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Sur le vif - Page 734

  • "Cela s'appelle démocratie" - 431 avant JC

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    Sur le vif - Lundi 29.06.15 - 09.32h

     

    XXXVII. χρώμεθα γὰρ πολιτείᾳ οὐ ζηλούσῃ τοὺς τῶν πέλας νόμους, παράδειγμα δὲ μᾶλλον αὐτοὶ ὄντες τισὶν ἢ μιμούμενοι ἑτέρους. καὶ ὄνομα μὲν διὰ τὸ μὴ ἐς ὀλίγους ἀλλ' ἐς πλείονας οἰκεῖν δημοκρατία κέκληται*· μέτεστι δὲ κατὰ μὲν τοὺς νόμους πρὸς τὰ ἴδια διάφορα πᾶσι τὸ ἴσον, κατὰ δὲ τὴν ἀξίωσιν, ὡς ἕκαστος ἔν τῳ εὐδοκιμεῖ, οὐκ ἀπὸ μέρους τὸ πλέον ἐς τὰ κοινὰ ἢ ἀπ' ἀρετῆς προτιμᾶται, οὐδ' αὖ κατὰ πενίαν, ἔχων γέ τι ἀγαθὸν δρᾶσαι τὴν πόλιν, ἀξιώματος ἀφανείᾳ κεκώλυται. [2] ἐλευθέρως δὲ τά τε πρὸς τὸ κοινὸν πολιτεύομεν καὶ ἐς τὴν πρὸς ἀλλήλους τῶν καθ' ἡμέραν ἐπιτηδευμάτων ὑποψίαν, οὐ δι' ὀργῆς τὸν πέλας, εἰ καθ' ἡδονήν τι δρᾷ, ἔχοντες, οὐδὲ ἀζημίους μέν, λυπηρὰς δὲ τῇ ὄψει ἀχθηδόνας προστιθέμενοι. [3] ἀνεπαχθῶς δὲ τὰ ἴδια προσομιλοῦντες τὰ δημόσια διὰ δέος μάλιστα οὐ παρανομοῦμεν, τῶν τε αἰεὶ ἐν ἀρχῇ ὄντων ἀκροάσει καὶ τῶν νόμων, καὶ μάλιστα αὐτῶν ὅσοι τε ἐπ' ὠφελίᾳ τῶν ἀδικουμένων κεῖνται καὶ ὅσοι ἄγραφοι ὄντες αἰσχύνην ὁμολογουμένην φέρουσιν.

    XXXVII. - "Notre constitution politique n'a rien à envier aux lois qui régissent nos voisins ; loin d'imiter les autres, nous donnons l'exemple à suivre. Du fait que l'État, chez nous, est administré dans l'intérêt de la masse et non d'une minorité, notre régime a pris le nom de démocratie. En ce qui concerne les différends particuliers, l'égalité est assurée à tous par les lois ; mais en ce qui concerne la participation à la vie publique, chacun obtient la considération en raison de son mérite, et la classe à laquelle il appartient importe moins que sa valeur personnelle ; enfin nul n'est gêné par la pauvreté et par l'obscurité de sa condition sociale, s'il peut rendre des services à la cité. La liberté est notre règle dans le gouvernement de la république et dans nos relations quotidiennes la suspicion n'a aucune place ; nous ne nous irritons pas contre le voisin, s'il agit à sa tête ; enfin nous n'usons pas de ces humiliations qui, pour n'entraîner aucune perte matérielle, n'en sont pas moins douloureuses par le spectacle qu'elles donnent. La contrainte n'intervient pas dans nos relations particulières ; une crainte salutaire nous retient de transgresser les lois de la république ; nous obéissons toujours aux magistrats et aux lois et, parmi celles-ci, surtout à celles qui assurent la défense des opprimés et qui, tout en n'étant pas codifiées, impriment à celui qui les viole un mépris universel".

     

    *** Thucydide - Guerre du Péloponnèse - Livre II - Chapitre XXXVII - Discours de Périclès : oraison funèbre des guerriers morts pendant la première année de guerre - 431 avant JC.

     

     

  • Cornavin : le noeud n'est pas seulement ferroviaire

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    Sur le vif - Dimanche 28.06.15 - 16.07h

     

    En titrant hier après-midi « Extension de Cornavin estimée à 1,652 milliard : soulagement à Genève », et en maintenant ce titre tout le week-end, la version électronique de la Tribune de Genève manque sa cible à deux reprises.

     

    D’abord, on se demande qui a elle a dû « omettre » d’interroger pour oser nous parler de « soulagement » devant une somme pareille, même partagée par la Confédération, qui vient s’ajouter à toutes les autres, en temps de vaches maigres. On veut bien que le clan de partisans du projet se dise « soulagé », mais enfin, dans le vaste univers de Genève, il existe d’autres voix qui, assurément, doivent l’être un peu moins. Soit parce qu’il existerait des variantes moins onéreuses, un peu vite écartées dans les travaux préparatoires, comme s’il avait fallu tout boucler à toute vitesse. Soit, surtout, parce que le projet même « d’extension de la gare Cornavin » n’est peut-être pas jugé unanimement comme la seule solution pour l’avenir ferroviaire de Genève.

     

    Ensuite et surtout, en maintenant ce titre tout le week-end, on se dit que nos aimables confrères – et sœurs – de la TG ont peut-être « omis » (que d’omissions, décidément) de prendre connaissance, hier soir, assez tard il est vrai, du texte publié sur son site Facebook par le ministre des Finances, Serge Dal Busco, qui est une véritable douche glacée face à la multiplication de rêves de grands travaux pour lesquels on n’a pas le premier sou. Ce blog, très clair et très courageux, marque, pour la première fois officiellement sous la plume d’un conseiller d’Etat en charge, la fin du temps des illusions pharaoniques. Sans aucune ambiguïté, le Grand Argentier nous dit qu’on ne pourra pas tout faire. Il faudra choisir. Il n’est pas sûr, à le lire, que le projet dit « d’extension de la gare Cornavin » fasse partie de ses priorités.

     

    Reste l’essentiel : la gare Cornavin doit-elle demeurer, dans vingt, trente, cinquante ans, le nœud principal du trafic ferroviaire à Genève ? Dans de nombreuses autres villes de taille comparable, l’essentiel du trafic national et international converge en une gare extérieure à la gare historique (à laquelle elle est immédiatement reliée, bien sûr). Et le premier édifice, datant du dix-neuvième siècle, au centre-ville, se trouve naturellement attribué aux pendulaires du trafic régional. Nous avons appris que d’autres variantes, présentant les choses comme cela, avaient été un peu vite ignorées dans les travaux préparatoires. C’est dommage : certaines d’entre elles, moins onéreuses, mériteraient peut-être d’être prises en compte.

     

    En clair, il y a de quoi s’interroger sur une certaine précipitation, au Canton comme à la Ville, liée à une certaine légèreté. Voire, plus grave, la mise à l’écart un peu trop rapide de variantes fort intéressantes. Face à ces méthodes étranges, le ministre des Finances, quitte à jeter un léger froid à l’interne du collège, est parfaitement dans son rôle, dans ses bottes, dans sa mission, lorsqu’il appelle à des choix de rigueur et de lucidité. On nous permettra, pour notre part, de lui faire davantage confiance qu’à d’autres. Pour les raisons exprimées dans notre blog précédent, liées au métier d’ingénieur, à la notion de sérieux et de maîtrise des coûts sur la durée. La notion, aussi, de crédit du politique et de respect de la parole donnée.

     

    Dans toute cette affaire de Cornavin, il y a quelque part un sacré nœud. Et il n’est pas sûr du tout que ce dernier soit seulement ferroviaire.

     

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Genève : méfions-nous des vendeurs de mirages

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    Sur le vif - Samedi 27.06.15 - 16.44h

     

    Extension de la gare, CEVA, PAV : des coûts qui s'envolent, des miroirs aux alouettes. Des maquettes, pour enfants et familles. Une politique pour faire frissonner les songes. Alors que les caisses sont vides. On fait rêver le peuple avec des projets de prestige. On n'a pas de quoi assurer leur financement. Une politique d'investissements plus modeste, mieux ciblée sur les besoins les plus criants de la population, comme la rénovation des écoles, serait la bienvenue. Personne n'en voudrait au Conseil d'Etat - en tout cas, pas moi - de prendre cet automne le virage d'une politique plus concrète, moins gourmande en milliards, mieux adaptée aux plus nécessiteux, moins prestigieuse en termes de blason. En un mot, davantage au service de la population. Sans oublier de réduire la dette. Pour nous, et surtout pour nos enfants.

     

    Bien sûr, il y aurait là un virage à 180 degrés par rapport à ce chant de la dorure, ce rêve de la plus haute tour, ces mirages verbaux des années Mark Muller et suivantes. Mais, cette rhétorique de bluff marketing ayant totalement échoué, et plus personne n'en étant dupe, le crédit même du politique en ayant été entamé, l'opinion publique n'en voudrait pas à nos autorités si elles annonçaient d'ici Noël un redimensionnement.

     

    En Suisse, les gens aiment le concret. Ils se méfient des beaux discours, détestent les promesses non tenues. Dans notre pays, par dessus tout, le peuple, à juste titre, fait payer très cher aux autorités les dépassements de crédits non justifiés. Adolf Ogi en a su quelque chose : j'étais à Berne, j'ai vécu de très près sa gloire, lorsqu'il faisait survoler à François Mitterrand (j'y étais !), du haut d'un hélicoptère, les vallées uranaises menant au Saint-Gothard. Mais j'ai aussi vécu son inexorable chute, puis son transfert dans un autre Département, sans gloire, pour cause d'explosion des coûts des NLFA. M. Chaudet et les Mirages, ça vous dit quelque chose ? M. Bonvin et la Furka ?

     

    On en a vu défiler, des ministres sympathiques, populaires, "proches des gens". Et les mêmes, s'écrouler. Pour cause de manque de sérieux dans l'évaluation financière - et surtout dans le suivi concret - d'un projet. Ce genre de dossiers, il vaut mieux éviter de les confier à des magistrats trop légers.

     

    Je parle ici comme citoyen. Mais je parle aussi comme petit entrepreneur, depuis bientôt dix ans. Faisant tourner sa boîte, parfois dans la difficulté, sur la base d'un principe absolu, dont je ne me suis jamais départi : ne jamais dépenser, même pour les investissements en matériel, le moindre centime qui ne soit pas à moi. C'est très Suisse, je sais. Très prudent. Peut-être trop. Mais ça garantit l'indépendance. Et ça donne du courage, pour l'avenir.

     

    J'ajoute une dernière chose : mon père était ingénieur, et entrepreneur. Travailleur acharné. Toute mon enfance, à table, je le voyais hanté, chantier après chantier, par la question des dépassements de crédits, c'est inhérent au métier, on ne sait jamais ce qui peut advenir. Donc, parlant des coûts réels par rapport aux coût estimés, je crois savoir un peu de quoi je parle.

     

    Pascal Décaillet