Sur le vif - Samedi 23.11.24 - 13.10h
J’apprends à l’instant que Marc Bloch ira au Panthéon ! Il semble qu’Emmanuel Macron l’ait annoncé à Strasbourg, à l’occasion du 80ème anniversaire de la Libération de la capitale alsacienne.
Marc Bloch au Panthéon, c’est une grande et belle nouvelle. J’ai lu au moins cent livres sur les six semaines comprises entre le 10 mai et le 22 juin 1940. La défaite de la France. La plus grande défaite de son Histoire. Militaire, mais tellement au-delà d’un simple revers des armes ! Défaite morale ! Défaite existentielle. Chute vertigineuse.
Sur ces cent livres que j’ai lus, en français comme en allemand, « L’étrange défaite », de Marc Bloch, est le meilleur. Il est un diagnostic impitoyable, de l’intérieur (Marc Bloch, 54 ans, vétéran décoré de la Grande Guerre, était officier d’état-major dans une division), de la désorganisation du commandement français, face à la plus foudroyante offensive de l’Histoire militaire. Le courage des soldats français n’est absolument pas en cause. Mais la déroute des élites !
Marc Bloch. Cet homme d’exception, grand historien, fondateur de l’Ecole des Annales avec Lucien Febvre au début des années vingt, officier des deux guerres, patriote, sera assassiné par la Gestapo le 16 juin 1944.
« L’étrange défaite », l’un de mes livres de chevet depuis quatre décennies, est un chef d’œuvre. Il devrait être lecture obligatoire dans toutes les écoles. Sa rigueur d’analyse, sa puissance de lucidité, rappellent les passages les plus pénétrants de Thucydide, il y a 25 siècles, dans sa Guerre du Péloponnèse.
Pascal Décaillet
Commentaires
Je lisais ce matin le grand poème "La Liberté" qui figure parmi les Odes et Ballades de Victor Hugo, et me remémorait quelques entrées récentes au Panthéon qui me semblaient bien cadrer avec ces quelques vers: "La dépouille de Rome ornait l'impure idole. Le vautour remplaçait l'aigle à son Capitole. L'enfer peuplait son Panthéon." Belle surprise, dès lors, que de lire quelques heures plus tard que Marc Bloch allait, justement, entrer au Panthéon. Il serait si intéressant de l'entendre au sujet de notre époque. À moins qu'il n'ait déjà tout dit. "Le proche passé est pour l'homme moyen un commode écran. Il lui cache les lointains de l'histoire et leurs tragiques possibilités de renouvellement." L'étrange défaite fait partie des quelques livres que j'ai lus plus de dix fois, et donc la lecture est toujours en cours.
L'Histoire, la langue, la liberté de penser et de parler, la puissance de l'écriture, l'identité d'un peuple, le patriotisme, tout ce que le pouvoir wokiste doit absolument détruire. Qui d'intelligent et de cultivé a bien pu mettre cela dans la tête du Président ?