Commentaire publié dans GHI - Mercredi 30.04.25
L’olivier. Le cyprès. Le pin parasol. La vigne basse, taillée proche de la terre. L’iris. Le jasmin. Le laurier. L’arbre de Judée, aux floraisons de sang. Les murs de pierres apparentes, irrégulières, enflammées de soleil dans l’oblique du soir. Les toits de tuiles romaines. Les bornes milliaires, le long des voies antiques, avec des noms d’empereurs, Aurélien, Domitien. Les dieux gaulois qui se sont confondus, au fil des siècles, avec les divinités romaines. Les premiers édifices chrétiens, sur tel oppidum, bâtis exactement sur les sites celtiques. Rome, la Gaule : deux mondes en fusion lente, comme inspirés, ou plutôt aspirés, l’un par l’autre.
Ce miracle, c’est la Provence. Romaine, avant le reste de la Gaule, et même grecque, par comptoirs. Toute ma vie, je m’y suis rendu, la première fois il y a soixante ans, en famille. Et toujours, l’intensité d’un souvenir : celui du voyage d’études sur la Provence grecque, printemps 1977, avec Olivier Reverdin, André Hurst, et des camarades passionnés dont je garde un souvenir ému. Nous étions un peu cinglés d’inscriptions, à déchiffrer immédiatement, en grec, en latin, des pierres tombales pour la plupart. Nous étions marbrés.
Un demi-siècle après, à chaque voyage, je laisse la Provence venir à moi. Juste être là. Dans la splendeur de la lumière. Il n’y a plus ni Grèce, ni Rome. Il y a juste le paradis. A portée des mortels.
Pascal Décaillet
Commentaires
Le Paradis, lieu ou état ? Une quête, un pèlerinage vers la connaissance de soi, intérieure - qui suis-je, et extérieure – d’où est-ce que je viens ? Un voyage initiatique vers la sérénité. Sans cette curiosité, ce besoin d’apprendre, pas d’expériences et, sans vécu, la stagnation, l’ignorance. Le voyage, le choc de la découverte d’un paysage nouveau, celle de l’autre, de couleurs, d’odeurs et de goûts inconnus, d’autres minéraux, d’autre végétaux, d’autres animaux, partager la nourriture de l’autre, découvrir de nouveaux climats, d’autres éléments de la Nature.
Comme vous, je me souviens : en 1955, la route Napoléon, découverte de la mer, la côte méditerranéenne, la Provence, un monde en soi, un autre monde ; puis le même choc révélateur après l’abondance aux USA en 1961, la pauvreté en Afghanistan en 1962 mais avec le sourire d’un peuple heureux accueillant et tolérant, enfant d’Allah ; le Siam en 1967, le pays du sourire, la bienveillance bouddhiste, la vie communautaire et la gastronomie chinoise ; Bali en 1973, découverte de l’Indouisme originel, d’avant la colonisation, symbiose parfaite entre la Nature, l’Homme et le Divin, le Paradis dans lequel l’eau est vue comme le sang de la Terre et où tout est sacré ; et, parmi d’autres découvertes, le Mont Kenya en 1975, sur lequel, pour les Kikuyu, la tribu dominante, la Tradition enseigne qu’est né le premier homme : noir avant le rouge puis le jaune avant le blanc. Une succession de paradis. Le chemin vers le Paradis que chacun en fait possède en soi !