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  • Ni "peur", ni "repli", juste l'attachement au pays

     

    Sur le vif - Mercredi 21.10.15 - 02.39h

     

    Je conteste absolument que la "peur des migrants" soit l'explication principale de la victoire de l'UDC dimanche. Il faut d'ailleurs cesser d'imputer aux "peurs", "crispations", "mouvements de repli", le vote conservateur en Suisse.

     

    Il y a quelque chose de beaucoup plus profond : une part importante de nos compatriotes ne veut ni de la gauche, ni surtout de la droite libérale, libre-échangiste à souhait, gommeuse d'identité nationale et de valeurs.

     

    Cette droite-là, alliée à certains patrons peu soucieux de notre corps social, immigrationnistes par profit à court terme, adeptes d'une sous-enchère qui n'a absolument pas été contrôlée depuis 2002, régresse face à une autre droite, porteuse d'autres valeurs.

     

    Ne sous-estimons en aucun cas l'initiative de Franz Weber, ni celle du 9 février 2014. Sachons en lire les messages : attachement physique, émotif, filial, au paysage du pays, besoin d'équilibre et de régulation des flux migratoires, volonté de conserver une Suisse à taille humaine, où il fasse bon vivre.

     

    Il n'y a là rien de xénophobe, aucun abaissement de l'Autre, aucune "peur", aucun "repli". Il y a juste la volonté raisonnée de poursuivre avec simplicité la lente, patiente et magnifique construction de nos ancêtres.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Guignol's Band

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    Sur le vif - Mardi 20.10.15 - 19.35h

     

    Ce qui époustoufle, dans le Sons et Lumières que vient de donner l’Entente en vue du second tour de la course aux Etats, à Genève, c’est la totale surdité entre les uns et les autres. Oui, l’Entente est sourde. Beethovenienne. Hélas, sans la capacité de nous livrer les derniers Quatuors à Cordes du génial musicien : il les avait conçus en ne les « entendant » que dans la profondeur de son silence intérieur.

     

    Le problème numéro un de l’Entente ne réside pas dans les choix des uns et des autres, ces derniers relèvent du droit au suicide, que toute âme plus ou moins humaniste voudra bien tolérer. Non, l’immensité du pataquès procède d’une hallucinante impréparation. Car enfin, en Suisse, le calendrier des élections fédérales est connu des décennies à l’avance. Un mordu de l’agenda, si ça l’amuse, peut parfaitement prévoir la date du dimanche électoral d’octobre 2035.

     

    Le président du PLR genevois, celui du PDC, devaient, j’imagine, subodorer quelque peu l’existence d’une échéance électorale nationale le dimanche 18 octobre, puis celle d’un deuxième tour le dimanche 8 novembre. Ces choses-là, y compris dans leur aspect tactique, celui du petit jeu entre partis, peuvent un peu s’anticiper, non ? Or, à quoi venons-nous d’assister ? A une tragicomédie de l’impéritie. A un super Brico-Loisirs de l’improvisation de l’ultime minute. A un dialogue de sourds.

     

    Les partis font ce qu’ils veulent. Ils ont le droit de s’allier avec qui ils veulent. Tout au plus pourraient-ils nous épargner les couplets si peu crédibles sur la « morale » et les « valeurs », il y a quand même un moment où trop prendre les gens pour des demeurés commence à présenter un danger de crédibilité.

     

    Les puissants esprits de l'Entente genevoise n’ont rien vu venir, ils sont pourtant là pour cela, un peu, non ? Ils n’ont rien anticipé. Ils ont géré un lendemain et un surlendemain d’élections fédérales comme un enfant de chœur dépassé par les palpitations de voir surgir une créature féminine au sortir de la sacristie. Ils ont été totalement dépassés par les événements. Ils avaient pourtant des mois, des années, pour voir venir une échéance parfaitement prévisible.

     

    A partir de là, longue vie au duo de gauche au Conseil des Etats. Et vivement 2035.

     

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Conservateur, lucide et en parfaite santé : mais oui, c'est possible !

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     Sur le vif - Lundi 19.10.15 - 14.42h

     

    « Vote de la peur », « vote du repli » : encore et toujours, nos belles âmes éditoriales des lendemains d’élections se complaisent dans ce vocabulaire, qui voudrait faire des vainqueurs des citoyens atteints de pathologie. Ils auraient voté, non en adultes, non en connaissance de cause, mais à leur corps défendant : en vertu, au sens médical, de réflexes immunitaires, par conjuration d’une crainte profonde. L’électeur conservateur, en Suisse, ne glisserait pas son bulletin en adulte sain et vacciné, en fonction d’une analyse de la situation, d’une vision de la politique. Non, il n’agirait qu’avec l’infinie faiblesse d’un être apeuré. Le corps électoral aurait « paniqué » face à la vague de migrations, « cédé aux sirènes », perdu les nerfs.

     

    Pitoyable analyse. Celle d’une génération d’éditorialistes qui, au moins depuis 1992, veut absolument nous décrire la montée du sentiment conservateur, en Suisse, comme l’atteinte du corps national par une fébrilité maligne, dans tous les sens de cet adjectif, celui de la santé, celui de la possession diabolique. Pour contrer ce phénomène, ils ont tout essayé, depuis un quart de siècle, tous les exorcismes, ils ont diabolisé, démonisé, ostracisé, rien n’y fait : le phénomène demeure, prend de l’ampleur.

     

    Ils ont tort. Voter pour une Suisse souveraine, indépendante, régulant ses flux migratoires (et non fermant ses frontières, comme ils l’affirment de façon mensongère et caricaturale), une Suisse préservant son corps social en luttant contre la sous-enchère salariale, une Suisse soucieuse de la qualité de son agriculture, celle de ses paysages, respectant ses animaux, une Suisse qui ne dénature pas son Plateau en construisant tous azimuts, ne relève en rien d’une maladie. Mais d’une série de constats, procèdant de l’exercice civique et de celui de la raison. Il n’y a là nulle fièvre, nulle éruption, seulement un choix politique assumé, articulé autour de l’attachement au pays, oui le patriotisme, le souci d’en préserver les beautés et les équilibres, celui d’un corps social sain et solidaire, dans une démographie dont nous puissions demeurer les maîtres, ce dernier point n’étant pas synonyme de fermeture, mais simplement de contrôle des flux.

     

    On a vu ces thèmes dans l’initiative des Alpes (toujours pas appliquée, vingt ans après), et dans le oui au texte de Franz Weber. Et puis aussi, bien sûr, le 9 février 2014. Régulièrement, le corps électoral nous délivre des signaux, que d’aucuns, hélas, refusent de lire. A bien des égards, cette montée du « conservatisme », depuis 1992, en rappelle une autre : l’ascension, dans la résistance, du courant catholique-conservateur, ou catholique-social, ou chrétien-social, de 1848 à 1891, soit entre la toute-puissance radicale née du Sonderbund et l’arrivée, enfin, du Lucernois Joseph Zemp, premier « PDC » (avant la lettre !) au Conseil fédéral, le 17 décembre 1891, l’année de Rerum Novarum, l’Encyclique de Léon XIII sur la Doctrine sociale.

     

    Dans les cantons protestants aussi, des courants émergeaient, contestant non le Progrès en tant que tel, mais la foi des radicaux, presque dogmatique, dans une industrialisation trop rapide du pays, effrénée même parfois, à partir du moment où les capitaux s’ouvraient. Aux yeux de beaucoup de nos compatriotes, entre 1848 et 1891, tout allait trop vite, l’Argent-Roi et le profit prenaient trop de place, défigurant la Suisse, il fallait revenir à des valeurs plus solides, fondatrices du pays profond.

     

    La victoire historique de l’UDC, hier, et avec elle le glissement à droite sous la Coupole fédérale, ne sont pas une Révolution, mais un sérieux et tangible déplacement du curseur. Pour quatre ans. Il aura des conséquences sur  la mise en application du 9 février 2014, sur l’affirmation de notre souveraineté politique, sur nos tonalités dans les négociations internationales, sur la réforme de nos assurances sociales, sur notre politique énergétique (on va soudain se sentir beaucoup moins pressé de sortir du nucléaire), sur notre soutien et notre valorisation de l’agriculture suisse. Au sein de la famille de droite, particulièrement dans le binôme UDC-PLR, le rapport de forces ne sera pas le même que dans la législature précédente. Sur la question centrale des bilatérales, il faudra bien que certains fassent des concessions. Disons, de part et d’autre. Allez oui, disons cela.

     

     

    Pascal Décaillet