Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

DIP : radicaux, réveillez-vous !

 

Sur le vif - Lundi 15.12.14 - 12.50h

 

Il existait naguère à Genève un grand et vieux parti, grogneur et grognard, bonapartiste dans le tréfonds, férocement républicain, passionné d’institutions. Le parti de James Fazy. Ils s’appelaient les radicaux, je les admirais, plus encore à Genève qu’au niveau suisse, parce que là, il fallait tout de même compter avec la Bahnhofstrasse, qui n’était pas exactement ma tasse de thé. Hier soir encore, entre 18.45h et 19h, en écoutant Gilles Petitpierre (que j’ai tant interviewé dans mes années bernoises) à la RSR, je me disais qu’il lui restait peut-être, à ce parti, quelques fragments d’âme. Mais peut-être n’était-ce là, comme dans la légende du Cid, qu’un cadavre encore habillé en guerrier. L’illusion d’une survivance.

 

Oui, j’ai aimé à Genève ce parti de grenadiers, parce qu’il était profondément populaire, sentait la soupe et le cassoulet, avait érigé les barricades de Saint-Gervais, donné au canton ses institutions modernes, renvoyé le patricien à la rue des Granges, démoli les barricades, encouragé la petite entreprise. Ils avaient en eux la fureur victorieuse de la République. Ils avaient aussi tant œuvré pour l’école, de la fondation de l’Université à celle du Cycle d’Orientation, dont on oublie parfois que le vrai père est le radical Alfred Borel. Il y a eu, chez ces radicaux historiques, les Ducret et les Segond, et je l’espère encore chez les deux magistrats d’aujourd’hui, comme un attachement viscéral à l’idée même de l’Etat, non comme superstructure mais comme théâtre, le seul qui puisse valoir, de la mise en forme de notre destin commun.

 

Aujourd’hui, cette âme radicale, où est-elle ? A l’heure où le PLR, improbable produit de la fusion du grognard avec le patricien, brandit le sécateur pour couper dans la formation, où sont-elles, les voix radicales qui, au nom d’une certaine idée de l’Etat, de l’École, viendraient publiquement afficher leur désaccord ? Car dans l’affaire de ces coupes, on joue avec le feu avec une légèreté qui bafoue toute la part du symbole que peut revêtir l’acte politique : on les met en balance avec la question de l’annuité. Et c’est à celui, en fin de semaine en plénum, qui, comme dans les Comices agricoles, saura se montrer le plus maquignon, le plus retors, le plus vicelard dans la tactique parlementaire.

 

Pour ma part, je déteste cela. Je n’aime pas ces manières. On peut m’aligner tous les chiffres que l’on veut, me démontrer toute la prétendue impossibilité de mélanger des lignes budgétaires, bref, me jeter aux yeux toute la poudre qu’on voudra, on ne parviendra pas à me convaincre que, dans cette vulgaire démonstration de force de la droite libérale, l’âme républicaine et guerrière des radicaux serait là, alignée, comme un seul homme. Affidée. Obédiente. Sans la moindre amertume ? Sans la moindre colère ? Sans la moindre révolte ?

 

Si l'aile radicale, sur ce coup, ne donne pas signe de vie ou de réveil, alors oui - et c'est là l'un des enjeux cryptés de toute l'affaire - l'aile libérale, avec le soutien de quelques gueux convertis à la ploutocratie, aura, pour longtemps, marqué des points, pris le pouvoir à l'interne. Il y a là, au sein même de la droite genevoise, une tonalité de législature que, pour ma part, je ne souhaite pas à notre République.

 

Pascal Décaillet

 

Les commentaires sont fermés.