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  • Gauche française : on se calme un peu !

     
    Sur le vif - Mardi 09.07.24 - 16.26h
     
     
    En quel honneur "impose-t-on" au Président de la République française un Premier ministre ? D'où sort cette aberration ? De quel esprit égocentrique a-t-elle été engendrée ?
     
    La gauche française crie victoire depuis dimanche soir. Elle n'a rien gagné du tout. Le premier parti au Palais-Bourbon est le RN. Le "Front populaire" n'est qu'une coalition. Au sein de laquelle l'amour du prochain ne flambe guère comme une vertu première.
     
    Alors oui, cette coalition est arrivée première. Mais elle n'a pas la majorité absolue, personne ne l'a ! Constitutionnellement, le Président de la République choisit qui il veut comme locataire de Matignon. Après une élection, il est d'usage qu'il choisisse dans la majorité gagnante, mais IL N'Y A PAS DE MAJORITÉ !
     
    Alors, quoi ? Alors, on se calme un peu ! Il faut laisser cette Assemblée se constituer (eh oui, comme aux premiers mois de la Révolution), dessiner d'éventuelles alliances, et on y verra plus clair. Ces alliances pourront inclure la gauche, mais elles peuvent tout autant l'exclure. Surtout, s'il choisit le Premier ministre à gauche, le Président n'est nullement tenu de le prendre dans la France insoumise : le PS, par exemple, en pleine phase de reconstruction, pourrait offrir un chef du gouvernement à la France.
     
    Dans tous les cas, une chose est sûre : sous la Cinquième, le Président seul choisit le Premier ministre. Nul n'a à lui dicter son choix. Et entendre les Insoumis hurler, à longueur de journées : "Nous allons désigner, d'ici la fin de la semaine, le futur Premier ministre", relève de la farce la plus sinistre. Et en dit long sur ces gens, leurs appétits dictatoriaux, au sein même d'une gauche dont ils n'ont en aucun cas le monopole.
     
    Peut-être, dans l'étourdissement de leur résultat de dimanche, ces hallucinés du Grand Soir confondent-ils la République française avec un Soviet local, dans une République des Conseils, où la Concorde aurait repris son ancien nom, "Place de Grève". Et réinstallé la joyeuse machine qui fonctionnait, lorsque les dieux avaient si soif, à plein régime.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Et si le problème, c'était un peu vous, M. Bardella ?

     
    Sur le vif - Mardi 09.07.24 - 11.03h
     
     
    Non, M. Bardella, votre défaite n'est absolument pas due aux quelques "erreurs de casting" (bien réelles, certes), dans le choix de vos candidats, dans certaines circonscriptions. Ces erreurs vous auront peut-être fait perdre quelques sièges, mais elles ne sauraient expliquer la contre-performance de votre parti, au deuxième tour. Les vraies raisons qui comptent, les voici.
     
    La première, vous n'y pouvez rien, c'est le système majoritaire à deux tours. Il lamine les puissances montantes, portées par des masses croissantes d'électeurs, dès qu'elles font peur au pouvoir en place. Je me suis déjà exprimé sur le sujet, je n'y reviens pas.
     
    Mais il y a une autre raison, M. Bardella, et cette raison c'est vous. Vous, Jordan, et pas Mme Le Pen. Vous êtes certes brillant, beau parleur à souhait, gendre idéal, tiré à quatre épingles, comme le bourgeois du parti le plus classique, bref vous passez formidablement à l'antenne. Je vous reconnais ces qualités d'intelligence, ainsi qu'une indéniable énergie. Vous êtes un combattant politique de premier plan.
     
    Mais tout talent a ses limites. Vous êtes froid, M. Bardella, cérébral à souhait, vous ressemblez à un jeune cadre ultra-libéral qui aurait pu être dans l'aile orléaniste du Parti Républicain. Les jeunes vous adorent, tant mieux pour vous, mais je crois que pas mal de Français, y compris dans vos rangs idéologiques, ont besoin qu'on leur parle avec un peu de chaleur populaire, de coeur, d'empathie réelle, de sourire, d'humour, de bonne humeur. Peut-être ces qualités-là ont elles encore, chez vous, une certaine de marge de progression, avant que d'affleurer dans le coeur des gens.
     
    Bref, j'admire en vous d'éminentes qualités, je partage pas mal de vos valeurs sur la souveraineté, la régulation des flux migratoires, le respect des paysans et des ouvriers. Mais de grâce, pourquoi mimez-vous à ce point la haute bourgeoisie dominatrice ? Vous cherchez d'ailleurs trop leurs voix, vous éloignant ainsi d'un fumet populaire qui est la force de votre parti.
     
    En comparaison de ces choses-là, qui vous impliquent directement, les quelques "erreurs de casting", avec deux ou trois cinglés mal ciblés dans telle ou telle circonscription, représentent assurément peu de choses. Il ne faudrait pas que vous donniez l'impression, en les citant sans cesse dans le débriefing de la campagne, que vous passez au deuxième plan votre propre responsabilité (vous l'avez certes reconnue), comme chef, au plus haut niveau de cette campagne.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Vous m'avez ému, M. Attal, vous m'avez conquis !

     
    Sur le vif - Lundi 08.07.24 - 17.15h
     
     
    En politique, il faut savoir se laisser surprendre. Ainsi, Gabriel Attal. Ce jeune Premier ministre, qui pourrait être mon fils, je l'ai longtemps (lorsqu'il était porte-parole du gouvernement) considéré comme un porte-serviette d'Emmanuel Macron. Le moins qu'on puisse dire, c'est que je me suis trompé.
     
    Je dirais même que, dans cette campagne de cinglés, imposée d'en haut par un Jupiter en folie, le locataire de Matignon a révélé des qualités que je n'aurais jamais soupçonnées. Hier soir encore, lors de son discours, où il s'est clairement affranchi du Président, j'ai été ébloui par la sobriété, la justesse, de ses propos. Je n'exagère pas : à mesure que s'écoulaient les paroles du jeune homme, ma gorge s'est nouée, une émotion m'a saisi, j'ai pensé au plus brillant occupant de Matignon depuis la guerre : Pierre Mendès France (18 juin 54 - 9 février 55).
     
    "Cette dissolution, je ne l'ai pas choisie, je n'ai pas voulu pour autant la subir" (je cite de mémoire) : voilà un jeune Premier ministre précipité dans une campagne législative totalement prématurée, il relève le défi, il s'y jette, il est partout, il fait campagne comme jamais. Au milieu d'un océan d'insultes, où le pays s'embrase comme au temps des Guerres de Religion, voilà un jeune homme qui garde son calme, demeure souriant, respectueux, tente de convaincre avec des arguments. Au fil des jours, voyant ces images sur les chaînes TV, mon avis sur cet homme a radicalement changé.
     
    Hier soir, autant l'avouer, j'ai aussi pensé à Henri de Navarre, lorsqu'il entre dans Paris, ce 22 mars 1594, passe le Pont-Neuf, réconcilie les Français déchirés comme jamais, l'un des plus beaux actes de l'Histoire de France.
     
    Je pousse un peu la comparaison ? Oui, bien sûr. Mais ce jeune Premier ministre, sans doute sur le départ, dont je ne partage que très peu d'idées, a montré, pendant cette campagne, les qualités d'un homme d'Etat.
     
    Je n'exclus pas que nous ayons, dans les temps qui viennent, à reparler de Monsieur Gabriel Attal.
     
     
    Pascal Décaillet