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Sur le vif - Page 893

  • Nantermod réveille Léon Blum et casse la baraque

     

    Sur le vif - Dimanche 05.08.12 - 19.14h

     

    Dieu qu'il est doux, au retour d'une promenade d'observation de la nature, d'entendre Philippe Nantermod à Forum. Face au sénateur Hérisson, à qui il faut d'ailleurs rendre hommage d'être resté parfaitement calme et courtois face à la jeune tornade, le Valaisan a asséné à nos amis français une véritable leçon de rigueur financière et de gestion de fonds publics. Vous qui n'avez que des exercices déficitaires depuis 1936 (le Front populaire), a-t-il rugi face à un parlementaire très expérimenté, au demeurant du même bord politique que lui, vous n'avez aucune leçon à donner à la Suisse. Savoureux. Jouissif.

     

    On se demande juste pourquoi l'impétueux co-président des Jeunes libéraux-radicaux suisses semble, dans son camp tout au moins, le seul à oser ce langage franc et direct, sans fioritures. Sans rien d'ailleurs, dans son discours, et c'est là depuis toujours la très grande force de Nantermod, qui soit de nature à blesser l'adversaire, ni la fierté française. Juste des arguments, décochés sans concession mais sans la moindre haine. Un style d'une redoutable efficacité.

     

    Il s'agissait de clamer haut et fort l'opposition des Jeunes libéraux-radicaux à la nouvelle convention avec la France concernant l'impôt sur les successions. Sur ce point, Nantermod et les siens voient rouge. « Il suffit, regrettent-ils, qu'un Etat profère des menaces pour forcer la Confédération à courber l'échine sans contrepartie... La Suisse ne doit plus céder aux chantages de pays qui cherchent simplement par la force à remplir leurs caisses publiques vidées par des décennies de politiques sociales-démagogues ». Voilà qui est dit. Voilà qui est clair. On est d'accord ou non. On aime Nantermod ou non. Mais une chose est sûre : cinq personnes de cette trempe et de cette clarté, et le grand vieux parti un peu repu est sauvé.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La Constitution n'a rien à voir avec le patriotisme

     

    Sur le vif - Dimanche 05.08.12 . 13.17h

     

    « Le projet de nouvelle Constitution : un acte patriotique », titre, ici même, le 1er août 2012, le constituant socialiste Thierry Tanquerel. En tête d'un texte en forme de panégyrique des esprits éclairés (ceux qui voteront oui le 14 octobre) face à l'obscurité des opposants, adeptes « d'interprétations absurdes, voire de contrevérités pures et simples ». Bref, la Genève de l'intelligence, des Lumières et du progrès votera oui, « l'alliance objective » de la Nuit votera non. Rhétorique classique, juste un peu décevante lorsqu'elle émane d'un esprit brillant, diabolisation du non, relégation des opposants dans l'ordre de l'obscur. Géométrie de la pensée, tirée à l'équerre.

     

    Sauf que là, notre éminent mathématicien du Bien et du Mal franchit une étape supplémentaire : l'adoption du projet, écrit-il, serait « un acte patriotique ». Parce que l'intérêt de Genève y prévaut sur les calculs de boutique politicienne. Le partisan est donc un patriote, l'opposant un vulgaire boutiquier. De droite, ou de la gauche de la gauche. Au centre de tout, quelque part entre l'abscisse et l'ordonnée, vous obtiendrez la Raison triomphante de notre géomètre. Non seulement progressiste, mais patriote, s'il vous plaît.

     

    Non, M. Tanquerel, il n'y pas d'un côté le patriotisme positif des pour, de l'autre l'obscurité des contre. On peut voter la nouvelle Constitution, le 14, en étant patriote. On peut la refuser, en étant tout aussi patriote. Le patriotisme, à la vérité, n'a strictement rien à voir avec cette affaire de Constitution.

     

    Dans d'étranges conditions, je veux dire à froid, sans qu'il n'y ait nul péril en la demeure, ni Révolution, ni bouleversement des ordres comme dans la Suisse de 1848, ni fin d'une République comme dans la France de 1958, il a été question de doter Genève d'une nouvelle Charte fondamentale. Le peuple a accepté ce principe, c'est vrai. Une Assemblée s'en est occupée, elle a fait son travail, qu'elle en soit remerciée. Le souverain, le 14 octobre, dira oui ou non. Mais enfin, il n'y a dans cet enjeu rien de gravissime, rien qui relèverait d'une théologie du Mal ou du Bien, d'un bannissement des opposants. Rien, surtout, qui conférerait aux uns le statut de « patriotes », plutôt qu'aux autres.

     

    Je dois vous dire, M. Tanquerel, qu'en cas de non le 14 octobre, il est permis de penser qu'il y ait tout de même encore une aube le 15, et puis un soir, et puis encore un matin, et que la population genevoise ne sortirait pas davantage groggy par un refus qu'elle ne serait aux anges par une acceptation. Parce qu'au fond, voyez-vous, le peuple de Genève, cette histoire de Constitution, je ne crois pas que ce soit actuellement, en période économiquement difficile, avec des caisses de pension d'Etat à éponger, des licenciements dans le secteur bancaire, son obsession no 1.

     

    Il conviendra certes, comme pour toute votation, d'expliquer les enjeux. En donnant la parole à tous. Les partisans. Les opposants. Mais de grâce, laissons l'instinct patriote là où il est. Il n'appartient ni à la gauche, ni à la droite. Ni aux pro, ni aux anti. Ni aux progressistes, ni aux conservateurs. Il est du ressort intime de chaque cœur. Et nul n'a, dans ce pays, à se juger soi-même - on son camp idéologique - plus patriote qu'un autre.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Indivisible

     

    Sur le vif - 02.08.12 - 12.29h

     

    "Ce sont les Suisses d'origine étrangère, ceux qui ont trouvé une nouvelle patrie en la Suisse, qui parlent le mieux de la Suisse", déclarait hier, sur le Grütli, le président de la Société suisse d'utilité publique.


    Nul doute que les personnes dont parle M. Gerber parlent fort bien de ce pays qu'elles ont choisi et qu'elles aiment. Mais je n'aime pas cette manière de renverser le rejet de l'autre en laissant entendre qu'un Suisse de vieille date serait moins habilité à émouvoir, lorsqu'il évoque la communauté nationale.


    Et puis, surtout, à quoi bon créer des catégories de Suisses ? Il n'y pas de "Suisses d'origine étrangère", dans une saine conception républicaine de l'intégration. Il n'y a que des Suisses, tout court. A mes yeux, à partir de la minute où une personne obtient la naturalisation, elle est, de façon totale, ma compatriote. Elle a les mêmes droits, les mêmes devoirs que moi. Il m'est assez égal, au fond, qu'elle soit d'origine étrangère.


    La nationalité ne se divise pas. Il est tout aussi faux de se méfier des "Suisses d'origine étrangère" que... de les encenser particulièrement, Cher M. Gerber. Sauf à créer des communautarismes à l'intérieur de l'appartenance républicaine. Ce qui est le début de la fin.

     

    Pascal Décaillet