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Les chaînes françaises aux ordres de Matignon ?

 

Sur le vif - Lundi 23.03.15 - 12.49h

 

La manière dont les chaînes françaises nous ont présenté, hier 20h, puis une bonne partie de la soirée, les résultats provisoires ou les projections pour les élections départementales, est pour le moins singulière. Sur tous les programmes auxquels j’avais accès, on nous donne le chiffre du Front national. Mais nulle part celui de l’UMP, toute seule (sans l’UDI-UC-MoDem et les innombrables Divers Droite). Nulle part, non plus, celui du PS seul (sans les Divers Gauche). Autrement dit, on nous balance le résultat brut d’un parti (le FN), et on l’affiche pendant des heures en comparaison, non d’autres partis (l’UMP, le PS), mais de galaxies nommées « bloc de droite » ou « bloc de gauche ».

 

Il a fallu attendre 23h pour obtenir, enfin, le chiffre de l’UMP seule (déjà fort bon, d'ailleurs), et surtout celui du PS, seul. On le sait ce matin, ce dernier est clairement battu pas le FN. En clair, on a « gonflé » l’UMP avec les Divers Droite. Et surtout, on a gonflé à mort le PS avec une galaxie de Divers Gauche qui n’ont strictement rien à voir, non seulement avec le socialisme, mais surtout avec la social-démocratie de Manuel Valls. Pendant trois heures, on a mélangé des pommes avec des poires. Pendant ces trois heures, tellement précieuses, une immense partie des spectateurs sont allés se coucher, les rotatives de presse écrite ont tourné, certains journaux plaçant ce matin le FN en troisième position, en tant que parti, alors qu’il est clairement deuxième.

 

Pendant trois heures, on a fait croire aux Français l’existence d'un « bloc de gauche » ou d’un « bloc de droite » qui ne sont, l’un comme l’autre, que pure fiction. La logique de ces départementales n’a strictement rien à voir avec le scrutin majoritaire, uninominal à deux tours, qui prévaut en France pour les législatives depuis la Cinquième République, à part la brève parenthèse proportionnelle inventée en 1986 par François Mitterrand pour affaiblir Jacques Chirac. Pendant trois heures, on a créé l’illusion de blocs idéologiques qui seraient sémantiquement homogènes, alors qu’ils se combattent. D’ailleurs, il suffisait de voir, hier soir, l’ambiance entre la gauche de la gauche, celle de Mélenchon notamment, et le PS, pour constater que la seule vraie nouvelle de ce 22 mars était la fin, à gauche, de la primauté socialiste conquise de haute lutte, de 1971 (Epinay) à 1981 (prise du pouvoir) par François Mitterrand. A l’époque, contre son grand rival, le Parti communiste.

 

Pour Manuel Valls, il y a non seulement défaite face aux Français, mais revers historique, lourd de conséquences, dans les rapports internes à la gauche française. Tout cela, bizarrement, a été soigneusement tu, sur les chaînes françaises, de 20h à 23h. On a laissé Manuel Valls se précipiter à l’antenne quelques minutes après les résultats et projections de 20h. On n’a cessé, comme des perroquets, de répéter que le PS « limitait la casse », alors que ce parti subit une défaite majeure. L’UMP s’en sort fort bien, même sans avoir besoin de la gonflette des Divers Droite. Et le FN conforte largement son ancrage, son maillage dans la vie politique française.

 

Pourquoi le résultat isolé, sans les Divers Gauche, du PS, n’a-t-il pas franchement été donné dès 20h ? Pourquoi, pendant trois heures, a-t-on mis en balance le résultat intrinsèque d’un parti avec celui de « coalitions » imaginaires ? Pourquoi, surtout, le grave revers du PS a-t-il été caché jusqu’aux environs de 23h ?

 

 

Pascal Décaillet

 

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