Sur le vif - Lundi 15.01.24 - 10.19h
Pour aimer Davos, pour s'y sentir chez soi, il faut être un ami des Etats-Unis. Il faut croire - ou tout au moins le feindre - à la toile multilatérale, façon SDN (dont les résultats, comme on sait, furent particulièrement probants). Il faut aduler le libéralisme, jusqu'à son versant Veau d'or. Il faut, impérativement, parler anglais, la langue du dominant.
Il faut embrasser la vision hégémonique de "l'Otan", entendez les suppôts de l'Oncle Sam, depuis la chute du Mur. Il faut applaudir à l'extension à l'Est, depuis plus de trente ans, de cette organisation militaire. Il faut une réserve de costumes, ou de robes longues. Il faut vouer un culte à l'homme de Kiev, venu dans les Grisons comme d'autres vont au bancomat.
Davos, c'est le relais cinq étoiles de la domination capitaliste mondiale, dans sa version américaine. Un ministre suisse des Affaires étrangères, totalement dévoué à l'atlantisme, ne connaissant rien, par exemple, au monde arabe, y parle de "paix en Ukraine", en omettant juste d'inviter la Russie. Ce ministre veut simplement dorer son blason à l'intérieur. Et ça marche : toute une presse obédiente, par cohortes, lui emboîte le bas, sonne déjà le succès des "démarches" avant même qu'elles ne fussent amorcées.
Il fut un temps, pour qui sait lire, où le passage dans les Grisons relevait de le plus haute posture littéraire, celle d'un Thomas Mann avec son Zauberberg, mais aussi musicale, philosophique. Aujourd'hui, Davos est une île aux pingouins, entre eux, avec juste une presse complice. Feindre de voir le monde, dans un palais des glaces : la montagne, hélas, a perdu sa magie.
Pascal Décaillet