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  • Laissons dormir les experts

     

    Sur le vif - Mardi 09.08.11 - 09.48h

     

    Incroyable, depuis la crise de la dette américaine, le galimatias de paroles « d'experts » de tout poil. Plus nuls les uns que les autres. Experts en obscurité. N'étant capables de prévoir, a posteriori, que ce qui s'est passé. Lumineux, dans l'art d'éclairer un événement qu'ils n'ont pas vu venir. Et on leur donne la parole, docilement, on les écoute pérorer, on confronte les encres noires de leurs clartés. Et ils sont deux, trois, quatre, à s'écouter complaisamment, « nuançant » tout au plus la version du préopinant.

     

    La vérité, c'est qu'ils n'ont rien à dire. La crise, ils ne l'ont pas vue venir. Ils n'ont strictement rien vu. Et ils parlent à mesure de leur cécité, par compensation. Et on les fait parler, pour remplir. Rassurer les chaumières. Ils ne sont pas là pour la lumière, mais pour la paix des âmes.

     

    Dans la nuit de cette Kabbale, une étoile. Elle s'appelle Myret Zaki. Avant tous, elle avait annoncé l'effondrement, pour cause de dette, du système financier américain. Les « experts », notamment ceux des pages financières de journaux ayant pignon sur rue, lui avaient ri au nez. Aujourd'hui, une fois de plus, cette brillante consoeur a raison. Mais les experts, eux, en boucle, continuent de s'égosiller.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Glôzu : c'est Syracuse qu'on assassine !

     

    Sur le vif - Lundi 08.08.11 - 15.40h

     

    Loin de moi, très loin, l'idée de remettre en question la santé mentale des édiles de la Ville de Genève. Que la Grâce se répande sur leurs âmes, oui la Grâce, celle de Calvin, je veux bien leur épargner Claudel, le deuxième pilier de Notre-Dame, certains d'entre eux prendraient cela pour une institution de prévoyance. Je leur fais grâce, aussi, de Port-Royal, qu'ils risqueraient de considérer comme un projet d'agrandissement de la Nautique. Oui, saints, trois fois saints soient ces temporels. Que les ailes de la Prédestination ont commis, avec l'aide discrète du suffrage universel, à leurs nobles tâches.

     

    Seulement voilà. Il y avait déjà la Restauration, celle du 31 décembre 1813, avec ses canons. Et puis, il y a l'autre restauration, avec un petit « r », avec ses canons de rouge ou de blanc, ce détestable résidu de catholicisme qui s'appelle la bonne humeur, celle d'avant 1536, celle où l'on rigole et où l'on chante, la foi du tavernier et celle du charbonnier, cela porte un très beau nom, comme une célérité russe : cela s'appelle un bistrot.

     

    Niché dans l'ombilic le plus intime de l'officialité calvinienne genevoise, à côté de laquelle la regrettée DDR alignait des airs de furies carnavalesques, se trouve, justement, un bon vieux bistrot, oh plutôt luxueux pour mériter ce nom, mais enfin un endroit où il fait bon se réfugier : Chez Glôzu. Là aussi, je vous passe le personnage, auquel plus de trois décennies de complicité me lient, ses frasques, ses fantasmagories, les numéros de jonglage qu'il annonce et qu'il ne fait jamais, ses travestissements en généraux soviétiques, le velouté de sa voix lorsqu'il chante « Syracuse », le chef-d'œuvre de Bernard Dimey. Un personnage. Une tronche. Un caractère. Une sublime et romanesque tête de lard.

     

    Alors voilà, les édiles, moi je trouve bien quand ils s'occupent de Restauration, tous les 31 décembre. Mais je n'ai jamais exactement compris, ni aux Eaux-Vives, ni  à la Perle du Lac, ni chez le général Glôzu, en quoi les affaires de restauration, avec ce petit « r », si modeste et si dérisoirement charnel, devaient relever de leur compétence. Car enfin, si le Verbe se fait Chair, je n'ai pas encore lu qu'il ait prétention à la Chère. À cela s'ajoute que poser son cul sur les bancs d'un estaminet ne confère pas automatiquement le droit d'en assumer la gérance, ni la Régence. Et qu'il faudrait peut-être changer un peu cela. Et que, ma foi, à moins qu'on nous prouve qu'une horde de rats pestiférés et sanguinaires aient envahi la cave, il ne me dérangerait pas qu'on foute une paix royale au Sieur Glôzu.

     

    Et qu'on le laisse faire son boulot, qu'il sait si bien faire. Comme un Seigneur des bas étages. Au royaume du caniveau, les poussières d'étoile sont reines. Souveraines. Comme sur les épaulettes d'un général soviétique. J'ai dit.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Adrien Genecand, l'un des meilleurs

     

    Sur le vif - Lundi 08.08.11 - 12.02h

     

    C'est l'un des élus les plus prometteurs de la classe politique genevoise qui s'est fait sauvagement tabasser, en pleine ville de Genève, dans la nuit de vendredi à samedi. Un épisode que nous rapporte le Matin d'aujourd'hui, avec deux photos d'Adrien Genecand, paupières tuméfiées, les yeux au beurre noir. Photos qui m'ont soulevé le cœur, d'abord parce que toute violence physique est détestable, aussi parce que j'ai des enfants, un peu plus jeunes, qui sortent parfois le soir, alors oui, le récit de cette agression me fout la trouille.

     

    Du fond du cœur, je souhaite à Adrien Genecand de se remettre le plus vite possible, physiquement, mais surtout psychologiquement, de ce traumatisme, car c'en est un. J'en profite pour dire un mot de ce jeune politicien de 24 ans, exemplaire en toutes choses, co-président des Jeunes libéraux radicaux, verbe précis, argumentation percutante, toujours calme et respectueux dans les débats. Il fait partie, avec Nantermod, Murat Julian Alder, Alexandre Chevalier, et quelques autres, de la brillante relève de la famille libérale radicale. À cette école de pensée, qui se veut héritière des Lumières, de l'Aufklärung, de la « disputatio » intellectuelle, il a puisé la volonté d'argumenter, encore et toujours, pour convaincre. Avec des mots. Et jamais, justement, avec les poings.

     

    La dignité avec laquelle ce jeune homme évoque sa mésaventure dans le Matin (« J'ai surtout conscience de la chance que j'ai, en étant comblé aussi bien au niveau professionnel que familial ») constitue, pour la jeunesse comme pour nous tous, un véritable exemple. Il faut que ce garçon se remette très vite, et retrouve toute sa place dans une scène politique où il aura, dans les années qui viennent, beaucoup à apporter.

     

    Pascal Décaillet