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Liberté - Page 1351

  • Une nouvelle tâche régalienne de l’Etat : posséder des dancings

     

    Sur le vif - Jeudi 18.11.10 - 17.02h

     

    En cet automne qui nous honore de sa clémence, le Conseil d’Etat genevois nous réserve presque chaque jour une rafraîchissante surprise. Aujourd’hui, il nous annonce donc qu’il veut acheter le Moa. Singulière perspective, inattendue, surtout pour qui se passionne, de Philippe le Bel à Carnot, en passant par Louis XI, Colbert et Louvois, pour l’étude de ce qui constitue les tâches régaliennes de l’Etat.

     

    Sur ces missions, en 2010, nous sommes tous à peu près d’accord : l’Etat doit s’occuper de sécurité, de santé, d’éducation, de grands chantiers d’infrastructures. J’en oublie sûrement, mais je ne susse pas qu’il appartînt aux collectivités publiques, fussent-elles dévoyées par le désir torréfié du cocktail et de la pampa, d’acquérir un dancing.

     

    Voilà donc une nouvelle tâche, on se réjouit qu’on puisse immédiatement trouver à cet effet 14 millions qu’on refusera à d’autres affectations, nouveaux postes dans l’enseignement secondaire, crèches, effectifs de police, et autres menus détails évidemment insignifiants face à la puissance du Pain et des Jeux, quand se lovent les corps et se tétanise la pêche à l’électeur.

     

    Autre élément salé : vous avez des problèmes de sécurité, le maelström d’une candidature passe par là, avec ses quarantièmes rugissants et mille tempêtes andines pour vous soulever l’âme, eh bien voilà qu’un deus ex machina appelé « Etat » vient vous tirer d’affaire. « Ne vous en faites pas, j’arrange tout ».

     

    Belle folie, à vrai dire, où l’univers de Quinte-Curce se pare du filet du rétiaire et des chants moirés de l’histrion. Peut-être, dans son mouvement vers le monde des sens et du désir, le gouvernement de la République genevoise pourrait-il songer à l’acquisition de ces lieux où suinte l’extase et donc Claudel a dit qu’il existait, pour cela, des maisons.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

  • Le Moa rachète le Conseil d’Etat ?

     

    Sur le vif - Jeudi 18.11.10 - 12.07h

     

    L’une des nouvelles les plus hallucinantes d’une année 2010 qui n’en aura pas été avare à Genève : le Conseil d’Etat rachète le Moa ! Il veut acquérir, avec 14 millions de l’argent des contribuables, le terrain de ce dancing. Nous reviendrons dans l’après-midi sur la dérive que représente une telle acquisition de la part d’un Etat, une notion à laquelle nous voulons croire, comme garante de l’intérêt public, l’intérêt de tous.

     

    Pour l’heure, contentons-nous d’une question : est-ce, bel et bien, le Conseil d’Etat qui achète le Moa ? Ou n’est-ce pas, peut-être, le contraire ? Question posée avec le sourire, of course, allez disons juste pour taquiner. Juste une histoire d’actif et de passif, de complément d’agent placé à l’envers. Rien de grave, juste la vie qui va.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Le lait, le miel

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Jeudi 18.11.10

     

    Papy Moustache est un homme sympathique. Et il le sait. Alors, il lui arrive parfois de forcer un peu sur le Papy, et le lendemain sur la moustache. Et le plus fou, c’est que ça marche : Jean-Charles Rielle est un homme populaire. D’une popularité qui fait même rêver le pays de Canaan, où coulent pourtant le lait et le miel.

     

    Papy Moustache, donc, est sympathique, populaire et charismatique. Et il a un sixième sens pour les sujets compassionnels. Gaza, l’affaire Selimi, l’affaire Rappaz. Non qu’il ait tort, loin de là, mais quel instinct ! Un pif gros comme ça pour humer le thème, quelque part entre vie et mort, exil et royaume, qui tirera les larmes dans les chaumières.

     

    Face à lui, un jeune homme de 26 ans qui croit en la loi et en l’Etat, des archaïsmes pas très vendeurs. Il s’appelle Philippe Nantermod, il ne craint ni la solitude, ni l’adversité, ni de passer pour un ringard. Il dit, simplement, ce qu’il croit juste. Et il a du courage. Et il ira loin.

     

    Quant à Papy Moustache, on se réjouit de l’entendre aussi, à l’avenir, sur quelques bons sujets bien austères de la vie fédérale, tiens la péréquation, par exemple. Un truc sans lait, ni miel, ni larmes. Juste la dignité d’Etat, sèche et roide, austère. Drue, comme l’extrême Finistère d’une moustache, par un matin de vent glacé.

     

    Pascal Décaillet