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La générosité suspecte de quinze roitelets

 

Commentaire publié dans GHI - Mercredi 01.06.22

 

L’argent de l’Etat, c’est l’argent du peuple. Notre argent. Ceux d’entre nous, tout au moins, qui sont soumis à l’impôt : on sait que plus d’un tiers des résidents genevois n’en payent pas, étant sous le seuil pour y être astreints. Oui, c’est notre argent, à commencer par celui des classes moyennes, vous savez ces gens qui se lèvent le matin pour aller bosser, n’ont droit à aucune subvention, sont littéralement pompés par la machine fiscale, triment toute leur vie pour aboutir à une retraite souvent chétive. C’est cela, le lot de dizaines de milliers de personnes à Genève. Cela, dont la gauche ne parle jamais : à la précarité des nôtres, elle préfère le discours sur l’altérité, les modes sociétales, la consommation de viande, la fin du monde.

 

Donc, nous payons l’impôt. Plus que partout ailleurs en Suisse. Pour nourrir un Etat cantonal dont la dépense publique est la plus haute du pays, par habitant. Cette dépense est régie par un document capital, voté chaque année en décembre (pour l’année suivante) par le Grand Conseil, qui s’appelle un Budget. Tout responsable familial, tout petit entrepreneur, même d’une micro-boîte, sait ce qu’est un budget : on détermine les postes de dépenses, en fonction de ce qu’on possède. A l’Etat, c’est autre chose. On n’a pas les fonds ? Pas de problème ! On en réclame, et on en réclame encore.

 

En décembre de l’an dernier, le Grand Conseil a refusé de donner un Budget à Genève. La droite a délivré un signal d’économies et de rigueur. L’Etat doit fonctionner, en 2022, avec les « douzièmes provisoires », qui imposent une gestion prudente, respectueuse des deniers publics.

 

Et c’est là qu’intervient le scandale des quinze roitelets. Qui sont-ils ? Les membres de la Commission des finances du Grand Conseil. Oh, individuellement, des gens très bien, respectables. Mais disposant d’un hallucinant pouvoir, peu connu du grand public : celui d’octroyer (eux, les quinze, sans passer par le plénum, encore moins par le peuple) les ineffables « crédits supplémentaires » que ne manquent pas de leur mendier, à longueur d’année, les sept Départements d’un exécutif d’une gourmandise financière inimaginable, le moindre de leurs appétits n’étant pas celui de la revanche, après le refus du Budget en décembre.

 

La Commission des finances a un mérite : celui d’informer. Chaque acceptation de crédit supplémentaire fait l’objet d’un communiqué. C’est bien. Mais le fond est souvent écœurant, vu par un simple citoyen-contribuable : à quoi sert le refus du Budget, acte politique majeur, si c’est pour que l’Etat vienne incessamment se servir, par derrière, tout au long de l’année ? Et nos braves roitelets, les quinze, dans l’écrasante majorité des cas, les acceptent, ces crédits ! Le système de la barbichette : si tu refuses les sous pour le magistrat de mon parti, la prochaine fois je refuserai pour le tien. Et la grande hypocrisie perdure : la décision souveraine, en plénum, du refus du budget, est régulièrement court-circuitée, a posteriori, par un procédé opaque et consanguin. Cette pantalonnade ne peut plus durer. Le système soit être réformé. La démocratie, la transparence, doivent s’imposer.

 

Pascal Décaillet

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