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  • Ce Conseil d'Etat a échoué

     

    Sur le vif - Vendredi 22.02.13 - 19.05h

     

    Faut-il deux, trois, quatre ou cinq candidats sur la liste ? Chaque parti, ces jours, se pose la question, et tente de répondre en fonction d’une stratégie encore bien nébuleuse : nous sommes, au soir de ce 22 février 2013, à sept mois et demi du premier tour de l’élection au Conseil d’Etat ! La campagne n’a pas encore commencé, tant de choses peuvent se produire d’ici l’automne.

     

    Il m’est, pour ma part, parfaitement égal que le PDC parte avec deux candidats, le PLR trois, quatre ou cinq, les socialistes quatre. Je n’arrive pas encore à me projeter sur la législature à venir, si ce n’est, dans une appréhension du futur où la part de l’instinct le dispute à celle du rationnel, un profond, un puissant besoin de changement. Dans la politique à mener. Dans les objectifs pour Genève. Donc, dans les équipes à installer aux affaires, pour le Grand Conseil comme pour le gouvernement. Besoin de nouveaux partis au pouvoir. Besoin, tout simplement aussi, de nouvelles personnes pour incarner la politique de demain.

     

    Pourquoi ? Mais parce qu’avant de parler de la législature 2013-2018, on pourrait quand même dire deux mots de celle qui n’est pas encore achevée, la 2009-2013. Je vous le dis de suite : l’une des plus mauvaises depuis la guerre. Les promesses de l’équipe au pouvoir n’ont pas été tenues. Ni en matière de constructions, ni en matière de logements, ni en matière de grands projets (il est où, le début de l’embryon du PAV ?), ni en matière financière. Sur tous ces sujets, essentiels, on nous a beaucoup fait miroiter, à l’automne 2009. Pour un résultat nul, ou presque.

     

    Que nous lègue ce Conseil d’Etat ? Un canton endetté, des décennies (quelle que soit l’issue du 3 mars) pour payer, nous les contribuables, les retraites des fonctionnaires. Une fonction publique hypertrophiée dans ses états-majors, notamment au DIP et au DIM. Une politique de sécurité qui ne s’est pas arrangée depuis la campagne de 2009, dont elle était pourtant le thème amiral. Un taux de chômage qui demeure, de loin, le plus élevé de Suisse. Une gestion catastrophique de la mobilité, que les travaux du CEVA, en cours et à venir, ne feront qu’envenimer. Des options stratégiques, dans les transports publics, qui provoquent la colère de la population. Des primes maladie beaucoup trop élevées, et une classe politique qui, malgré ses coups de menton contre Berne, n’a pas réussi à les enrayer. Un Département de l’Instruction publique submergé par les technocrates, au détriment du front de l’enseignement.

     

    Ce qu’a su faire cette équipe au pouvoir, c’est tout au plus du marketing. Le PAV : pas l’ombre d’un gratte-ciel à l’horizon, mais de superbes maquettes, oui. Les logements, néant, mais un plan directeur 2030 qui étincelle avec cinquante mille nouvelles habitations purement fictives, sorties de nulle part et auxquelles personne ne feint même de croire. La sécurité : des noms de code qui ont fait rire toute la République, un délice pour les Revues, mais rien sur le terrain, demandez aux pompistes de Perly ou Thônex. Le trafic de drogue qui continue de vivre ses plus belles heures. La prison de Champ-Dollon surpeuplée.

     

    Du marketing, oui. Ça, ils savent faire. L’exemple le plus ahurissant de déconnection du réel étant évidemment, avec palmes, celui du « Grand Genève », ce micmac transfrontalier juste bricolé dans les esprits si puissants de quelques rêveurs ou technocrates, sans la moindre légitimité venue d’en bas. Dans ces conditions, je trouve qu’il faut un certain souffle pour oser se représenter. Oh, ils vont nous baratiner d’ici l’automne, enjoliver le bilan, nous fredonner la chansonnette des adversaires qui n’auraient rien à proposer. Ils vont avoir le culot de nous rappeler qu’ils sont, eux, gouvernementaux, comme si on l’était par essence, et non par choix renouvelé du corps électoral.

     

    Cet automne, il vaudra la peine, pour le Parlement comme pour le Conseil d’Etat, de donner leur chance à de nouveaux partis. Surtout, à de nouvelles personnes pour incarner d’autres options politiques. Parce que là, Mesdames et Messieurs les sortants, la poudre aux yeux, le perlimpinpin, c’est bien joli, ça va un moment, vous nous avez déjà largement fait le coup en 2005 et 2009. Mais il y aura une autre réalité, funeste, mais mesurable et vérifiable, qui se dressera face à vous comme un mur : cela s’appelle un bilan.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Cinquante mille logements - Sur le papier !

     

    Sur le vif - Jeudi 21.02.13 - 16.20h

     

    On se pointe, on se pénètre d'airs très sérieux, on lance un chiffre, « cinquante mille logements d’ici 2030 », personne n’y croit, on le sait, mais on le balance quand même. On a beau arriver avec des centaines de pages, un concept marketing à décoiffer le brushing, le mot « envie » comme blason, personne n’oublie qu’on est en année électorale, que promettre monts et merveilles à si long terme n’engage à rien. Personne n’est dupe du primat de la communication électorale sur l’enjeu réel. La preuve ? Je vais vous la donner : les mots les plus durs, hier soir déjà, oh juste par échappées, par glissements, émanaient du propre camp du conseiller d’Etat.

     

    Pourquoi ne pas dire les choses franchement ? Les Genevois en ont plus que marre qu’on leur promette du logement théorique. Les cinquante mille de 2030 ils s’en foutent, ils préféreraient nettement cinq mille en 2013, ou 2014. Du palpable. Du visible. Di bon vieux béton qu’on peut toucher, avec des dalles que l’on coule, des armatures métalliques, l’odeur de glaise du chantier. Mais les cinquante mille virtuels de 2030, c’est l’avenir, version boule de cristal.

     

    Et puis, il y a cette tyrannie de l’inéluctable. On pose comme acquise la présence de cent mille personnes supplémentaires d’ici dix-sept ans. Il faudrait absolument s’y résoudre. Mais dire cela, c’est déjà un parti pris : la politique du laisser-faire démographique, du laisser envahir, là où on pourrait imaginer un aménagement plus raisonnable, plus mesuré, avec des constructions de qualité qui ne soient pas celles du baby-boom des années 50, 60, 70, dont des villes comme Onex, Lancy, Vernier ont vu le résultat.

     

    L’aménagement du territoire, bien au-delà de la LAT du 3 mars prochain, passionne les Suisses. L’initiative Ecopop se profile, qui pose d’essentielles questions concernant la nature du paysage, celle du relief, du rapport à la terre dans notre pays. Construire oui, mais pour qui ? L’initiative Weber, déjà, a donné des signaux. Les habitants de notre pays ne veulent tout simplement pas d’une Suisse de onze ou douze millions d’habitants. Et il faudrait, comme cela, à Genève, dans une idéologie de pure croissance libérale, à laquelle s’ajoute le credo transfrontalier, bétonner tous azimuts. A cela, beaucoup disent non, à Genève comme sur l'ensemble de notre pays, qui entrent en matière, eh oui, pour lier la question de l'aménagement du territoire à celle d'un contrôle - mesuré, mais réel - des flux migratoires.

     

    Vous avez remarqué ? Il y a quatre ans, c'était la CEVA. Quelques mois avant les élections, un bon vieux programme de bétonnage, aussi volontariste que virtuel, ça fait plaisir au patronat de la construction, et au patronat tout court, qui sans doute veillera à financer vos campagnes. Une fois réélus, vous pourrez vous permettre de redevenir beaucoup plus prudents. Au final: on construira, espérons-le tous, mais jamais à hauteur des cinquante mille promis, ni même de la moitié.

     

    Ces cinquante mille logements, ceux qui, hier, nous les ont brandis, le savent très bien. Mais voilà, il est pour certains d’entre eux  deux échéances autrement plus tangibles, plus réelles que celle de 2030 : le dimanche 6 octobre et le dimanche 10 novembre 2013.

     

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Le populisme du centre, connaissez ?

     

    Chronique publiée dans GHI - 21.02.13


     
    J’ai toujours détesté le mot « populisme ». Il vient du latin, « peuple », comme vous le savez, et est utilisé d’ordinaire, de nos jours, par ceux qui perdent du terrain, les jaloux, pour qualifier ceux qui en gagnent. On leur reproche quoi ? Mais d’avoir l’oreille du peuple, pardi ! Comme si ça n’était pas exactement la vocation de tout parti politique. En général, ce sont les partis de centre droit ou de centre gauche, les partis de pouvoir, ceux qui se partagent les prébendes, qui utilisent ce terme contre les marges, à la gauche de la gauche, la droite de la droite, voire les partis en émergence. Populisme de gauche. Populisme de droite. Soit. Mais saviez-vous qu’il existait un puissant populisme du centre ? Nous l’allons démontrer.


     
    Le populisme du centre, c’est appeler les gens à voter pour soi, sous prétexte qu’on est un parti « gouvernemental ». Autrement dit : « Nous occupons aujourd’hui le pouvoir, nous nous y sentons fort bien, soyez gentils de ne pas nous en déloger ». Un peu court, évidemment. Alors, on invente un sophisme : on dit qu’on est gouvernemental, parce qu’on pratique le consensus, et non la confrontation. Traduction : « Nous avons tissé des alliances avec les plus forts, fussent-ils nos pires ennemis, pour nous maintenir au pouvoir, vous n’allez tout de même pas nous virer. ». Autre truisme hallucinogène, faire croire que les opposants, ceux qui réclament une place au pouvoir, n’ont rien à proposer. En clair : « Veuillez nous écouter, nous, et fermer vos oreilles lorsqu’ils parlent, eux, car nous voulons demeurer au pouvoir ».


     
    Il arrive hélas que le populisme du centre aille plus loin. Ainsi, lorsque le PDC Luc Barthassat, candidat au Conseil d’Etat, au demeurant le meilleur des hommes, déclare à nos confrères du Courrier, à propos des transfuges : « Quand on a défendu des idées et des valeurs, partir sans broncher dans une formation à moitié raciste n’est pas sérieux ». C’est le populisme par l’hyperbole : outre qu’on aimerait en savoir plus sur cette étrange notion philosophique de « semi-racisme », on se dit que le sympathique conseiller national pousse un peu le bouchon : défendre la préférence à l’emploi local est une chose, le racisme en est, Dieu merci, une tout autre. Mais dans la bouche de M. Barthassat, ça passe. Parce qu’il est sympa, populaire, populiste tiens lui aussi, un jour les sans-papiers, le lendemain les chats, tous les sujets de société qui touchent la fibre. Un sacré malin, à vrai dire, qui a compris bien des choses pour atteindre directement le cœur des gens, je ne lui en fais pour ma part nul grief.
     


    Mais enfin, en quoi M. Barthassat serait-il moins populiste, dans ses méthodes de communication, que MM Golay ou Poggia ? Lui, comme eux, sait s’adresser au peuple. Il parle, on le comprend. En quoi serait-ce un crime ? Laissons-le vivre, laissons vivre aussi les partis de la Marge qui aimeraient participer aux affaires, ce est qui bien la moindre en politique. Et cessons d’utiliser à tous crins ce terme de populisme qui devrait être, au fond, un compliment. Juste dévoyé par la rancœur des jaloux. Des pète-sec. Et des inaptes à l’image.
     


    Pascal Décaillet