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Monsieur X doit-il provenir du sérail fédéral ?

Dimanche 09.08.09 - 11.20h

De quoi s’agit-il, le 16 septembre ? D’élire l’un des sept membres du Conseil fédéral. Qui viendra se greffer, par le caprice d’une vacance en cours de législature, sur les six restants. En attendant deux autres départs bien possibles avant l’automne 2011, donc deux autres arrivants, et vogue la galère, et que se perpétue ce jeu de bric et de broc, où le hasard forme les équipes, les rafistole en cours de route, où nulle cohérence ne règne, où l’on écope avec des seaux, parce qu’il commence gentiment à prendre l’eau, le frêle esquif. Tout le théâtre de cet été, où les grands acteurs attendent la fin du cinquième acte pour entrer en scène, aura au moins servi à illustrer la nécessité de changer de système. Ce qui devra bien advenir une fois. Disons, dans dix mille ans.

En attendant ce jour, une question : Monsieur X ou Madame Y doivent-ils, à tout prix, être des parlementaires fédéraux ? Réponse : bien sûr que non ! Selon la Constitution, tout citoyen suisse ayant le droit de vote peut devenir conseiller fédéral. Soit quelque quatre millions de personnes. À cet égard, il est bien étrange, et bien révélateur de la nature parlementaire de notre régime, que l’instance suprême de désignation des candidats soient les groupes parlementaires. Les groupes, et non les partis politiques, qui représentent tout de même, par le mécanisme de leurs assemblées générales (on pourrait même imaginer une consultation de la base), un éventail beaucoup plus large. Cette perversité du système, cette hypertrophie de la caste parlementaire, donne non seulement au collège des 246 le pouvoir d’élire les conseillers fédéraux, mais, en amont de cela, celui, aussi, de désigner lui-même ceux parmi lesquels il devra choisir ! Aucun pays au monde, à ma connaissance, ne délègue à ses parlementaires autant de puissance.

Conséquence 1 : un théâtre d’opérations à huis clos. Une dramaturgie en cercle fermé. Il ne s’agit en aucun cas de convaincre quatre millions d’électeurs, mais juste 124. Donc, point trop besoin d’arriver avec de puissants programmes de gouvernement, des axes de cohérence, des engagements mendésistes face à l’opinion publique. Non, juste décrocher, le jour venu, à l’issue d’ultimes conciliabules et pronunciamientos, 124 voix. C’est cela, l’actuel système suisse d’élection au Conseil fédéral.

Conséquence 2 : nécessairement, dans un tel système, l’amicale des grands électeurs aura tendance, plus ou moins consciemment, à se co-opter elle-même. C’est qu’on se connaît, dans ce petit monde, où la buvette est reine, le tutoiement de règle, les promesses de postes faciles. Là aussi, nous touchons à une limite : on se co-optera, on s’adoubera à l’interne, on se distribuera les onctions, et pendant, ce temps, on laissera de côté les forces vives du pays qui n’appartiendraient pas au Cercle.

C’est cela, le régime parlementaire. C’était cela, la Quatrième République. Longtemps, en Suisse, il faut reconnaître que ce système a plutôt bien fonctionné. Aujourd’hui, par le théâtre d’été qu’il offre lui-même, il étale ses limites et ses insuffisances. Changer, oui. Dans dix mille ans.

Pascal Décaillet

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