Sur le vif - Mardi 16.02.21 - 17.07h
Quand la Hongrie du méchant M. Orban ferme ses frontières, nos beaux esprits hurlent au fascisme.
Quand l'Allemagne de la gentille Mme Merkel fait exactement la même chose, aucun problème !
L'Allemagne ! Première puissance d'Europe, en pleine expansion, en pleine phase ascendante, l'une des plus impressionnantes depuis la Guerre de Sept Ans (1756-1763).
L'Allemagne ! Moteur économique et industriel du continent, première démographie, potentiel militaire en constante expansion (cela aussi, personne n'en parle), marchés de l'Est reconquis.
Et elle les ferme avec qui, ses frontières ? Pas avec le Kazakhstan. Elle les ferme avec...... l'Autriche ! L'Allemagne verrouille le passage avec cette autre elle-même, ce voisin du Sud avec lequel elle entretient depuis des siècles un rapport si complexe, tantôt : "Nous sommes les mêmes", tantôt "Il y a tout de même des différences". Destin commun jusqu'en 1806, puis rupture, puis sept années communes entre 1938 et 1945, puis à nouveau deux pays différents. Je t'aime, moi non plus !
La décision est à peu près comparable à une fermeture des frontières, sur l'Elbe (je connais, de très près), entre la Saxe historique et la Prusse.
Seulement voilà. La gentille Mme Merkel, ça n'est pas le méchant M. Orban. Pour lui, on crie, on s'étrangle. Pour elle, on ferme les yeux. Et on se dit que l'Autriche, pour l'Allemagne, c'est quelque chose qui pourrait ressembler à ces vers sublimes de Verlaine :
" Je fais souvent ce rêve étrange et
pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime,
et qui m'aime
Et qui n'est chaque fois, ni tout à fait
la même,
Ni tout à faut une autre, et m'aime et
me comprend ".
Pascal Décaillet