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Sur le vif - Page 1163

  • Ueli Leuenberger : combien de divisions ?


    Sur le vif – Vendredi 25.07.08 – 19.20h

    Dans l’affaire Nef, il n’est plus possible de se brancher sur une onde publique sans entendre, à tout moment, le président des Verts suisses, Ueli Leuenberger. L’impatience de ce dernier à voir Samuel Schmid tourner les talons au plus vite, jusqu’à ce perfide et mielleux « conseil de repos pour prendre une décision sur son avenir» qu’il vient de murmurer, il y a une heure, devient franchement insupportable. 

    Qui d’entre nous a, jusqu’à l’éclatement de l’affaire Nef, entendu une seule fois Ueli Leuenberger s’intéresser peu ou prou aux questions de politique de sécurité ? Aujourd’hui, touché par un miraculeux Chemin de Damas, voilà notre homme-pastèque (vert dehors, très rouge dedans) comme illuminé par la réforme du système militaire suisse. Il faut, martèle-t-il sans la moindre contradiction, en finir avec la guerre froide (comme si rien n’avait été entrepris dans les années Villiger, puis Ogi), il faut repenser le système, il faut ceci, cela : foudroyante, sa nouvelle passion ! Le parfum du laurier, la quête des étoiles, l’auraient-ils soudain assailli ?

    Foudroyante, et transparente comme l’eau qui jaillit du glacier : beaucoup plus que l’avenir de notre système de sécurité, c’est l’opportunité de placer un Vert au Conseil fédéral qui intéresse Ueli Leuenberger. À la faveur, par exemple, d’une élection partielle, en pleine législature. Une gourmandise, au demeurant, un peu excessive quand on n’a (malgré mille promesses de records historiques, et mille miroitements de mode, pendant la campagne) même pas passé la barre des 10% aux dernières élections fédérales.

    A la vérité, Ueli Leuenberger appartient (tout comme son inénarrable collègue, le Zougois Josef Lang, également omniprésent sur les antennes) à une mouvance qui aspire, in fine, à la suppression de l’armée suisse. Ce qui est leur droit le plus strict. Mais alors, ne soyons pas dupes de ce petit jeu de masques et d’opportunismes, où la seule couleur qui vaille, au-delà du vert, du rouge et des pastèques, demeure, depuis la nuit des temps, la soif du pouvoir.

  • Un très grand Suisse nous a quittés



    Sur le vif – Jeudi 24.07.08 – 22.25h

    De mes hauteurs valaisannes, de retour d’une somptueuse marche sous la Fenêtre d’Arpette, j’apprends, comme des milliers de mes compatriotes, en écoutant Forums et un excellent portrait de mon confrère Roger Guignard, la mort de Kurt Furgler. Stupeur, même si l’homme était octogénaire et réputé affaibli. Foule d’images, qui, à travers lui, sont celles de l’Histoire suisse de l’après-guerre, dont il aura été (avec le socialiste bâlois Tschudi) le plus brillant représentant. Souvenirs des deux ou trois moments privilégiés où j’ai eu l’honneur de l’interviewer personnellement : sur le bateau en partance de Lucerne pour le Grütli, le 1er août 1991, jour du 700e de la Confédération ; sur la Place fédérale, en septembre 1998, pour le 150e de la Suisse moderne. Des festivités, rien de plus : il était déjà, à cette époque, le Furgler de l’après-Furgler.

    Souvenirs, encore : son élection, fin 1971 (il avait, j’ignore pourquoi, une béquille), sur la TV noir et blanc de mes parents ; sa magistrale intervention, à Genève, en novembre 1985, devant Reagan et Gorbatchev, que je découvrais de mon lit d’hôpital. Et puis, mille autres épisodes, de son cas de conscience sur l’avortement à l’échec de la police fédérale de sécurité. L’affaire des mirages, son rôle dans la question jurassienne, je ne les ai connus que plus tard, par le filtre de l’Histoire.

    Les éditos, demain matin, seront élogieux, et ça ne sera que justice. Les grands conseillers fédéraux de l’après-guerre tiennent sur les doigts d’une main : Tschudi, Furgler, et j’ajoute Jean-Pascal Delamuraz. Ceux qui, non seulement, ont façonné l’Histoire suisse, mais, plus encore, ceux qui nous l’ont racontée, en ont fait quelque chose qui, sans aller jusqu’à la légende, relève tout au moins de la geste et du souffle. Encre, qui, pour longtemps, imbibera les livres d’Histoire. Trace, dans nos mémoires. Correction de l’inéluctable. Parfum d’aventure humaine, quelque part dans la brutalité minérale de l’attendu.

    Surtout, le destin de Kurt Furgler corrige une sottise trop répandue, qui sert souvent d’excuse aux médiocrités : l’idée que la Suisse n’aimerait pas (et jusqu’à les rejeter) les têtes qui dépassent. Faux, archi-faux : du Genevois James Fazy au Valaisan Maurice Troillet, du Vaudois Henri Druey au Bâlois Tschudi, le souffle de l’esprit et de l’innovation n’a cessé, à travers les âges, de traverser notre communauté nationale. Que nous en ayons moins le culte que nos voisins français est une chose ; que nous prétendions les gommer en est une autre, inacceptable.

    Reste l’incroyable classe de cet homme, qui vient de nous quitter. Son français parfait, sans le moindre accent. Son incessant combat pour réformer nos institutions. Ses galons de brigadier, qui en font le conseiller fédéral le plus gradé du vingtième siècle. Son intelligence, sa rapidité de synthèse. « Un homme de feu », a résumé François Lachat, qui en sait quelque chose, ce soir dans Forums. Un homme de feu, oui, et on aura tout dit.

    Pascal Décaillet


  • Un tout petit « crime de guerre »

    Sur le vif - Jeudi 17.07.08 - 09.00h

    Il est un peu fatigant d’entendre répéter sur toutes les ondes, de façon brute et sans contexte, que l’usurpation de l’emblème de la Croix-Rouge, lors de la libération d’Ingrid Betancourt, est un crime de guerre.

    Non que ce soit faux. Juridiquement, selon les Conventions de Genève, c’est même parfaitement exact. Seulement, quand on donne les informations, même dans des modules très courts, il ne suffit pas toujours de se contenter sèchement de la vérité objective du droit.

    Le moins n’est-il pas, dans cette affaire, d’interroger le contexte ? Si cet expédient était le seul, fallait-il y renoncer, et laisser mourir l’otage aux mains des FARC ? Ces dernières sont-elles autre chose, par leurs méthodes, que des terroristes ? Ce cheval de Troie était peut-être impur, illégal, nourrira sans doute mille discussions de juristes internationaux bien assis et bien au chaud, mais en attendant, INGRID BETANCOURT EST LIBRE.

    « Crime de guerre » ? Peut-être, sur le papier. Mais utiliser, sans nuance, la même expression pour l’opération Betancourt que pour les horreurs de la Seconde Guerre mondiale, du Vietnam ou des Balkans, il y a là atteinte au sens. Ce qui, sans être un crime, n’en constitue pas moins une faute.