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  • Bernhard Böschenstein (1931-2019) : un immense germaniste nous a quittés

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    Sur le vif - Jeudi 24.01.19 - 16.10h

     

    Il est des êtres qui vous marquent plus que d’autres, allez savoir pourquoi. Une histoire d’ondes, ou de fluides, le sentiment surtout de leur devoir beaucoup. Ainsi, Bernhard Böschenstein, qui vient de nous quitter à l’âge de 87 ans. Sans lui, je n’aurais sans doute pas trop entendu parler de Friedrich Hölderlin (1770-1843) ni de Paul Celan (1920-1970), auxquels, il y a si longtemps, il m’avait initié. Sans lui surtout, je n’aurais imaginé l’immensité des liens entre la langue grecque ancienne, celle d’un Eschyle ou d’un Sophocle, et la langue allemande, celle des poètes. J’aurais bien sûr appris ces choses-là, avec d’autres, mais il se trouve que par lui j’y suis entré, par lui j’en ai pris conscience. Au moment où nous quitte ce très grand germaniste, mon sentiment premier est celui, pour la vie, d’une immense reconnaissance.

     

    Né à Berne en 1931, fils du grand journaliste Hermann Böschenstein (1905-1997), avec qui j’ai eu l’honneur de faire une grande émission de radio, en compagnie de mon confrère André Beaud, diffusée à la Pentecôte 1991, Bernhard Böschenstein a vécu sa vie entière dans l’incandescence des textes. A la séance d’information d’octobre 1976, pour les nouveaux, il avait plaidé avec passion pour « tous ces témoignages humains », avec une saisissante force de vie. Il était un littéraire pur, habité par le vers et sa prosodie, il vivait dans la musique des mots, et d’ailleurs aussi dans la musique, tout court.

     

    Il y avait sa prodigieuse érudition, mais elle n’eût rien été sans les incroyables antennes musicales intérieures de cet homme hors de pair, son attente face à la capacité sonore de chaque syllabe. Il en sortait, dans ses Vorlesungen, pour les gamins que nous étions, d’étranges fragments d’obscurité. Ces derniers ne tenaient pas à la langue allemande, qu’il avait accessible, mais à la teneur même de son propos, d’une déroutante exigence, au service du texte. En d’autres termes, il nous arrivait bien souvent, face à ce professeur aussi lunaire que fascinant, de nous sentir largués. Et je crois aujourd’hui, au moment où lui nous quitte, que justement cette distance-là éveillait en nous mille sentiments diffus : culpabilité de ne pas tout comprendre, impuissance, et pourtant désir impétueux, un jour futur, de rattraper le chemin qui mènerait jusqu’à la lucidité de ce maître.

     

    Ceux qui ont eu l’honneur, entre 1964 et 1998, de se frotter peu ou prou à l’étincelant discours critique de Bernhard Böschenstein, sur Hölderlin (il avait consacré, en 1958, sa « Dissertation » à la Rheinhymne), sur Paul Celan ou sur Musil, se reconnaîtront peut-être ici. Ce spécialiste du grand poète Stefan George (1868-1933), considérait, comme ce dernier, qu’existait autour de lui un « Cercle », un « Kreis », visible ou invisible, autour d’une passion pour les textes. Il serait pourtant totalement faux de réduire cet homme à la solitude d’une tour d’ivoire : sa vie entière, justement, fut consacrée à la transmission. Exigeante, épuisante, mais tissant des fils que nul ne peut rompre. C’est peut-être cela, face à la vie, face à la mort, face aux chemins qui se séparent, face aux destins qui se font ailleurs, qu’on appelle un « maître ». Un être unique, face à l’inéluctable pluralité du monde.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Les thèmes l'emportent sur les personnes !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 23.01.19

     

    Dans notre politique suisse, nous intervenons, comme dans les autres démocraties qui nous entourent, sur le choix des personnes : ce sont les élections. Exemple : les élections fédérales du dimanche 20 octobre 2019, pour lesquelles les partis aiguisent déjà leurs armes. Mais notre démocratie directe nous permet également de nous prononcer directement, nous les citoyennes et citoyens, sur les thèmes de la politique. Elle nous permet soit de contester une loi votée par le Parlement (référendum), soit, beaucoup mieux, de lancer nous-mêmes, d’en-bas, un grand débat national, avec votation à l’appui, un beau dimanche : cette possibilité, unique au monde, que les Français nous envient tant, est le doit d’initiative.

     

    Exemple : nous votons, le dimanche 10 février 2019, sur l’initiative des Jeunes Verts contre le mitage du territoire. Un débat passionnant, incroyablement concernant pour chacun de nous, pour les générations futures, pour le rapport que nous entendons entretenir à la ville et à la campagne, aux espaces verts, à l’agriculture. Et, finalement, au paysage. Les Jeunes Verts demandent que chaque nouvelle zone à bâtir, dans le pays, soit compensée par l’équivalent (en surface) en retour à la nature. Il s’agit que la ville soit la ville (densifiée, s’il le faut), et que des espaces de campagne soit clairement préservés. Qui d’entre nous n’a jamais pris le train Genève-Lausanne ? Regardons par la fenêtre : le voilà, ce fameux « mitage » du territoire, avec des zones semi-citadines, semi-champêtres, un habitat étalé, dispersé, beaucoup de gaspillage.

     

    Le mois qu’on puisse dire est que l’enjeu est de taille. Eh bien nous n’aurions jamais voté, le 10 février prochain, si à l’origine, un tout petit groupe d’hommes et de femmes motivés, citoyens dans l’âme, en l’occurrence les Jeunes Verts, n’avait décidé de se lancer un jour dans l’aventure – ô combien difficile et périlleuse – de l’initiative populaire fédérale. Grâce à eux, nous allons voter sur un thème majeur pour l’avenir de l’habitat, dans notre pays. Un exemple, parmi des dizaines d’autres depuis 1891 (début de l’initiative populaire fédérale), de la chance que nous avons de nous prononcer directement sur les sujets de la politique. En France (en attendant que les gilets jaunes obtiennent gain de cause sur leurs demandes de nouveaux droits populaires), en Italie, en Allemagne, nos voisins de ces grandes démocraties ne vont aux urnes, sauf rares exceptions, que pour élire des personnes. Du coup, l’engagement citoyen se résume à soutenir ou rejeter des candidats. On les élit pour quatre ou cinq ans, dans des Parlements, et entre deux élections, on leur délègue tout pouvoir de décision.

     

    Eh bien disons-le clairement : nous avons, nous en Suisse, la chance d’avoir un meilleur système. Loin d’être parfait, mais plus ouvert, et plus directement démocratique. Le citoyen n’est pas juste un électeur. Il est un acteur de la vie politique. Saisissons cette chance, et privilégions à fond les thèmes sur les choix des personnes. Vive notre démocratie directe ! Elle est notre grande chance, face à l’Histoire.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Genève : citoyens, debout !

     

    Sur le vif - Mercredi 23.01.19 - 06.27h

     

    Le conciliabule à cinq de dimanche dernier prouve que, même sans son Pierre Noir, le gouvernement genevois est parfaitement capable de déraper.

     

    Si ce pronunciamiento était un caucus de gauche, en vue de préparer un putsch interne pour la plénière d'aujourd'hui, alors qu'y faisait M. Dal Busco ? Cette question mérite réponse.

     

    Un gouvernement à la dérive. Le premier parti du canton, déchiqueté par des ferments de dispersion internes d'une violence inouïe.

     

    Que la classe politique genevoise ne vienne plus prendre ses grands airs pénétrés pour nous faire la leçon sur "les institutions". Ils n'en sont pas les gardiens, mais les déprédateurs.

     

    Nous, les citoyennes et citoyens de ce canton, prenons en mains directement la politique. En utilisant au maximum la démocratie directe. Comme le font les Jeunes Verts, sur le mitage du territoire. Comme le fait le Parti du Travail, sur les soins dentaires. Comme nous y invite si souvent l'UDC, avec ses initiatives.

     

    La démocratie directe suisse n'est pas une éruption d'humeur. Elle est une institution de notre vie politique. À Genève, l'état de déliquescence des corps intermédiaires, vermoulus par la consanguinité, doit nous pousser, plutôt que de passer notre temps à nous lamenter sur les personnes, à prendre en charge la politique nous-mêmes.

     

    Nous en avons les moyens organiques. Il nous reste à déployer nos énergies citoyennes. Le destin commun nous appartient.

     

    Pascal Décaillet