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Identité nationale : et pourquoi pas ?

 

 

Chronique publiée dans le Nouvelliste - 19.01.10

 

Identité nationale : en quoi ces deux mots devraient-ils être tabous ? Pourquoi certains, à gauche mais aussi dans une frange métalliquement cérébrale de la droite républicaine, semblent-ils les considérer comme un binôme explosif, à ne toucher en aucun cas ? De quoi ont-ils peur ? Au nom de quoi une nation n’aurait-elle pas le droit, sans la moindre haine pour les autres, sans arrogance, sans supériorité, d’affirmer ce qu’elle est, ce qui fédère ses citoyens, quelles sont ses valeurs ? Si elle ne le fait pas, son extrême-droite le fera pour elle, confisquera le thème, se l’appropriera, ce qui est un peu dommage, non ?

Prenons la Suisse, vous me direz que ça n’est pas exactement une nation, au sens de Valmy ou de Jemmapes, je vous l’accorde. Mais enfin c’est un pays, qui est le nôtre et que nous aimons. De gauche, de droite, hommes, femmes, jeunes ou vieux, latins ou germanophones, avec toute l’étendue de nos différences, nous nous reconnaissons, l’immense majorité d’entre nous, dans le charme discret de cette petite démocratie d’Europe centrale, son système politique, la nécessité de nous respecter mutuellement. N’est-ce pas là, déjà, un sacré début d’identité ?

Le danger, ça n’est pas l’identité nationale. Le danger, c’est définir cette dernière comme une valeur du sang, ou de la race, ou de la génétique. Alors qu’il s’agit, à l’évidence, et comme l’a remarquablement montré Anne-Marie Thiesse, d’une construction. Le dix-neuvième siècle récupère Jeanne d’Arc ou Guillaume Tell, brandit des mythes, façonne des générations d’élèves. Mais être le fruit d’une construction (intellectuelle ou sentimentale), ça n’est pas rien, c’est déjà un début d’identité. Etre les héritiers de ceux qui ont construit notre démocratie directe, notre fédéralisme, nos assurances sociales, c’est déjà l’amorce d’un trésor commun : notre pays, notre Histoire, nos forces, nos fragilités, nos engueulades aussi, c’est tout cela un pays.

Identité nationale : deux dérives possibles. L’une, c’est d’en faire le vecteur de la loi du sang, donc de l’exclusion. L’autre, c’est la gommer, comme si elle n’existait pas. Comme si la part du sentiment, surgi du sol, ne comptait pour rien dans le tellurisme de l’appartenance. Librement consentie. Pour un pays qu’on aime.

 

Pascal Décaillet

 

 

 

 

 

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