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Moutier : les leçons d'un scrutin

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Sur le vif - Dimanche 18.06.17 - 18.50h

 

Un oui du bout des lèvres (51,7%). Mais un oui quand même ! Moutier rejoindra la République et Canton du Jura. L’événement dépasse, et de loin, le seul cadre de la Cité Prévôtoise, et même celui de l’Arc jurassien. Il est d’importance nationale, comme l’ensemble de cette passionnante question historique, depuis le Congrès de Vienne en 1815. Le Jura, c’est nous. Comme d’ailleurs aussi, le Canton de Berne. Les gens de Moutier sont nos compatriotes, comme ceux de Delémont, de Porrentruy, de Bienne ou de Tavannes. Nul Confédéré, qu’il soit de Genève, de Coire, de Lugano ou de Zurich, ne peut demeurer indifférent au destin de ce coin de pays, qui fait partie de notre communauté nationale. Ce soir, nous saluons leur choix, comme nous l’aurions d’ailleurs salué en cas de décision contraire : le vote leur appartenait, nous en prenons acte, avec le respect que tout Suisse voue aux autres parties du pays.

 

Je suis né le 20 juin 1958. En 1978, la majorité pour voter était encore à vingt ans. Mon premier vote, sur le plan fédéral, fut donc, en septembre de la même année, pour dire oui, un oui du fond du cœur, à la création du nouveau Canton du Jura. J’avais lu Béguelin, je l’avais entendu dans des émissions de radio, il m’avait convaincu. En aucun cas, pourtant, mon oui n’était un désaveu du Canton de Berne. Il n’était pas question pour moi de jouer la carte ethnique, Romands contre Alémaniques, encore moins la carte confessionnelle, catholiques contre protestants. La richesse exceptionnelle de la Suisse, sa survie dans l’Histoire, c’est que les facteurs religieux ne se sont jamais exactement calqués sur les facteurs linguistiques. Sans quoi, nous serions dans un cas comparable à la Belgique, avec le risque de sécession que cela implique.

 

J’ai passionnément aimé et étudié, sur le plan historique, la question jurassienne. Je respecte totalement les deux points de vue, les deux attaches affectives, celle pour Berne, celle pour le Jura. J’ai connu, dans la jeunesse, ces fameuses années 70 où le combat, physiquement, faisait rage. J’ai fréquenté, dans mes années bernoises puis fédérales, de brillants esprits, émanant des deux côtés. Les uns et les autres sont mes compatriotes, mes amis. Je salue le Canton de Berne, je salue celui du Jura.

 

La grande leçon de toute cette série de plébiscites et votations autour de la question jurassienne, c’est que cette dernière, malgré les bagarres physiques des années 70, malgré le déchaînement des passions, pendant le dernier demi-siècle, s’est finalement jouée dans le seul théâtre d’opérations qui symbolise la culture politique suisse : celui des urnes. Plébiscite de 1974, ratification par les autres cantons en 1978, pour aboutir au vote, serré mais bien réel, d’aujourd’hui. Je ne suis pas sûr, comme je l’entends dire avec un peu d’imprudence sur les ondes, que ce vote scelle pour l’éternité la question jurassienne. Mais disons que, pour un certain temps, les dés sont jetés.

 

Aux Jurassiens, aux Bernois, aux Jurassiens bernois, aux Jurassiens tout court, à ceux de tous les districts, du Nord comme du Sud, de cette région profondément amie, j’adresse le salut d’un Confédéré qui aime son pays, et souhaite le maintien de son unité dans la diversité. Sans ce petit miracle-là, comme un soupir retenu devant une petite fleur fragile, nous sommes perdus.

 

Pascal Décaillet

 

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