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  • Instinct et survie

     

    Sur le vif - Mardi 06.11.18 - 08.51h

     

    L'enjeu de la votation du 25 novembre est celui de la souveraineté de la nation. Nos lois doivent-elles être ultimes, ou non ?

     

    C'est à ce niveau-là, à cette hauteur de vue, à la dimension de cette querelle, qu'il convient d'appréhender la question. Cette dernière interpelle à la fois le temps et l'Histoire, la nature même, depuis la Révolution française, de l'idée nationale.

     

    Elle n'est pas sectorielle (les patrons, les syndicats, les "milieux académiques"), ni corporatiste. Elle est totale, indivisible, immédiate.

     

    Elle met en jeu le sentiment profond, avec sa part d'instinct et de survie, que chacun d'entre nous, dans l'intimité de son for, entretient avec le pays.

     

    Face au vote, chacun d'entre nous, jeté là comme fragment et poussière, assume la totalité de sa solitude, face au destin commun. Il est libre. Il n'a de comptes à rendre à personne. Surtout pas aux partis politiques, ces paroisses d'éternité confisquée.

     

    Au regard de cette solitude vertigineuse et sacrée, les "mots d'ordre" des centaines de féodalités d'intérêts, associations, corporations, sont vaines comètes, depuis des millénaires éteintes.

     

    Le reste, ce sont des mots, des dérivatifs, des récupérations, des gesticulations, du remplissage.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Aux Jurassiens, mon amitié confédérale

     

    Sur le vif - Lundi 05.11.18 - 12.05h

     

    J'ai eu vingt ans en juin 1978, c'était à l'époque l'âge à partir duquel on pouvait voter. Mon tout premier vote, au niveau fédéral, et j'en suis tellement fier, fut de dire OUI, un OUI du fond du coeur, en septembre 1978, à la création du nouveau Canton du Jura.

     

    J'avais suivi l'affaire bien avant, depuis les plébiscites du milieu des années 70, je n'avais pas encore lu les théoriciens de la Question jurassienne, mais je sentais très fort qu'il y avait, pour les gens de ces districts-là, en tout cas ceux d'entre eux qui le souhaiteraient, une anomalie de l'Histoire (elle date de 1815) à réparer. J'avais fait mon armée à 19 ans, en 1977, il y avait des Jurassiens (encore Bernois, à l'époque, mais autonomistes) dans ma compagnie, j'avais senti leur passion d'avoir un Canton à eux.

     

    Je n'ai jamais connu Roland Béguelin, mais j'ai eu la chance, à Berne, de fréquenter et d'interviewer maintes fois François Lachat, l'un des Pères du Canton, un homme de chaleur, de culture et d'humour, celui qui, du balcon, avait crié "Citoyens, Victoire !".

     

    Bref, j'ai toujours été favorable au Canton du Jura. En même temps, mon respect pour le Canton de Berne est total, y compris pour les districts du Sud, qui avaient choisi d'y demeurer. L'affaire est complexe, passionnante, les découpages de sympathies (PRO ou ANTI) sont ciselés au scalpel, district par district, commune par commune, famille par famille.

     

    Aujourd'hui, je veux dire mon amitié confédérale aux gens de Moutier. Il me semblait que, le 18 juin 2017, ils avaient fait un choix politique clair, même s'il était serré. J'avoue comprendre difficilement les décisions de la Préfète. Surtout, je pense à cette ville où je me suis rendu souvent, notamment pour des décentralisés radio. Je pense à l'état d'esprit des gens qui pouvaient légitimement partir de l'idée que, la chose ayant été tranchée politiquement, on allait pouvoir aller de l'avant. La décision de ce matin remet tous les compteurs à zéro. Il y a de quoi avoir la boule au ventre.

     

    Il y a, au fond de moi, une double appartenance. Je suis Genevois, né ici, profondément attaché à la Ville et au Canton de Genève. J'y ai passé toute ma vie, à part mes années à Berne, comme correspondant parlementaire, et de longues périodes en Allemagne, aussi. Et puis, je suis Valaisan. Par mes origines, mes deux parents, et toute l'ancestralité remontante, sur des siècles. Valaisan par le tempérament, le caractère, par toute l'intensité de mes liens familiaux.

     

    Étant ces deux choses à la fois, je suis profondément Suisse. Attaché à la pluralité, la diversité, l'impérieuse nécessité des équilibres, tellement fragiles. En cela, je pense que nul Suisse, nulle Suissesse, ne peut demeurer indifférent à la Question jurassienne.

     

    Aux gens du Jura, qu'ils soient de Berne ou du nouveau Canton, de Moutier ou d'ailleurs, je veux dire aujourd'hui la profondeur de mon amitié confédérale. Dans la déception d'un débat relancé, comme dans l'ivresse festive des jours de victoire, le citoyen suisse que je suis adresse sa sympathie à ses concitoyens de là-haut, dans ce Nord-Ouest où s'embrassent les cultures. La Suisse et la France. La langue de Verlaine et celle de Hölderlin.

     

    Vive le Jura !

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Une affaire de la nation avec la nation

     

    Sur le vif - Dimanche 04.11.18 - 14.03h

     

    Juges étrangers : revoilà, comme dans la campagne du 9 février 2014, les "milieux académiques" qui nous promettent l'Apocalypse.

     

    Soyons sérieux. L'enjeu de la votation du 25 novembre ne concerne au premier chef ni les "milieux académiques", ni le patronat, ni les syndicats.

     

    L'enjeu est identitaire. Il concerne la relation profonde que chacune, chacun d'entre nous entretient avec son pays. Voulons-nous que nos lois soient ultimes, ou considérons-nous qu'en certains cas, des instances externes à l'appareil législatif suisse puissent intervenir ?

     

    A cette question, chacun répondra selon son coeur. Selon son âme. Selon l'intimité du rapport qu'il aura noué, dans sa vie, avec l'idée nationale, l'idée de souveraineté, l'idée d'indépendance.

     

    Cela n'est en rien une affaire des "milieux académiques". Ni du patronat. Ni des syndicats.

     

    C'est une affaire du peuple avec le peuple. Une affaire de la nation avec la nation.

     

    Pascal Décaillet