Liberté - Page 395
-
L'amour partagé du sens et de la langue
Sur le vif - Mercredi 05.05.21 - 16.06hJ'ai toujours été opposé à l'idée de coller des images sur des mots. Comme dans certaines méthodes scolaires d'enseignement des langues, niaises et méprisantes pour la capacité d'abstraction de l'élève.Un mot est un mot. A lui-même, il se suffit. Par son simple énoncé, sonore ou écrit, il porte le sens. Si j'écris "éléphant", vous voyez immédiatement l'animal, dans votre cerveau. Nul besoin pour moi, à moins de vous prendre pour de parfaits demeurés, d'en dessiner un, juste en face du mot, pour être sûr que vous ayez saisi.De même, j'ai toujours méprisé l'usage des rétroprojecteurs. J'ignore s'il en existe encore, mais il fut un temps, années 80, 90, où tout locuteur, devant une assistance, se croyait obligé de soutenir son discours par le plan de ce dernier, doucement dévoilé au fil des mots, parce qu'on tient caché ce qui va suivre. Ca s'appelle prendre les gens pour des cons.Or, les gens ne sont pas cons. Si vous les regardez en face, dans les yeux, en vous tenant debout, si vous parlez d'une belle voix, claire et posée, avec des syllabes articulées, du rythme, des silences, de la conviction, rassurez-vous : le message passera. Et vous n'aurez besoin de nul autre support que celui de votre éloquence.Il ne s'agit pas d'effets d'orateurs. Non. Juste parler. Vouloir convaincre, ou expliquer. Utiliser sa voix, ses cordes, son sourire, son humour, créer une complicité avec l'auditeur. Rien de plus. Ni Démosthène, ni Cicéron, ni Bossuet. Non, juste un humain qui s'adresse à d'autres humains. Dans l'amour partagé du sens et de la langue.Pascal DécailletLien permanent Catégories : Sur le vif -
Loi CO2 : le Conseil d'Etat est pour. Et alors ?
Sur le vif - Mercredi 05.05.21 - 15.21h"Le canton apporte pleinement son soutien à la loi sur le CO2 dans la perspective de la votation populaire du 13 juin 2021". A quoi rime cette prise de position, publiée à l'instant dans le communiqué hebdomadaire du gouvernement ?La loi CO2 est une affaire fédérale. Les citoyennes et citoyens du Canton de Genève s'exprimeront sur cet objet à hauteur des intérêts supérieurs de l'ensemble du pays. Ils voteront oui. Ou ils voteront non. Chacun est libre. Nul besoin que le Canton où ils résident vienne en rajouter une couche, en tentant d'influencer leur vote.Citoyen, je n'aime pas ces procédés. Où on se camoufle sous l'officialité d'un communiqué pour balancer une propagande idéologique.Pascal DécailletLien permanent Catégories : Sur le vif -
Prends la plume, et exprime-toi !
Commentaire publié dans GHI - Mercredi 05.05.21
Dans cette page, depuis une dizaine d’années, j’écris des textes, qui sont des commentaires politiques, et je les signe. On aime, on n’aime pas, on est d’accord, on s’oppose, peu importe ! C’est mon avis à moi, je l’assume, et c’est ainsi. Et chacun d’entre nous peut, notamment grâce au système des réseaux sociaux, publier un texte, sur ce qu’il veut, l’éditer, le titrer, le signer. N’importe lequel d’entre nous peut exprimer son opinion, et avoir un sacré nombre de lecteurs. Il y a encore vingt ans, une telle démocratisation de l’expression n’était pas possible : tout au plus certains lecteurs de journaux, motivés et studieux, devaient-ils prendre la peine d’adresser une lettre au courrier des lecteurs, sans garantie d’être publié, ni d’échapper aux coupes dans leur texte. Ce préambule, juste pour dire que non, tout n’était pas mieux avant. Oui, la modernité a du bon !
J’ai souvent dit, ici, le plus grand bien des réseaux sociaux, et je l’assume. Ne vous laissez pas trop enfumer par les appels à la méfiance des intellectuels, des universitaires, des éditeurs, des journalistes, des professeurs : à la vérité, tout ce petit monde sent le sol se dérober sous ses pieds. D’autres qu’eux transmettent le savoir, les connaissances. D’autres donnent des informations originales, exactes, vérifiées, d’intérêt public, toutes vertus qui ne sont pas l’apanage des seuls journalistes. D’autres font vivre le débat. D’autres creusent des sujets, avec la même rigueur que ceux qui écrivent des livres. D’autres savent capter leur public, lui raconter des histoires, le faire rire, le détendre. Bref, la vie, sous toutes ses facettes. Pourquoi faudrait-il s’en plaindre ?
Bref, pour ceux d’entre nous qui ont des choses à dire, et souhaitent les partager, il n’y a strictement plus aucune excuse, en mai 2021, pour y renoncer, sous prétexte qu’on ne connaît pas d’éditeur. Il faut se lancer là où les gens aujourd’hui s’expriment, échangent, s’engueulent : cela s’appelle les réseaux sociaux. Vous pouvez les bouder tant que vous voulez, les prendre de haut, rien n’y fera : ils sont là, ils sont le lieu d’expression du plus grand nombre. Maintenant, si votre fantasme absolu est d’être publié, dès votre premier texte, dans la Nouvelle Revue Française, et de décrocher immédiatement le Goncourt, libre à vous. Chacun ses choix, chacun son chemin. Pour ma part, j’écris pour tous. Enfin, tous ceux qui veulent bien me faire l’amitié de me lire.
J’ajoute une chose, importante : si le démon d’écrire vous tarabuste, ne perdez pas votre temps, comme beaucoup trop le font, à vous répandre dans des commentaires, ni dans d’interminables débats, sous le texte principal rédigé par un tiers. Au contraire, soyez le tiers ! Soyez, vous, l’auteur du texte principal ! Soyez celui par qui le mal arrive, ou peut-être le bien suprême, soyez l’initiateur de la querelle ! Chacun de nous en a le droit. Il n’y a pas d’un côté l’élite des auteurs, de l’autre la troupe des lecteurs. Chacun de nous peut être auteur. A vos plumes, et excellente semaine !
Pascal Décaillet
Lien permanent Catégories : Commentaires GHI