten your belt, no smoking, âmes sensibles s’abstenir : « Genève Tourisme & Bureau des Congrès » s’appellera désormais, après dévastateur remue-méninges, « Genève Tourisme & Congrès » !!!

     

    Ca vous en bouche un coin, hein ? Eh oui, Sire, une Révolution. Une nouvelle ère, de ce jour et de ce lieu. Une de ces nouvelles qui s’en viennent miroiter dans vos prunelles incrédules comme mille moulins de Valmy. Manhattan et le poudreux oubli de ses plus hautes tours. Hiroshima. Oui, mon amour : Hiroshima.

     

    J’ai toujours pensé que Jean-Pierre Jobin était un être atomique. Entendez inséparable. De lui-même. Inimitable dans l’art de mettre des points sur les i, comme dans celui de coter en bourse chaque chips d’un apéro de départ. Tenez, le communiqué de Genève Tourisme (y Congressos, señores) précise que désormais, le nouveau logo « met en exergue le « i » de Tourisme ».

     

    Tu vois, ami lecteur, c’est là qu’on voit qu’on est des rigolos, toi et moi. Ce génie rimbaldien de la voyelle, ponctuée jusqu’au plus extrême Finistère de la jouissance littorale. Là où l’Amère, sur le sable, viendrait doucement mourir. Des génies comme ça, ça vaut des millions.

     

    Bon, je vous laisse. J’ai un petit apéro de départ. Je suis responsable de peindre en rouge la lettre « Y ». Coincée entre le bleu immaculé de deux « O ». Non, je n’ai pas dit « comme dans VOYOU »… Non, non, je n’ai rien dit du tout. D’ailleurs, je m’en vais.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Les Neuf Cavaliers de l’Apocalypse

     

     

    Sur le vif - Jeudi 01.07.10 - 14.22h

     

    Les Verts de la Ville de Genève sont des gens particulièrement aimables et attachants. Moins doctrinaires que leurs cousins socialistes, adeptes du vélo et de la plus grande douceur dans la mobilité, admiratifs du legs (en effet hors normes…) de leur magistrat Patrice Mugny, ils sont dans une phase de développement tellement durable qu’ils viennent d’annoncer neuf candidats à l’exécutif de la Ville !

     

    Vous m’avez bien entendu : neuf. Trois fois la Trinité. En sachant que le gouvernement de la Ville de Genève compte, en tout et pour tout, cinq personnes. Dont Manuel Tornare. Donc, au final, en effet neuf, suis-je bête.

     

    Bon, ce ne sont là que des candidats à la candidature, on se réjouit de l’écrémage interne, on se dit juste que ce dernier aurait pu déjà commencer en amont d’aujourd’hui, parce que neuf, ça donne tout de même un peu l’impression qu’on n’a pas trop osé faire le boulot préliminaire.

     

    Alors, va pour neuf ! Pour la liste, je vous renvoie à la Feuille d’Avis officielle, que vous pouvez vous procurer gratuitement avec un verre d’eau. Disons qu’elle va des charmes de la Guinée Conakry à la présidence de la Constituante, en passant par le Jardin botanique, la réparation de vélocipèdes, le cabinet noir du ministre hors normes, la présidence du Municipal, sans oublier la grâce – toujours féline – de l’anonymat.

     

    On se dit simplement que les Verts auraient pu aller plus loin. Pourquoi pas dix-huit ? Ou alors trente-six. Ou mieux : tous candidats. Tous sur les listes électorales. On aurait juste sacrifié quelques tilleuls ou platanes (de Carl-Vogt, par exemple) pour fabriquer du papier. Mais au moins, on aurait proposé à l’univers le grand œcuménisme du non-choix. Celui qui vient juste après le Grand Soir.

     

    Pascal Décaillet