Sur le vif - Lundi 01.07.13 - 19.40h
Je viens d’apprendre la nouvelle par mon confrère David Ramseyer, de Léman Bleu : la mention journalisme du Master en sciences de la communication et des médias quitte Genève. Il y aura désormais un Master en journalisme et communication à l’échelle romande, ce qui n’est pas un mal en soi. Mais, hélas, la formation spécifique en journalisme quitte Genève pour Neuchâtel. Genève se spécialisera dans la communication.
Il se trouve que, depuis cinq ans, j’enseigne dans ce Master, mention journalisme. Les étudiants viennent dans le studio de mon entreprise, je fais venir un technicien, et nous vivons, tous ensemble, à un rythme soutenu, les ateliers radio que je pratiquais déjà, auparavant, au CRFJ (Centre romand de formation des journalistes) et à l’interne de la RSR. Ils viennent par groupes de cinq, et sont très heureux de « faire enfin de la pratique ». Je connais donc de l’intérieur cette formation, en apprécie beaucoup l’ambiance, sais ce qu’elle doit aux années d’efforts du professeur Uni Windisch, son fondateur, aujourd’hui à la retraite de l’Université.
Je ne plaide pas ici pro domo, ayant quinze mille autre activités, y compris dans l’initiation aux métiers du micro, mais pour les étudiants, et pour le rayonnement universitaire de Genève. Sur ces bases-là, oui, je l’affirme : le départ de la mention journalisme est une très mauvaise nouvelle pour Genève. Pour la réflexion sur ce métier. Mais aussi, la place de Genève comme pôle formateur de premier plan.
Bien sûr, l’autre mention, la « communication », demeurera à Genève. C’est très bien. Mais former de futurs attachés de presse, métier parfaitement respectable, ça n’est pas former des journalistes. Il y a des points communs, tout ce qui touche à la forme. Mais il y a de profondes différences : l’acquisition de cette posture d’indépendance, oui ce long de chemin de solitude, qui fait un jour un journaliste. Cela ne se travaille pas de la même manière.
Mon enseignement à l’Université, je le donne, comme tout ce que je pratique, à l’externe, comme entrepreneur indépendant. Je n’ai donc, à l’heure où j’écris ces lignes, strictement aucune idée de ce qui s’est passé pour que cette mention journalisme quitte Genève. Nos autorités universitaires (le rectorat), le Département de l’Instruction publique, le monde politique en général ont-ils été mis au courant de ce qui se passait ? Ont-ils été placés devant le fait accompli ? Certains d’entre eux, ce soir, jouissent-ils intérieurement de voir démanteler le legs d’un homme, UIi Windisch, qui a passablement dérangé leurs conforts de pensée ?
Tout cela, je n’en sais rien. Mais je regrette infiniment l’appauvrissement de la place genevoise dans la formation en journalisme. On n’enseigne pas le métier de journaliste de la même manière, avec les mêmes paradigmes, les mêmes échantillons, le même environnement à Genève qu’à Neuchâtel. Mais les trains, apparemment, on a assez bien appris à les voir passer. En soupirant et en baissant les bras.
Pascal Décaillet