Sur le vif - Mardi 04.12.18 - 09.34h
Les gilets jaunes pulvérisent les corps intermédiaires. Au grand dam des chefs syndicalistes, totalement dépassés par l'irruption de cette concurrence inopinée. Incontrôlée. Non-recensée dans leurs fichiers d'adhérents.
Dans la mise en scène, il n'y a plus que le choeur, face au Prince. Même pas de coryphée.
Le choeur, unique acteur, face à Créon.
Il n'y a plus ni Eteocle, ni Polynice, ni Ismène. Il n'y a même plus Antigone.
Antigone, c'est le choeur tout entier. Il a ravi le rôle au personnage principal.
Il n'y a plus de personnage principal.
Il y a le choeur, face à Créon.
Les gilets jaunes, c'est la Révolution brechtienne. Sauf qu'il n'y a même plus de théâtre. Pas de texte. Ni actes, ni scènes. Ni intrigue.
Juste le choeur, face à Créon.
Préfiguration, dans la crise, de ce que pourraient être nos sociétés futures. Nos rapports de forces politiques et sociales. Disparition des corps intermédiaires. Mise en congé des médiateurs. La totalité d'une revendication, face à la solitude murée du pouvoir.
Pascal Décaillet