Sur le vif - Dimanche 07.03.21 - 14.48h
Dans notre démocratie suisse, le personnage principal, c'est le peuple. C'est lui qui décide. Le peuple, et non la rumeur. Le peuple, et non les réseaux sociaux. Le peuple, et non les coteries, de droite ou de gauche. Le peuple, et non les factions. Le peuple et non les partis. D'un côté, la tambouille des états-majors. De l'autre, le sel du peuple.
Au premier tour de l'élection complémentaire genevoise, le peuple a donné son verdict. Intermédiaire bien sûr, puisque seul compte le 28 mars. Mais il a livré une tendance.
La droite l'emporte sur la gauche, mais elle est divisée. La candidate de gauche, Fabienne Fischer, ne réunit même pas les voix de sa famille. Celui du PLR, Cyril Aellen, homme de grande valeur dont Genève aura encore longtemps besoin, obtient un résultat insuffisant pour se maintenir. Il quitte la course, tient parole, et ce respect des engagements, mendésiste quant au fond et quant à la forme, est la marque des hommes sur qui ont peut compter. Yves Nidegger, candidat de l'UDC, réalise un score canon, fruit d'une campagne inventive, libre d'esprit, provocante, rafraîchissante. Sa meilleure campagne, depuis que nous le suivons en politique.
Mais l'homme du jour, c'est Pierre Maudet. Le sel du peuple, c'est lui. L'énorme surprise, c'est lui. La solitude de l'indépendant, face aux cuisines des partis, c'est lui. A l'interne de son ancien parti, il triomphe. Non contre Cyril Aellen, mais contre un appareil. Il appartient à ce petit monde d'en tirer les conséquences, c'est leur affaire, pas la nôtre.
A ce stade, aucun pronostic n'est possible pour le 28 mars. Mais une chose est sûre : face à des candidats peu expérimentés dans un scrutin majoritaire, a fortiori une complémentaire, la puissance de feu, la connaissance du terrain, la passion du combat, ont aidé l'homme d'expérience.
Déjà, on nous parle de puissantes cogitations dans les officines des partis. Vous pouvez oublier. Les grands perdants de ce premier tour, et c'est une excellente chose, ce sont ces états-majors qui se croient propriétaires de la République. Le candidat Maudet, dans cette première manche, les a pulvérisés. Ca n'est certes pas gagné pour la seconde, mais bonne chance à ceux qui s'imaginent encore avoir écarté pour jamais ce phénomène de notre vie politique genevoise. Ce dimanche, il n'a pas représenté les factions. Mais quelque chose d'autre, de plus irrationnel, plus instinctif, plus sauvage, plus rebelle. Cela s'appelle le sel du peuple.
Pascal Décaillet