Sur le vif - Lundi 08.05.23 - 16.44h
Le 12 septembre 1998, en direct de la Place fédérale, au milieu d'une foule immense, j'ai animé, pendant plusieurs heures, debout et en mouvement à travers la masse des gens, l'une des émissions les plus délirantes de ma vie.
La radio debout, dehors, en mouvement. Micro sans fil dans la main droite. Montre radiocontrôlée dans la gauche. Casque sans fil, pour le retour de l'émission, pleins tubes dans mes oreilles. C'est tout, absolument tout. Aucune note. Juste des gens, autour de moi, la foule, des invités possibles, à l'arraché. Et la vie, oui simplement la vie. Loin du studio. Loin des structures, la vie, là où elle bat. La radio, c'est la vie.
C'était le jour exact du 150ème anniversaire de la Suisse fédérale. Ce jour-là, la Diète fédérale avait accepté la nouvelle Constitution, moins d'un an après le Sonderbund. La Suisse devenait un Etat fédéral. Les radicaux avaient gagné. Il fallait réconcilier le pays.
Alors, 150 ans plus tard, au milieu de la foule, j'ai aligné les heures d'émissions, en interviewant quasiment tous les conseillers fédéraux vivants : ceux en fonction en 1998, et tous les anciens, venus pour l'occasion. Pour la dernière fois, je crois, j'ai eu l'honneur, par exemple, de m'entretenir avec Kurt Furgler (1971-1986).
C'était une émission folle. Pendant des années, nous n'avons fait que des émissions folles. Au 12.30h, puis à Forum. Mon concept était simple : pas de studio, on sort, on va à la rencontre de la vie, on se greffe sur l'événement, là où il se produit. Cette formule, simple et dynamique, fut tant de fois gagnante, pendant tant d'années. D'ailleurs, deux semaines plus tard, fin septembre 98, j'étais sur l'Oder, littéralement sur le fleuve, à Francfort, l'autre Francfort, celle que j'aime, ex-DDR, la ville de Kleist, avec plein d'invités en direct, sur la frontière exacte germano-polonaise, à l'occasion des élections allemandes, la fin de Kohl, l'arrivée de Schröder.
Alors oui, j'aime le 12 septembre 1848, et il ne me gênerait que cette date devienne fériée. Mais j'aime, encore plus, la radio, le direct, le rythme, le souffle, l'imprévu. J'aime l'Histoire en marche. J'aime coller à l'événement, sans le lâcher. Frissonner avec lui.
La vie, au fond. Simple et sublime.
Pascal Décaillet