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  • Genève: le nouveau système électoral est nul

     

    Sur le vif - Dimanche 27.10.13 - 10.14h

     

    A Genève, dans cet interminable automne électoral (les gens commencent vraiment à en avoir marre), tout aura été vécu à l'envers.



    Pendant la première partie (de la rentrée scolaire au 6 octobre), certains n'ont voulu voir que la campagne du Conseil d'Etat, et passer totalement au second plan la campagne parlementaire. Au niveau qui est le mien, je me suis au contraire efforcé de valoriser l'enjeu parlementaire, accueillant en cinq semaines une centaine de candidats au Grand Conseil, tous partis confondus, chance égale étant accordée aux nouveaux partis.



    Maintenant que c'est la campagne du Conseil d'Etat, d'innombrables commentateurs, à commencer par ceux qui n'ont pas digéré les résultats du 6 octobre au Grand Conseil, nous refont hystériquement la campagne parlementaire. "Tel parti est génial, tel parti est nul". etc.



    Ce qu'il faut penser de tel ou tel parti, le crédit qu'il convient d'accorder à chacun, cela a été tranché le 6 octobre. C'est FINI. C'est plié. C'est derrière. Mais, par une singulière forme de déni, ils se refusent à l'accepter.


    Oui, ils continuent de se comporter comme si cette nouvelle répartition des forces - qui va marquer pour cinq ans la vie politique genevoise - n'avait été souverainement scellée le 6 octobre. Ils continuent de faire le procès (ou l'éloge) des partis, alors que la campagne du 10 novembre est l'affaire d'un casting d'hommes et de femmes: sept à choisir, parmi onze, rien de plus au fond.



    Il est temps de commencer à le dire: ce nouveau système électoral est nul, et doit être modifié, même si la nouvelle Constitution vient d'entrer en vigueur. Onze semaines de campagne, c'est beaucoup trop long. Les deux tours du Conseil d'Etat ne servent strictement à rien. On fait deux fois la campagne avec les mêmes, enfin une partie des mêmes. Au premier tour, on vote le gouvernement à l'aveugle, sans le déduire peu ou prou de la composition parlementaire. Ca ne va pas du tout. Ce nouveau système est tout simplement nul, j'y reviendrai sous peu.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Aux deux du FA-18, à leurs familles

     

    Vendredi 25.10.13 - 17.22h

     

    Je pourrais dire que j’écris ces lignes comme ancien militaire, ayant passé, dans les années 70 et 80, quelque 500 jours sous les drapeaux. Mais au fond non, je les écris comme citoyen. Comme compatriote. De qui ? De ces deux hommes, un pilote et un médecin, décédés mercredi, quelque part en Obwald, dans le crash d’un FA-18. Dans ce drame, ça n’est pas seulement l’aviation militaire qui est en deuil, ni l’armée, mais notre communauté nationale. La langue allemande dit « Gemeinschaft », c’est plus fort et plus intime que « communauté », il faudrait traduire par « lot commun », ou « sentiment commun d’appartenance ». Il y a tant de mot allemands, de l’ordre du sentiment, intraduisibles en français.

     

    On nous dit souvent que la Suisse est une nation de volonté, « Willensnation ». C’est sans doute vrai. Mais trop le dire, en forçant sur les Lumières trop cristallines de la Raison, oui trop forcer sur ce discours de géomètre, c’est faire l’impasse sur la puissance du sentiment. Je crois au pays physique, je l’ai déjà dit, à la délimitation d’un paysage, à la reconnaissance de l’habitant au milieu de repères qui sont à la fois ceux de la géographie et de l’émotion.

     

    Et là, le choc fatal d’un professionnel du vol militaire avec le pays physique, justement. Cette Suisse qui n’est pas la Belgique, ni la plaine de Silésie, mais cet enchevêtrement de vallées, de ravins, avec ses pics de granit et la verticalité glissante de ses pentes. Être pilote militaire en Suisse, c’est être un as. Nous rendons-nous assez compte que deux hommes, mercredi, dans l’exercice de leurs fonctions, sont morts au service de notre pays ? Quand j’y pense, je sens résonner en moi ce mot intraduisible, « Gemeinschaft », oui ma part commune avec ces deux hommes, la nôtre à tous. La communauté de nos destins. Au sein d’une même nation. Dans le théâtre d’un même paysage. Saisis de cette même fragilité, celle de la vie et du mystère de la mort.

     

    Aux familles de ces deux compatriotes, j’adresse une immense sympathie.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Serge Dal Busco : la braise et le feu

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    Sur le vif - Vendredi 25.10.13 - 10.31h

     
    Les progrès de Serge Dal Busco, en matière de communication, ont été foudroyants depuis le début de la campagne. Je parle vraiment, ici, de techniques très précises pour marquer des points dans le discours, toutes choses qui d'ailleurs s'exercent et s'apprennent.
     

    J'ai déjà souligné ici son excellente prestation, seul face caméra, dans la "Minute pour convaincre" de la TG: il y laisse paraître son envie, sa chaleur, densifie le message sous la pression du timing, fonce vers l'essentiel, performe. Dans mes ateliers avec mes étudiants, sur l'art d'habiter la prise de parole, je prendrai cette séquence en exemple.


    Et puis, l'incandescence d'une réplique: "Je ne suis pas un bétonneur, je suis un bâtisseur". Spontané, ou préparé pour être casé au bon moment, juste dans l’occasion guettée, ce que les Grecs appellent le "kaïros" ?
     

    Enfin, l'homme se corrige. On lui balance un petit pamphlet sur son abus du mot "solution", il en tire immédiatement les conséquences.
     

    Demeure, certes, la lourdeur d'un glossaire terriblement révélateur ("partis gouvernementaux", "partis responsables", "action", "compromis", "construction"), où l'homme en fait beaucoup trop pour bien nous induire à penser qu'il est adulte, raisonnable et sait travailler en équipe. Là, il camoufle quelque chose. Sans doute - j'y reviendrai - la vraie nature de son ambition politique, que nous ne tarderons pas à découvrir après quelques mois d'état de grâce: totale, intransigeante, personnelle, solitaire. Le feu. Celui qu'il tente de dissimuler, ou d'atténuer, par le verbe, mais jaillit dans les braises de son regard.
     
     
     
    Pascal Décaillet