Sur le vif - Mardi 27.06.23 - 08.28h
Ouvrir les portes, toutes grandes. C'est le message, totalement délirant et indécent, délivré hier par le grand patronat suisse. Sous prétexte que notre pays a besoin de "main d’œuvre" (depuis l'enfance et les débats sur l'initiative Schwarzenbach, 1970, je déteste cette expression), il faudrait ouvrir les vannes d'une immigration massive.
Folie. Irresponsabilité. Absence totale de sens politique, de considération pour l'intérêt commun, pour la colère rentrée des Suisses les plus précaires, ceux qui justement n'ont pas de boulot, et qui voient les frontières s'ouvrir pour accueillir de la "main d’œuvre". Eux, les plus démunis, la frontière les protège. L'abolition de la frontière précipite leur perte. Et le grand patronat qui ose venir exiger des centaines de milliers d'immigrants en plus !
Le grand patronat bafoue la Constitution. Il gifle et méprise le peuple et les Cantons qui, le 9 février 2014, y ont inscrit, noir sur blanc, le principe d'une régulation draconienne des flux migratoires. Principe bafoué par le Parlement, qui a tout entrepris pour ne pas l'appliquer. L'un des grands scandales de ces dernières années. La trahison des élites. La trahison des clercs. La trahison de la démocratie représentative face au peuple souverain.
Les flux migratoires, déjà surabondants, sont l'une des préoccupations majeures du peuple suisse. Du peuple, mais pas des journalistes : l'écrasante majorité des médias suisses, obsédés par les sirènes du climat, rejettent le thème migratoire sous le tapis. Mais de partout, le thème remonte. Allez discuter avec les Suisses les moins nantis. Les chômeurs. Les oubliés. Vous n'y entendrez jamais parler de climat. Mais de migrations, oui.
Pénurie de "main d’œuvre". D'abord, on utilise les bons mots. Celui qui accomplit un travail, à commencer par le plus modeste, est un être humain. Et un être humain en vaut un autre. On ne le définit pas par sa "main", considérée comme outil de travail. Ca, c'est pour l'usage des mots. Et c'est un fils d'entrepreneur, lui-même entrepreneur, qui vous le dit.
Pénurie de "main d’œuvre". On commence par engager les Suisses. Les chômeurs, on les met au boulot. Les assistés qui ont la santé pour bosser, on les met au boulot. On éradique enfin cette hautaine notion de "travail convenable" : "Désolé, j'ai tel diplôme, je suis qualifié pour telles fonctions seulement, je refuse un boulot dégradant par rapport à ma formation" : ces gens-là, cette morgue, cette arrogance, c'est DEHORS, vous m'entendez, DEHORS !
Le grand patronat suisse vient d'afficher une irresponsabilité hors du commun. Une absence totale de vision sociale, humaine, pour notre communauté nationale. Mais cette folie présente au moins un avantage : d'un côté le grand patronat, de l'autre l'UDC, le thème migratoire est réveillé. La hache de guerre, déterrée. On parlera migrations cet automne, à mort, pour la campagne des fédérales. Et on verra bien, le 22 octobre au soir, qui aura le dernier mot.
Pascal Décaillet