Sur le vif - Mardi 17.12.24 - 15.36h
Il était de ces hommes dont souffle l'esprit. Un entrepreneur. Un citoyen passionné. Un orateur redoutable. Une plume incisive. Un bouillonnement permanent. Le courage d'être contre, et parfois seul contre tous. Pierre Kunz vient de nous quitter, à l'âge de 82 ans, je l'apprends à l'instant. Je veux dire ici ma tristesse. Mais aussi la perte, pour Genève, d'un esprit libre et fort, combatif à l'envi, lumineusement solitaire. Le monde politique, où prospèrent tant d'agneaux dociles, qui s'en vont paître dans les terres grasses du pouvoir, a besoin d'hommes comme Pierre Kunz.
J'aimais sa plume, notamment sur son blog "Je la connais, la musique". J'aimais la férocité joyeuse de son indépendance. J'aimais l'intransigeance républicaine de son radicalisme. En d'autres temps, il eût été Jacobin, Conventionnel, Montagnard. Aurait-il voté la mort du Roi ? Il était une force de vie, un charivari d'idées, il était parfois l'esprit qui toujours dit non : ainsi, au début de la tragédie de Goethe, Méphisto se présente au Docteur Faust, "Ich bin der Geist, der stets verneint".
J'aimais lire la prose dérangeante de Pierre Kunz, puis l'inviter immédiatement à GAC, quelques minutes après parution, pour qu'il vienne transformer l'essai à l'oral. Quand il était face à moi, sur le plateau, j'observais son regard pétillant, tout embué d'humour et d'intelligence. Il était une force de vie. Un éclair réinventé de lucidité. A ses proches, toute ma sympathie. Pour Genève, une perte, c'est certain.
Pascal Décaillet