Édito LFM – Mercredi 07.05.08 – 07.50h
L’UDC vaudoise, la bonne vieille héritière de la tradition agrarienne, réputée si lointaine de Zurich, vient donc, hier soir, à Poliez-le-Grand, de décider l’exclusion de la section grisonne du parti national. Le résultat, 78 voix contre 70, est certes serré, mais il est là. Quand on sait ce qu’a longtemps représenté le parti vaudois dans la galaxie UDC, sa modération paysanne, pragmatique, on ne peut s’empêcher de voir dans cette décision la confirmation d’un tournant.
Depuis quelques années déjà, une observation attentive des résultats électoraux vaudois montrait le déclin de la vieille tendance PAI (Paysans, Artisans, Indépendants), bref la tradition de Marcel Blanc, héritée du mythique Bernois Minger, au profit de la ligne de pensée de Christoph Blocher. Ce glissement ne doit rien au hasard : il est le résultat d’une stratégie, voulue par Blocher dès 2003 : devenir un parti national, avec des thèmes communs, une lisibilité claire, sur l’ensemble du pays. À quoi s’ajoutait la conquête de solides têtes de pont en Suisse romande, objectif atteint le 21 octobre 2007.
On pense ce qu’on veut de l’UDC, ainsi que de cette baroque démarche consistant à exclure une section cantonale entière (s’il s’était agi d’exclure Madame Widmer-Schlumpf, le résultat aurait été de 114 oui, 28 non et 3 abstentions, mais c’est statutairement impossible), mais voilà un parti avec des idées claires, une stratégie pour les mettre en œuvre, un parti qui avance. Pendant ce temps, les radicaux se demandent toujours qui ils sont et pourquoi ils sont au monde, le PDC guette le vent, avec la fureur mystique d’un anémomètre en panne.
Dans l’équilibre interne de l’UDC, où certains observateurs, déjà, se délectent à l’idée d’une scission, la décision vaudoise d’hier soir donne des gages à l’unité du parti. Comme le confirment tous les résultats cantonaux, de Suisse centrale ou orientale, depuis le 12 décembre, la ligne Blocher continue de marquer des points. Les débats internes des sections cantonales, à la notable exception de Berne, confirment cette tendance. Voilà ce que les faits, têtus, nous disent. Rendez-vous à tous en octobre 2011.
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Adieu, Jeunesse !
Édito LFM – Mardi 06.05.08 – 07.50h
Jeunesse est mort, il avait 89 ans, et ce paradoxe, déjà, le résume. Il a été la voix la plus connue de la radio française, trois mots, trois mots seulement, un sourire, comme un soleil de midi : « Chers amis, bonjour ! ».
C’est tout. Et c’est immense. Tenir trente ans une émission comme le « Jeu des mille francs », juste avant le journal de 13h de France Inter, avaler des millions de kilomètres en sillonnant le corps le plus profond de la Province française, faire jouir une salle sur le seul mot de « Bingo ! », voilà qui paraît simple, à portée de tous, mais qui était un métier, une obstination, une passion.
Il venait de l’opérette, cette homme-là, chanteur de charme. « C’est si bon », c’est lui. Sa voix était la plus douce, la plus délicieusement aimable des ondes françaises. Plus de dix mille émissions, quelque quatre-vingt mille questions. Une sorte de quizz de culture générale, de tout et de rien, que les auditeurs adoraient. Et avec ce rien, ce bric et ce broc, l’émission, au sommet de l’audience, a tenu, avec lui, trente ans.
Parce que c’était lui, c’était Jeunesse, c’était cette vieille Province de France, ces petits Lirés, ces Saint Amand Monrond, ces bords de Loire ou de Garonne. Au fond, la voix solaire de ce saltimbanque de charme nous emmenait, en plein zénith de la journée, dans la France du grand Meaulnes. La modernité de cette émission, c’était son archaïsme. Et les gens, devant le transistor, adoraient ça.
La richesse d’une radio est celle des voix qui la composent. Celle de Jeunesse, dans nos mémoires, restera. Alors à bientôt, Lucien. Si vous le voulez bien.
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Une droite à fédérer
Édito LFM – Lundi 05.05.08 – 07.50h
Nettement majoritaires dans les urnes le 21 octobre 2007, les différents partis de la droite suisse n’ont su montrer, dans le tohu-bohu du 12 décembre suivant, que le spectacle de leurs divisions. Depuis cinq mois, on ne parle plus que déchirure au sein de l’UDC, recherche désespérée d’identité chez les radicaux (le plus vieux parti du pays multiplie les séminaires pour savoir qui il est), quête effrénée de la couleur du vent au PDC.
Lorsqu’on aura, pour la millième fois, instruit ce que chacun a fait, minute après minute, la nuit du 11 au 12 décembre 2007, il sera peut-être temps – il est déjà bien tard – de se tourner vers l’avenir. Au-delà du roman, des anecdotes et des passions d’un moment, la recomposition des droites suisses sera l’un des enjeux de la législature.
Pour le moment, l’aventure et le jeu d’ambitions de quelques-uns n’ont fait que transformer une victoire électorale, assez rare en Europe par son ampleur (avec un PS qui a franchi, à la baisse, la barre des 20%), en un prodigieux gâchis. Les chefs du PDC et des radicaux se querellent pour des vétilles. Dimanche après dimanche, l’un se félicite du revers de l’autre dans des scrutins cantonaux alémaniques, semblant ignorer l’essentiel : le parti, depuis cinq mois, qui continue de monter dans ces cantons, c’est l’UDC. Pas celle de Madame Widmer-Schlumpf. Celle de Blocher.
Au plan fédéral, pourtant, il n’y a pas l’épaisseur d’un papier à cigarettes entre la politique des radicaux et celle du PDC. En matière financière, fiscale, en politique européenne, en position sur les bilatérales, dans le domaine migratoire et même scolaire, ces deux partis (auquel il faut, bien sûr, ajouter les libéraux, ou ce qu’il en reste) prônent le même modèle de société.
Une société qui mise sur l’individu, son énergie, sa prise de risques, sa responsabilité. Mais aussi sur la qualité de la formation, à tous les échelons, pour affronter la concurrence internationale, et les défis du futur. Une société du respect mutuel, à commencer par celui des plus faibles. Entre l’assistanat généralisé préconisé par une certaine gauche et la brutalité d’une certaine droite ultra, il y a, largement, l’espace pour un grand rassemblement. Pouvant inclure la démocratie chrétienne, le libéral radicalisme, et aussi ceux de l’UDC, beaucoup plus nombreux qu’on croit, qui ne veulent ni xénophobie, ni affiches nauséabondes. Cela fait pas mal de monde. Une très nette majorité, dans le pays.